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Le coronavirus bouleverse la campagne électorale aux Etats-Unis

LE CORONAVIRUS BOULEVERSE LA CAMPAGNE ÉLECTORALE AUX ETATS-UNIS

par John Whitesides et Jarrett Renshaw

WASHINGTON (Reuters) - La pandémie de coronavirus a profondément bouleversé les primaires démocrates, de nombreux Etats optant pour des votes par correspondance afin d'éviter le risque sanitaire. Elle fait même planer une ombre sur le déroulement de l'élection présidentielle le 3 novembre prochain.

La course à l'investiture du Parti démocrate se résume depuis plusieurs semaines à un duel entre Joe Biden et Bernie Sanders. Mais l'ex-vice-président de Barack Obama comme le sénateur du Vermont ont mis leur campagne entre parenthèses tandis que les bilans de l'épidémie s'amplifiaient aux Etats-Unis.

Trois Etats qui devaient à l'origine organiser leurs primaires ce samedi - Hawaï, l'Alaska et le Wyoming - ont annulé le scrutin et ont opté pour un vote par correspondance, avec un délai supplémentaire pour permettre à chacun de faire connaître son choix.

A Hawaï, les inscrits ont jusqu'au 22 mai pour renvoyer leur bulletin de vote. En Alaska, la date limite pour la réception des votes postaux est fixée au 10 avril. Le Wyoming demande que les bulletins parviennent à destination d'ici au 17 avril.

L'Etat du Wisconsin, en dépit d'une avalanche de recours judiciaires pour obtenir un report, a en revanche maintenu sa primaire programmée mardi 7 avril avec ouverture de bureaux de vote. Les électeurs ont cependant été incités à recourir au vote par correspondance mais tous ne pourront pas recevoir à temps les formulaires.

L'Ohio, qui sera l'un des Etats cruciaux le 3 novembre prochain, devait tenir sa primaire le 17 mars. Elle a été repoussée au 28 avril et la quasi-totalité des inscrits pourront voter par courrier, avec date limite le 27 avril, le cachet de la poste faisant foi.

La suite dépendra sans doute de l'évolution de l'épidémie.

Le candidat démocrate doit être formellement investi lors de la Convention nationale fixée du 13 au 16 juillet à Milwaukee, dans le Wisconsin, un Etat qui a fait cruellement défaut aux démocrates en novembre 2016. Donald Trump y avait devancé de justesse Hillary Clinton. Aucun candidat républicain ne s'y était imposé depuis 1984.

Les républicains se mettront pour leur part en ordre de marche derrière Donald Trump à Charlotte, en Caroline du Nord, où leur convention est programmée entre les 24 et 27 août.

Le président sortant a déclaré la semaine dernière qu'il n'était pas question d'annuler la convention de Charlotte. "Nous n'allons pas l'annuler", a-t-il dit sur la chaîne Fox. "Nous serons dans une situation géniale bien avant cette date".

"IL NE SUFFIT PAS D'APPUYER SUR UN BOUTON

POUR PASSER AU VOTE POSTAL"

Pour autant, l'apparition du SARS-CoV-2 dans la campagne est un bouleversement de nature à changer profondément le déroulement même du vote de novembre.

Favoriser un vote par correspondance est une des questions du moment dans le débat autour du scrutin du 3 novembre. Mais cette option aurait un coût peut-être dissuasif pour certains Etats, d'autant que les démocrates n'ont réussi qu'à faire intégrer 400 millions de dollars d'aide à l'organisation des élections dans le vaste plan de soutien économique voté la semaine dernière par le Congrès. Ils en voulaient au moins cinq fois plus.

"Cette insuffisance pourrait provoquer des ravages en novembre", redoute Michael Waldman, président du Brennan Center for Justice à la faculté de droit de l'université de New York.

D'après les calculs du Brennan Center, permettre à chaque électeur de voter par correspondance coûterait 1,4 milliard de dollars, dont 600 millions de frais postaux.

Passer au vote par correspondance impliquerait aussi un changement de culture des électeurs: en 2016, quelque 60% des votants s'étaient déplacés dans les bureaux de vote.

"Il ne suffit pas d'appuyer sur un bouton pour passer au vote postal", souligne Benjamin Hovland, président de la Commission d'assistance aux élections.

Dans un camp comme dans l'autre, on redoute aussi les effets d'un vote par correspondance.

Les démocrates craignent une faible participation des minorités et des électeurs à faible revenu; les républicains s'inquiètent de fraude et ont peur que les électeurs les plus âgés ou vivant dans des zones rurales manquent à l'appel.

(version française Henri-Pierre André)