Crise de l’hôpital : au CHU Brest, ce « mur de la honte » dénonce l’attente interminable aux urgences
SANTÉ - Derrière les noms qui s’accumulent, des patients victimes de la crise hospitalière. Au CHU de Brest, sous-préfecture du Finistère, des soignants inscrivent sur un « mur de la honte » les prénoms et initiales des personnes âgées de plus de 75 ans qui ont patienté plus de 12 heures aux urgences.
Au micro de l’antenne locale de France Bleu ce mardi 20 août, Stéphane Vialas, infirmier de bloc opératoire et représentant syndical CGT au sein de l’établissement, lit : « Madame C, 27 heures aux urgences, le 6 août ». Ces informations sont inscrites sur des feuilles A4 que les soignants collent ensuite sur ce fameux mur, recouvert désormais d’une bonne centaine de papiers.
Une prise en charge qui s’allonge
Précisément, selon la CGT, depuis le 10 juillet, plus de 130 patients âgés de 75 ans et plus ont passé plus de 12 heures aux urgences avant d’être pris en charge, dont une quarantaine ont patienté plus de 23 heures. Or « une étude faite par l’AP-HP (le CHU d’Île-de-France, ndlr) explique qu’une nuit passée sur un brancard aux urgences augmente la mortalité de plus de 40 % pour les patients de plus de 75 ans », complète le syndicaliste Stéphane Vialas.
La direction du CHU de Brest donne, elle, des chiffres différents et encore plus élevés que ceux de l’organisation syndicale. Dans un communiqué, transmis à France Bleu, elle indique qu’« entre le 10 juillet et le 7 août, 969 patients de + 75 ans ont été accueillis aux urgences avec un délai moyen de prise en soins de 10 h 58. 71 patients de +75 ans (soit 7 %) ont été pris en soins sur une durée supérieure à 23 heures ».
Or au-delà des risques sur la santé des patients, derrière cette durée de prise en charge qui s’allonge se cache aussi un problème dénoncé depuis une dizaine d’années par le personnel hospitalier : la pénurie de personnel et de lits pour accueillir les malades.
Le ministre de la Santé admet une situation « délicate »
Car au manque d’effectif endémique s’ajoutent les congés d’été, au point que les temps d’attentes deviennent interminables. Les urgences d’« une cinquantaine d’hôpitaux » français « sont actuellement en tension » par manque de personnel, a confirmé mardi à Ouest-France le ministre délégué à la Santé démissionnaire, Frédéric Valletoux, sans préciser combien avaient dû fermer totalement ou partiellement. « C’est un peu mieux que l’été dernier et en tout cas les tensions ne sont pas aussi fortes qu’au cours de celui de 2022 », a-t-il ajouté.
Le tout en admettant qu’« il reste, c’est vrai, des situations délicates à réguler ». Au CHU de Brest, par exemple, « le temps d’attente moyen, entre l’arrivée et la sortie des urgences (...) a pu monter à 9 heures » ces dernières semaines, mais se situe habituellement plutôt autour « de 6 ou 7 heures », a-t-il expliqué. D’ailleurs, les autorités trouvent « des solutions au cas par cas » et les récentes mesures prises par l’exécutif, comme la revalorisation des gardes de nuits et week-end des personnels hospitaliers, « portent leurs fruits » : « il est plus facile de recruter (...) durant cet été », a assuré le ministre.
Sur France Inter, le président de la Fédération hospitalière de France Arnaud Robinet a, lui, fait état d’une « situation très contrastée et hétérogène » sur le territoire. Il a appelé à « renforcer la complémentarité entre public et privé », travailler à « la réorganisation interne » des établissements, et sur l’attractivité des carrières. Autant de chantiers qui devraient incomber au prochain ministre de la Santé, si tant est que les forces politiques s’accordent un jour sur la formation d’un gouvernement à même de prendre des mesures.
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