En Corée du Sud, le président Yoon Suk Yeol impose la loi martiale en pleine crise politique avec l’opposition
INTERNATIONAL - « Je déclare la loi martiale d’urgence ». C’est par ces mots prononcés en direct lors d’une allocution télévisée surprise que le président sud-coréen Yoon Suk Yeol a attiré l’attention du monde entier en l’espace d’une seule phrase.
Estimant cette mesure nécessaire pour protéger le pays des « forces communistes nord-coréennes » et pour « éliminer les éléments hostiles à l’État », le chef d’État sud-coréen a fait cette déclaration dans un contexte de débat parlementaire éruptif sur le budget, avec l’opposition. Une cohabitation houleuse, puisque le Parti du Pouvoir au Peuple de Yoon Suk Yeol n’est pas majoritaire à l’Assemblée, contrairement au principal parti d’opposition, le Parti Démocrate.
Pour expliquer cette mesure radicale − dont les effets sur la démocratie dans le pays sont encore flous− le président a clairement pointé du doigt la principale force d’opposition, qui avait approuvé la semaine dernière un programme budgétaire considérablement réduit.
« Sans se soucier des moyens de subsistance du peuple, le parti d’opposition a paralysé le gouvernement, à des fins de destitutions, d’enquêtes spéciales et pour protéger son leader de poursuites judiciaires », a-t-il lancé en direct. « Notre Assemblée nationale est devenue un refuge de criminels, un repaire de dictature législative qui cherche à paralyser les systèmes administratif et judiciaire et à renverser notre ordre démocratique libéral. »
BIG BREAKING:
South Korean President Yoon Suk Yeol declares Martial Law citing he is doing so to remove "Pro - North Korean Elements".
What's your take on this? pic.twitter.com/ZvcO2Z1PHn— Beats in Brief (@beatsinbrief) December 3, 2024
Décret bloqué et retrait des militaires
Comme le précise The Guardian, en s’appuyant sur la déclaration complète du président sud-coréen, il a clairement accusé l’opposition de contrôler le parlement, de sympathiser avec la Corée du Nord et de paralyser le gouvernement avec des activités jugées antiétatiques pour pouvoir déclencher la loi martiale.
Un discours inquiétant, qui s’est d’ailleurs poursuivi lorsqu’il a qualifié l’opposition, qui détient une majorité au parlement, de « forces hostiles à l’État ayant l’intention de renverser le régime ». Il a aussi assuré que sa décision était « inévitable » et qu’il « rétablirait la normalité dans le pays en (se) débarrassant de ces forces hostiles dès que possible ».
Selon l’agence sud-coréenne Yonhap, l’instauration de la loi martiale a déjà provoqué l’interdiction de toutes les activités politiques dans le pays et la mise sous scellés du parlement. Par ailleurs, Reuters rapporte que « les grèves, les arrêts de travail et les rassemblements qui incitent au chaos social » sont également interdits. Le décret interdit aussi de « tenter une subversion » et proscrit la diffusion de « fausses nouvelles » et la « manipulation de l’opinion publique ».
🔴 Riot police have blocked South Korean MPs from entering the country’s parliament building in Seoul after President Yoon Suk Yeol declared martial law pic.twitter.com/L7WaQfinuh
— The Telegraph (@Telegraph) December 3, 2024
Depuis cette annonce, de premières activités militaires ont été repérées dans la capitale Séoul, où des hélicoptères ont atterri sur le toit du parlement. Et alors que les forces spéciales tentaient d’entrer dans le bâtiment, une partie des parlementaires ont voté à 190 (sur 300) voix pour « invalider » le décret instaurant la loi martiale, comme le rapporte CNN. L’annonce de ce vote a d’ailleurs provoqué le retrait quasi-immédiat des militaires qui tentaient d’entrer dans l’enceinte du parlement.
BREAKING: Television footage shows South Korean troops entering the main parliament hall.
It comes after the South Korean president declared martial law across the country in a surprise television addresshttps://t.co/wi1Urs69EY
📺 Sky 501, Virgin 602, Freeview 233, YouTube pic.twitter.com/gl6lD8gElm— Sky News (@SkyNews) December 3, 2024
A Woman fights off a soldier in front of the parliament building in South Korea. pic.twitter.com/0hgI8KrcGA
— Pop Base (@PopBase) December 3, 2024
Rassemblement devant le parlement
Plus qu’inquiétante, cette situation a provoqué de premières réactions internationales, à commencer par celle des États-Unis. Washington a sobrement indiqué « suivre la situation de près » et être « en contact avec le gouvernement de la République de Corée », comme le précise un communiqué du porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche. De son côté, la Chine a invité ses concitoyens « à la prudence ».
Quant au chef de l’opposition sud-coréenne, Lee Jae-myung, il a immédiatement jugé cette mesure « illégale », appelant la population et les élus de son camp à se rassembler devant le parlement en signe de protestation : « Venez à l’Assemblée nationale maintenant. Je m’y rends également ». Figure progressiste, à l’inverse du président conservateur Yoon Suk Yeol, Lee Jae-myung avait perdu de justesse la dernière élection présidentielle en 2022.
Selon la télévision sud-coréenne, des centaines de manifestants ont d’ores et déjà répondu à son appel et commencent à affluer vers le parlement. Où la situation est particulièrement chaotique au beau milieu de la nuit. Certains manifestants se sont opposés à l’entrée des militaires dans les lieux, certains employés de l’Assemblée nationale ont également dressé des barricades pour empecher les militaires d’entrer dans les lieux. Tandis que de nombreux autres ont scandé des slogans tels que : « Il faut mettre fin à la loi martiale », « protégez la démocratie » ou encore « Destituez le président Yoon ».
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