Covid-19: faut-il de nouveau fermer les écoles en France?

Jour de rentrée dans une école à Montpellier le 1er septembre 2020.
Jour de rentrée dans une école à Montpellier le 1er septembre 2020.

Alors que l'arrivée de variants du Covid-19 fait craindre une progression de l'épidémie, la positivité des tests a augmenté ces derniers jours chez les plus jeunes en France. Comme régulièrement depuis le début de la crise sanitaire dans l'Hexagone, la question du maintien de l'ouverture des établissements scolaires se pose. Plusieurs scientifiques appellent à leur fermeture, quand les syndicats d'enseignants préfèreraient qu'ils restent ouverts le plus longtemps possible.

"Il y a plusieurs pays européens qui ont pris cette décision, difficile à prendre, mais qui se justifie du fait de l'impact important de l'école, et en particulier du moment de la pause déjeuner à la cantine, où on sait qu'il est très difficile de faire respecter les gestes barrières", déclare mardi sur BFMTV Djillali Annane, chef de service réanimation à l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches, dans les Hauts-de-Seine.

"À la cantine forcément, on enlève le masque"

"Vous avez des enfants et adultes venus d'endroits différents qui se retrouvent durant toute la journée. Et à midi, à la cantine, ils mangent sans masques et se parlent. Puis le soir, ils repartent chez eux", rappelle dans L'Express l'épidémiologiste Dominique Costagliola. Parmi les scénarios envisagés par le gouvernement, la fermeture des cantines pour réduire les possibles contaminations, est en effet sur la table, car c'est un lieu à plus forte contamination.

"À la cantine, forcément, on enlève le masque quand on déjeune", concède Frédérique Rolet, secrétaire générale du syndicat enseignant SNES-FSU, sur BFMTV. Elle propose de faire manger les élèves dans des salles différentes, mais cela nécessiterait plus de personnel.

"C'est l'endroit où l'application des gestes barrières est le plus compliqué", explique Philippe Vincent, secrétaire général des personnels de direction SNPDEN-UNSA à BFMTV. Mais il ajoute que "dans beaucoup de cas" clore les cantines reviendrait de facto "à fermer les collèges et les lycées", car les élèves passent la journée dans l'établissement, et peuvent habiter trop loin pour rentrer manger chez eux.

"L'application des protocoles en partie renforcé a permis de contrôler me semble-t-il dans de bonnes conditions les risques que l'on pouvait connaître dans ce secteur-là", ajoute-t-il.

"Il faut distinguer les petits enfants des collégiens et lycéens"

L'étude française ComCor, visant à déterminer les lieux de contamination en France, avait souligné deux points recoupant la problématique des écoles: "Être plus nombreux à vivre dans le foyer, notamment avec des enfants en crèche ou scolarisés", est associé à un risque augmenté d'attraper le Covid-19, et "les repas jouent un rôle central dans ces contaminations, que ce soit en milieu familial, amical, ou à moindre degré professionnel".

"Dans les familles, où les gestes barrières ne sont plus possibles comme à l'école, eh bien il y a des enfants qui ont ramené le virus et ont infecté" leurs proches, expliquait en décembre l'épidémiologiste Arnaud Fontanet sur BFMTV. "Ce qui est intéressant c'est que les enfants du primaire n'ont pas infecté, ce qui rejoint d'autres études laissant entendre que les enfants de moins de dix ans sont moins contagieux", alors que les enfants du collège ou du lycée ont, eux, pu contaminer leurs parents.

Plusieurs études depuis le début de la pandémie montrent que les enfants sont beaucoup moins porteurs et contaminent moins que les adultes, et en ce sens, Djillali Annane suggère de distinguer le traitement entre les élèves selon leur âge.

"Il faut distinguer les petits enfants, en gros l'école primaire et la maternelle, des collégiens et des lycéens, qui sont eux plus fréquemment porteurs", explique-t-il. "La prévalence de la contamination ou des tests positifs n'est pas la même chez les enfants de l'école primaire versus collège et lycée. Les considérer de la même façon, c'est peut être faire une erreur grossière".

"On est tiraillé entre des impératifs pédagogiques et sanitaires"

"Ce n'est pas forcément tout ou rien. En Angleterre, les écoles sont fermées, mais les nurseries restent ouvertes", continue le médecin, ajoutant que "les plus vulnérables, ceux qui sont en situation sociale précaire, sont pris en charge à l'école".

Si les représentants des enseignants ont du mal avec la fermeture des écoles, ils ne contredisent pas les conclusions scientifiques. Leur but est de trouver des solutions pour que les élèves les plus fragiles ne lâchent pas l'école. "Ce que l'on constate en tant qu'enseignant, ce sont les dégâts procurés par l'enseignement à distance, on l'a vécu au moment du confinement en mars l'année dernière", alerte Frédérique Rollet.

"On est vraiment tiraillé entre des impératifs pédagogiques et des impératifs sanitaires", constate-t-elle.

"Volonté absolue de préserver l’école"

"Il faut vraiment que la situation sanitaire soit gravissime pour fermer des écoles", a déclaré le Premier ministre Jean Castex la semaine dernière, "car nous savons que les conséquences, y compris sanitaires de la fermeture des écoles, sont absolument dramatiques". Le gouvernement se prépare à "toutes les hypothèses" mais veut "éviter jusqu'au bout un confinement des écoles", a confié une source à l'AFP lundi. "Nous avons une volonté absolue de préserver l’école. C'est essentiel pour nous", assurait-on encore ce mardi au sommet de l'État, d'après des informations du service politique de BFMTV.

Les prochaines décisions seront discutées ce mercredi lors d'un Conseil de défense consacré à la crise sanitaire, avant une conférence de presse du gouvernement ce jeudi.

Article original publié sur BFMTV.com