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Covid-19: les meetings politiques, "une machine à cluster" pour les infectiologues

Eric Zemmour, candidat à l'élection présidentielle  tient son premier meeting le 5 décembre 2021 à Villepinte, près de Paris  - JULIEN DE ROSA © 2019 AFP
Eric Zemmour, candidat à l'élection présidentielle tient son premier meeting le 5 décembre 2021 à Villepinte, près de Paris - JULIEN DE ROSA © 2019 AFP

Des centaines de gens assis côte à côte sans masque ou sous le nez, des personnalités sur la scène en train de chanter la Marseillaise à pleine voix sans distance de sécurité... Les images du meeting d'Éric Zemmour à Villepinte, alors que les contaminations liées au Covid-19 sont en hausse de 60% en une semaine, ont surpris.

"Toutes les conditions pour attraper le Covid"

"Je suis très en colère. Ce meeting est une chose très répréhensible en réunissant toutes les conditions possibles pour attraper le Covid. Ce n'est pas parce qu'on parle politique qu'il ne faut pas appliquer les gestes barrières", s'énerve l'infectiologue Yves Buisson, directeur de la cellule Covid-19 de l'Académie de médecine, auprès de BFMTV.com.

"C'est une machine à cluster", a encore asséné Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital Tenon à Paris, ce lundi sur France info.

Samedi soir pourtant, Antoine Diers, le porte-parole de l'Association des amis d'Éric Zemmour, nommé depuis directeur adjoint de campagne, assurait que les règles sanitaires seraient bien respectées.

"Tout le monde portera un masque. Des équipes de bénévoles seront déployées pour vérifier que tout le monde porte un masque", expliquait ainsi le jeune homme sur LCI, interrogé sur l'absence de pass sanitaire à l'entrée du meeting.

Un moment de partage

Le Conseil constitutionnel a en effet estimé en mai dernier qu'il n'était pas possible d'exiger le pass sanitaire à l'entrée d'un événement politique ou d'un bureau de vote afin de préserver la vie démocratique.

"Réactiver les possibilités de se croiser pour des milliers de gens dans un espace clos, sans gestes barrières, dans un moment où l'on a de grandes chances de crier et de chanter, est tout sauf une bonne idée, mais ce relâchement se comprend", estime d'ailleurs Michèle Legeas, spécialiste de l'analyse et de la gestion des situations à risques sanitaires, à BFMTV.com.

"Le temps du meeting est chargé d'affect politique. On vient pour vivre un moment collectif et finalement, on a moins l'impression d'être dans le partage quand on porte le masque", fait remarquer l'enseignante de l'École des hautes études en santé publique.

Annulation du meeting de Valérie Pécresse

Selon les calculs du Parisien, avec un taux d’incidence de 400 cas positifs pour 100.000 habitants sur la semaine écoulée, il y a 100% de risque qu’un des participants à un meeting soit positif lorsque au moins environ 300 personnes sont réunies. 15.000 personnes ont assisté ce dimanche au meeting du polémiste d'après l'AFP.

Face à ces risques sanitaires, les Républicains ont choisi d'annuler le premier meeting de campagne de Valérie Pécresse. D'abord envisagé en présentiel, ce grand raout devait finalement avoir lieu en visio, avant d'être simplement et purement remplacé par une réunion des cadres du mouvement.

"On ne pouvait pas prendre le risque de devenir le premier cluster de France", a ainsi expliqué le patron des LR sur BFMTV ce dimanche.

"Ce n’est pas une démonstration de force que de contaminer les Français", a estimé de son côté Valérie Pécresse ce lundi sur France inter.

Les jauges, "un outil efficace" pour Pelloux

Les partis politiques qui maintiennent leur grand rendez-vous ont, eux, choisi de s'adapter. Lors du prochain meeting d'Anne Hidalgo à Perpignan le week-end prochain, le pass sanitaire sera exigé à l'entrée et le port du masque obligatoire.

Pour le rassemblement de Yannick Jadot le dimanche 11 décembre, des mesures ont déjà été prises: une jauge à 50%, des bus pour faire venir les participants jusqu’au gymnase qui accueillera l'événement, ce qui permet de s’assurer qu’ils ne seront pas plus de 350. Tous les autres inscrits sont invités à suivre le meeting à distance.

Les infectiologues, eux, évoquent plusieurs pistes pour essayer d'allier traditions électorales et respect des impératifs sanitaires. "On pourrait faire plusieurs semaines sans aucun grand événement politique, pour laisser passer la vague", avance ainsi Yves Buisson.

"Je milite pour les jauges, c'est un outil efficace en permettant de garder de bonnes distances et de permettre le maintien des meetings", explique de son côté Patrick Pelloux, président de l'association des médecins urgentistes de France, à BFMTV.com.

Des meetings en extérieur

On peut estimer qu’en-dessous de 2.000 ou 1.000 personnes présentes dans un lieu clos, "les risques diminuent", estime ainsi Mircea Sofonea, maître de conférences en épidémiologie et évolution des maladies à l’Université de Montpellier, dans les colonnes du Parisien.

Des meetings à l'extérieur, moins risqués qu'en intérieur, sont également sur la table. "En plein hiver, ça me semble compliqué mais ça peut être une solution pour les dernières semaines de campagne au printemps", juge Michèle Legeas.

Si Jean Castex n'a pas annoncé de mesure spécifique sur la tenue des meetings lors de conférence de presse ce lundi soir, le Premier ministre a fortement insisté sur "l'organisation des flux" dans les lieux clos qui doit permettre de "limiter les croisements et les interactions sociales".

Article original publié sur BFMTV.com