L'État refuse la fermeture du centre de rétention de Mayotte malgré des cas de Covid-19

Selon une source policière contactée par StreetPress, deux bateaux par semaine quittent Mayotte en direction des Comores.

Alors que des ONG et des policiers ont demandé la fermeture du centre de rétention administratif (Cra) de Mayotte en raison de plusieurs cas de coronavirus, l’État aurait tout simplement refusé, selon StreetPress.

Une situation préoccupante. Au Centre de rétention administratif (Cra) de Mayotte, où sont enfermés de nombreux étrangers avant d’être expulsés du territoire, le Covid-19 semble circuler entre les gens en rétention. C’est en tout cas ce qu’affirment plusieurs policiers travaillant dans ce bâtiment, comme l’affirme le média StreetPress. S’il est impossible de donner un nombre précis de cas de Covid-19, la préfecture refusant de le faire, “ça se compte largement en dizaines”, d’après Adric Jamey, délégué départemental d’Alternative Police. Un cluster qui “met en danger tout le monde”, comme le déclare sous couvert d’anonymat un membre de la section locale d’UNSA Police au site d’information indépendant.

Les syndicats UNSA Police et Alternative police ont même écrit à des responsables politiques et à la préfecture pour demander la fermeture du centre, ce qui a été refusé, comme le prouve la réponse du préfet de Mayotte, Jean-François Colombet, que StreetPress s’est procurée.

La santé, pas une priorité

“Je ne peux accéder à votre demande de fermeture du centre de rétention. Je m’étonne d’ailleurs de cette requête alors qu’il est établi que la société dans son ensemble va devoir apprendre à vivre avec ce virus.”

Une réponse ferme qui se conclut par : “Je sais également pouvoir compter sur votre soutien à l’action de l’État en matière de lutte contre l’immigration clandestine”, qui semble confirmer les dires d’Adric Jamey concernant la pression de l’État au sujet des expulsions : “Dès le début du confinement, il y avait une pression de la préfecture pour reprendre les expulsions. La seule chose qui compte pour eux, c’est faire du chiffre”. La santé ne semblerait donc pas la priorité de la préfecture comme le confirment également les propos d’Abdel Sakhi, membre lui aussi du syndicat Alternative Police et membre de l’unité d’interpellation de la police aux frontières : “C’est la lutte contre l’immigration clandestine (LIC) qui passe avant tout. Souvent, dès le matin, quand le patron arrive dans les locaux, il nous dit qu’il faut interpeller car il n’y a pas assez de monde au Cra”.

Dominique Voynet, directrice de l’Agence régionale de santé (ARS) et ancienne ministre écologiste, reconnaît que “plus de 10% des personnes interpellées en mer sont positives au coronavirus” mais estime que les mesures nécessaires sont mises en place. “Des tests sont systématiquement effectués dès que les personnes arrêtées arrivent au CRA. Les cas positifs sont ensuite envoyés vers un centre de soin dans le village de Tsararano.” Mais comme l’indique une source du Cra à StreetPress, elles sont “testées mais mélangées avant les résultats du test”.

Des conditions insalubres

Il y a de ça plusieurs mois, des associations avaient déjà dénoncé la mauvaise gestion de l’épidémie au sein du Cra, confirmé par des témoignages de personnes arrêtées. L’un d’entre eux explique à StreetPress qu’il a eu un seul masque jetable à garder pendant 48 heures, pas de savon ni de gel pour se laver les mains et qu’ils étaient 12 entassés dans une petite salle dans des conditions exécrables. Une version confirmée par ces images que le média indépendant s’est procuré.

La nouvelle sous-préfète dédiée à la lutte contre l’immigration clandestine Nathalie Gimonet refuse de communiquer le nombre exact de reconduites ainsi que le nombre de tests positifs depuis la reprise des expulsions. Une source policière a confié à StreetPress que deux bateaux prennent la mer chaque semaine en direction des Comores et que vendredi dernier, l’un d’entre eux a quitté l’île avec 120 personnes à bord.

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