Covid-19 : doit-on s’inquiéter de la baisse de la vaccination en France ?

Depuis plusieurs jours, le nombre de primo-injections diminue considérablement et la chute du nombre de rendez-vous laisse présager une baisse plus importante dans les semaines à venir.

Selon les chiffres du gouvernement, le nombre de premières injections de vaccin contre le Covid-19 ne cesse de baisser ces derniers jours et une baisse plus importante pourrait survenir dans les prochaines semaines. De quoi s'inquiéter ?

Le tant redouté "plafond de verre" de la vaccination contre le Covid-19 est-il en train d'arriver en France ? Alors qu'un peu plus de 33 millions de Français ont reçu au moins une dose de vaccin et que plus de 21 millions d'entre eux sont complètement vaccinés, le nombre de primo-injections est en chute libre depuis quelques semaines. En cette fin de mois de juin, environ 200 000 Français reçoivent leur première injection d'un vaccin contre le Covid-19 chaque jour contre plus de 400 000 au cours du mois de mai. Les injections de secondes doses restent pour l'instant en hausse, mais vont donc elle aussi reculer au cours des prochaines semaines.

L'exécutif s'inquiète et ne s'en cache pas : "On vaccine 200 000 personnes par jour en première dose. C'est trop peu. On a fait beaucoup mieux, et on doit faire beaucoup mieux", avait annoncé Jean Castex la semaine dernière lors de son déplacement dans les Landes, où le variant Delta provoque un premier rebond épidémique. "Ayez peur du virus, n'ayez surtout pas peur du vaccin", avait ajouté le chef du gouvernement pour inciter les Français à se rendre dans les centres de vaccination.

Des chiffres qui devraient continuer à chuter

La tendance ne devrait pas s'améliorer dans les semaines à venir. Le nombre de rendez-vous pris sur la plateforme Doctolib étant au plus bas depuis le début du mois d'avril avec moins de 120 000 rendez-vous pris chaque jour (en moyenne mobile sur 7 jours), contre plus de 340 000 le 12 mai. Des chiffres très peu rassurants quand on sait que le public éligible à la vaccination n'a jamais été aussi large, puisque toutes les personnes de plus de 12 ans peuvent se faire vacciner depuis le 15 juin dernier. De plus, contrairement au début du lancement de la campagne de vaccination, la France dispose de très nombreuses doses de vaccins et de nombreux créneaux sont disponibles pour se faire vacciner.

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Récemment, le gouvernement a décidé de réduire à 21 jours le délai obligatoire entre deux doses de vaccin, contre 35 auparavant. Une décision prise dans le but de convaincre ceux qui ne prenaient pas rendez-vous pour une première injection, par peur de devoir recevoir la seconde dose pendant leurs vacances d'été. Environ trois quart des Français seraient favorables à la vaccination, c'est pourquoi le réservoir de personnes à vacciner est encore conséquent. Avec la fermeture de certains centres de vaccination et les soignants qui seront moins mobilisés pour piquer cet été, l'exécutif multiplie les mesures pour attirer ces personnes à se faire vacciner avant la mi-juillet, afin d'éviter un maximum de restrictions pendant les vacances d'été, mais cela ne semble pas gagné.

Le risque d'une nouvelle vague meurtrière

Pour l'épidémiologiste Marc Gastellu-Etchegorry, cette récente baisse du nombre de primo-vaccinés est inquiétante et remet en question l'objectif d'immunité collective : "On doit s'inquiéter parce qu'on a vécu un certain nombre de confinements et ça n'a pas été facile du tout. La vaccination est un bon moyen d'éviter les cas graves et on sait que pour être efficace, la vaccination doit être faite à un pourcentage élevé de la population. Mais là, avec cette baisse du nombre de vaccinés, j'ai bien peur qu'on n'atteigne jamais ce niveau."

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Par ailleurs, le variant Delta, plus transmissible et plus virulent que les autres variants, gagne du terrain sur le territoire et pourrait être majoritaire d'ici la fin du mois d'août dans l'Hexagone et représenter 90% des nouveaux cas dans l'UE. Dans son rapport publié le 23 juin, l'ECDC précise qu'il serait 40 à 60% plus contagieux que le variant dit britannique, qui est en grande partie responsable de la troisième vague épidémique en France. "Avec le variant Delta, qui a une transmissibilité bien plus forte, on prend le risque d'avoir une nouvelle vague meurtrière. Le manque de vaccination à l'heure actuelle est selon moi très dangereux", prévient le directeur-adjoint d'Epicentre, entité de MSF spécialisée dans l'épidémiologie.

Gros danger avant l'été

De plus, cette chute des primo-injections intervient à une période où les contaminations sont susceptibles de repartir à la hausse. Les rassemblements entre jeunes, qui sont encore très peu protégés (seulement 13,7% des 18-29 ans sont entièrement vaccinés), devraient se multiplier dans les semaines à venir. "Avec l'été qui revient, les restrictions qui sont de moins en moins nombreuses et le brassage des populations, il y a de gros risques. Je ne joue pas aux prédicateurs donc je ne dirais pas que la quatrième vague est inévitable, mais il y a de fortes chances qu'elle arrive."

Bien que de nombreux Français soient anti-vaccins, Marc Gastellu-Etchegorry ne s'attendait pas une une telle baisse du nombre de primo-vaccinés, d'autant plus que la balance bénéfices/risques penche selon lui largement en faveur du vaccin. "Je ne m'attendais pas à ce que la vaccination baisse aussi rapidement, je pensais qu'il y aurait une prise de conscience plus importante. On savait qu'il y aurait un noyau d'irréductibles, mais je ne pensais pas que ça serait une part aussi importante de la population. Bien sûr il y a des risques d'effets secondaires mais si on compare au danger d'avoir la population pas vaccinée, il n'y a pas photo. Il y aura bien plus de malades et de morts à cause de la non-vaccination et là, on, et en train de perdre du temps. Il y en a beaucoup qui refusent parce qu'il faut résister à un certain nombre de mesures, à ce qu'ils appellent la dictature sanitaire. Pour moi ce ne sont pas des résistants mais des collaborateurs avec le virus."

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