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Crise agricole: Manuel Valls interpelle Europe et distributeurs

Face à la crise qui frappe en particulier les éleveurs de porcs et les producteurs de lait, Manuel Valls a réuni lundi des dirigeants de Carrefour, Casino, Auchan, Cora, Intermarché, Lidl et Système U, ainsi que Stéphane Le Foll et le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron. /Photo d'archives/REUTERS/Stéphane Mahé

PARIS (Reuters) - Manuel Valls a pressé lundi la Commission européenne d'accentuer sa lutte contre les crises agricoles, après avoir discuté de mesures de soutien aux agriculteurs et de réformes structurelles avec les groupes de grande distribution présents en France. Le Premier ministre a réuni des dirigeants de Carrefour, Casino, Auchan, Cora, Intermarché, Lidl et Système U, avec le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll et celui de l'Economie, Emmanuel Macron, au moment où de nouveaux barrages étaient érigés par les éleveurs. Il a demandé aux distributeurs de ne pas anticiper une baisse des prix des produits agricoles dans les négociations commerciales qui s'achèveront le 1er mars, de poursuivre les actions de valorisation des produits locaux, d'entrer dans des partenariats avec leurs fournisseurs et d'accentuer la contractualisation. Face à la détresse des producteurs de porc, qui manifestent depuis plusieurs semaines, un fonds de soutien est discuté entre le syndicat FNSEA et la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), présente à la réunion. Il pourrait être alimenté grâce à une hausse du prix du porc de 10 centimes par kilogramme. "Ces discussions vont se poursuivre demain et dans la semaine pour aboutir à des solutions d'urgence pour les éleveurs les plus en difficulté, avec l'idée d'un fonds qui viendrait appuyer les trésoreries", a dit Stéphane Le Foll. Le président de la FCD, Jacques Creyssel, également président de Cora, a précisé qu'une telle initiative nécessitait un accord des autorités de la concurrence française et européenne. "Ces discussions sont en cours", a-t-il déclaré. "CONSENSUS FORT", DIT MACRON Pour répondre au problème du prix payé aux producteurs, parfois trop faible pour couvrir leurs coûts, la loi de modernisation de l'économie (LME) pourrait être modifiée pour que les négociations tarifaires associent à la fois les producteurs, les industriels et les distributeurs. "Ça permettrait de tout résoudre", a dit le PDG de Système U, Serge Papin. "Imaginez qu'au moment des négociations, il y ait non seulement les transformateurs mais aussi les producteurs, à partir de ce moment là, il y a une signature à trois et un engagement d'un prix minima sur la production." Des mesures rapides pour le lait ont été discutées, avec la possibilité d'une garantie des prix à leur niveau de 2015. Emmanuel Macron a dit qu'il existait un "consensus fort" pour trouver une solution tripartite entre distributeurs, industriels et producteurs de lait. Parallèlement, Stéphane Le Foll a proposé "des mesures de régulation des marchés" qui doivent être discutées à l'occasion du conseil des ministres de l'Agriculture de l'UE du 15 février, a ajouté le Premier ministre français. "La Commission doit activer les pouvoirs dont elle dispose en cas de crise, jusqu'à présent elle a fait trop peu et trop tard", a dit Manuel Valls. Selon le mémorandum adressé par Stéphane Le Foll aux autorités européennes, transmis à Reuters, la France demande un relèvement temporaire du prix d'achat public par l'UE (prix d'intervention) de la poudre de lait afin d'éponger le marché. Elle souhaite la création de mécanismes permettant de donner des aides aux producteurs qui ont volontairement réduit leur production en période de baisse des prix, la prolongation de l'aide au stockage privé pour le porc et obtenir l'indication du pays d'origine de la viande dans les produits transformés. La France demande en outre la création d'un outil de crédit européen à l'exportation et des outils financiers de la Banque européenne d'investissement (BEI), notamment pour aider les exploitations les plus endettées. "La Commission est très consciente de la situation, pas seulement en France", avait dit un porte-parole de l'exécutif européen après les déclarations de Manuel Valls. Rappelant que 420 millions d'euros avaient été débloqués en urgence pour les membres de l'Union, il avait ajouté que "c'est aussi aux Etats membres de faire usage de cet argent et des autres mesures qui ont été mises en place" pour les secteurs du lait et de l'élevage. Manuel Valls a ajouté qu'il rencontrerait samedi le Premier ministre russe, Dmitri Medvedev, et qu'il évoquerait avec lui la levée de l'embargo sanitaire russe sur la viande porcine. (Jean-Baptiste Vey, édité par Yves Clarisse)