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Le courage de continuer à vivre : Roberto Saviano rend hommage à Salman Rushdie

“Les coups qui ont fendu la chair de Salman Rushdie ont touché un homme libre”, écrit Roberto Saviano, au lendemain de l’attaque contre l’écrivain américano-britannique d’origine indienne. Ce 12 août, Rushdie était à Chautauqua, dans l’État de New York, pour une conférence, lorsqu’il a été attaqué et poignardé à plusieurs reprises. Il a été immédiatement hospitalisé et placé sous assistance respiratoire. “Les nouvelles ne sont pas bonnes”, a fait savoir son agent.

Sous le coup d’une fatwa depuis plus de trente ans pour avoir écrit Les Versets sataniques, “Salman avait conscience qu’un tel événement pouvait avoir lieu”, poursuit Roberto Saviano dans le Corriere della Sera. Après que l’ayatollah Khomeini, l’accusant de blasphème, avait appelé à son meurtre en 1989, “Il avait littéralement disparu. Il s’était reclus dans une bulle de protection totale, changeait constamment d’adresse et vivait entouré de policiers et de véhicules blindés. Mais après quelques années, il avait décidé de retrouver une vie libre.” Et c’est ce qu’il a fait, salue l’écrivain et journaliste italien, qui vit lui-même sous stricte protection policière depuis la publication de son enquête sur la mafia napolitaine, Gomorra :

“Salman a aimé, il s’est marié plus d’une fois, et s’est rendu dans tous les festivals littéraires possibles. Il a choisi de ne pas laisser ses ennemis le contraindre à vivre caché, surveillé, sursécurisé.”

Le triomphe de Rushdie

Outre le courage de recouvrer une vie plus libre, Saviano salue aussi le choix de l’écrivain américano-britannique de ne pas se sentir assigné à une même thématique, à ne pas “écrire uniquement ce que l’on attendait de sa part”, mais à produire des récits divers, par leurs époques, leurs décors et leurs thématiques.

“Quand j’ai appris qu’il avait été poignardé, je n’ai pas pensé, comme beaucoup d’autres, que Salman avait eu tort de vivre sans escorte policière, et que s’il avait été protégé, l’agression n’aurait pas eu lieu”, conclut Saviano.

“J’ai pensé, au contraire, à son courage de vivre pleinement : au fond, la blessure de cette lame ne pèse que quelques instants au regard des années de vie qu’il est parvenu à soustraire à la menace du fanatisme et à la condamnation des bigots. Salman a déjà gagné, son amour fanatique de la vie a fait reculer le fanatisme mortifère qui voulait le contraindre à vivre reclus, prudent, et discrètement égal à soi-même. Quoi qu’il advienne, son triomphe est là.”

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