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Covid-19 : changement de stratégie, manque de doses... le ras-le-bol de certains médecins vaccinateurs

Photo d'illustration

Depuis le 25 février, les médecins généralistes peuvent vacciner certains patients avec le vaccin AstraZeneca. Sauf que le profil des patients éligibles ne cesse d'évoluer et vire au casse-tête pour les médecins.

Les médecins généralistes sont au coeur de la stratégie d'accélération de la vaccination en France, avec notamment les livraisons massives de doses d'AstraZeneca. Depuis le jeudi 25 février, ils peuvent officiellement vacciner certains patients, les personnes âgées de 50 à 65 ans atteints de comorbidités.

Sauf que depuis le lancement officiel de cette campagne de vaccination, les consignes ne cessent de changer au rythme des mails envoyés par la Direction Générale de la Santé (DGS) et des recommandations de la Haute Autorité de Santé. De quoi susciter la colère de certains médecins, qui déplorent des informations qui ne cessent de changer.

"On est un peu perdu"

Le 25 février, le ministère de la Santé expliquait que "les personnes de 65 à 74 ans pourront se faire vacciner en avril, avec un vaccin à ARN messager". Quatre jours plus tard, le 1er mars, la Haute Autorité de Santé rendait un avis, communiqué le 2 mars par la DGS aux médecins, concluant que le vaccin AstraZeneca peut être administré aux plus de 75 ans et aux 65-74 ans présentant des comorbidités. Deux tranches d'âge qui étaient jusqu'à présent exclues de la vaccination avec AstraZeneca.

"On est un peu perdu dans les ordre et les contre-ordres. Que doit on dire à nos patients ?" s'interroge Clarisse Audigier-Valette, responsable de l'Unité Covid-19 de l'hôpital Sainte-Musse de Toulon. "Quand aurons-nous enfin droit à une information qui ne change pas trois fois par semaine?", renchérit le docteur Richard Talbot, médecin généraliste.

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"Un vrai casse-tête"

Derrière ces changements incessants de stratégie vaccinale, la mise en place sur le terrain est rendue plus compliquée. "Ça va devenir un vrai casse-tête, car on a dû expliquer à des patients d'un certain âge qu'ils devaient attendre avril avant d'être vaccinés. Sauf que maintenant ils sont éligibles au vaccin AstraZeneca. Donc on va devoir les rappeler et leur expliquer. Le risque c'est que ces patients préfèrent attendre quelques semaines un vaccin à ARN (Pfizer et Moderna, ndlr)", note le docteur Jonathan Fabre.

"Pour nous médecins, il va falloir tenir des comptes pour savoir quel patient veut être vacciné, lequel refuse AstraZeneca mais accepte un vaccin à ARN... ça va être compliqué", redoute le médecin généraliste dans le Nord qui participe à la campagne de vaccination. La livraison des vaccins à ARN doit s'accélérer dans les semaines à venir. Entre mars et mai, la France doit recevoir environ 30 millions de doses de vaccin Pfizer et Moderna.

Autre problème rencontré par les médecins qui participent à la campagne de vaccination, des difficultés sur le nombre de doses. Car chaque médecin généraliste ne peut pas avoir plus d'un certain nombre de flacons, un au début de la vaccination, et actuellement trois par semaine, soit 30 injections en théorie. Une dotation qui évolue au fur et à mesure des livraisons du vaccin.

"Libérez les doses d'AstraZeneca !"

"Le problème de cette dotation en flacons, c'est que le nombre de doses par médecin généraliste n'est pas adapté à sa patientèle. On a tous le même quota alors que certains médecins ont du mal à trouver 10 patients éligibles à AstraZeneca, parce qu'ils ont des patients jeunes, ou parce qu'ils ont une patientèle moins importante par exemple" poursuit Jonathan Fabre, qui explique qu'il pourrait vacciner davantage de patients s'il avait plus de flacons.

D'autant que selon les chiffres du 28 février, seul un quart des doses d'Astra Zeneca reçues par la France ont été injectées, essentiellement en raison des difficultés à vacciner le personnel hospitalier. "Il faut libérer les doses de vaccin AstraZeneca en permettant aux généralistes qui ont les patients éligibles à la vaccination de pouvoir commander davantage de flacons", souhaite Michaël Rochoy, généraliste dans le Pas-de-Calais qui participe également à la campagne de vaccination.

"Une stratégie vaccinale au doigt mouillé"

Autant de difficultés qui interrogent certains médecins à poursuivre les opérations de vaccination. "Il ne faut pas oublier qu'organiser la vaccination, cela demande du temps au généraliste. Il faut sélectionner les patients, les appeler, trouver un créneau, en plus des consultations habituelles", rappelle le docteur Bertrand Legrand, médecin généraliste à Tourcoing.

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"Ces ordres et ces contre-ordres donnent l'impression d'une stratégie vaccinale faite au doigt mouillé. 'Il nous reste du stock; on va élargir la vaccination'. Ce n'est pas sérieux comme stratégie. Il faut que l'Etat soit transparent sur les stocks de vaccins disponible, et qu'ils soient répartis au mieux pour vacciner rapidement", réclame Jérôme Marty, président du syndicat Union Française pour une Médecine Libre, qui prône pour un élargissement massif de la vaccination aux plus de 50 ans sans distinction, et aux moins de 50 ans avec comorbidité.

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