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Arménie et Azerbaïdjan excluent tout dialogue sur fond d'escalade militaire

LE CONFLIT OPPOSANT ARMÉNIE ET AZERBAÏDJAN SE PROPAGE HORS DU HAUT-KARABAKH

par Nailia Bagirova et Nvard Hovhannisyan

EREVAN/BAKOU/MOSCOU (Reuters) - L'Arménie et l'Azerbaïdjan se sont mutuellement accusés mardi d'avoir ouvert le feu sur des positions éloignées du Haut-Karabakh, où les combats se sont poursuivis pour la troisième journée consécutive, et ont exclu à ce stade des pourparlers de paix malgré les pressions internationales.

Erevan a accusé la Turquie d'avoir abattu un avion de combat de l'armée de l'air arménienne, dont le pilote est décédé, ce que l'Azerbaïdjan et la Turquie ont immédiatement démenti.

Un tel incident pourrait entraîner une surenchère militaire dans le conflit entre Erevan et Bakou au sujet du Haut-Karabakh, qui a repris dimanche. Ankara soutient traditionnellement l'Azerbaïdjan, tandis que l'Arménie a conclu des accords de défense avec la Russie.

Selon une porte-parole du ministère arménien de la Défense, le SU-25 effectuait une mission militaire au-dessus du territoire arménien quand il a été détruit par un F-16 de l'aviation turque.

"L'Arménie devrait se retirer des territoires qu'elle occupe plutôt que de recourir à de pauvres artifices de propagande", a réagi Fahrettin Altun, directeur des communications de la présidence turque. Le ministère azerbaïdjanais de la Défense a également démenti l'information.

Depuis dimanche, les affrontements ont fait plusieurs dizaines de morts dans l'enclave du Haut-Karabakh, région séparatiste d'Azerbaïdjan peuplée à majorité d'Arméniens, et le conflit a essaimé aux frontières qui séparent les deux pays.

Le président azerbaïdjanais Ilham Aliev a exclu mardi toute négociation avec l'Arménie et a assuré que la Turquie n'était pas impliquée dans le conflit.

S'exprimant dans le même temps, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a exclu des discussions avec Bakou tant que dureraient les opérations militaires au Haut-Karabakh.

LA FRANCE PROPOSE SA MÉDIATION

Selon les autorités arméniennes, un tir d'artillerie ennemie et une attaque de drone ont coûté la vie à un civil à Vardenis, une localité située à une vingtaine de kilomètre de la frontière.

Le ministère azerbaïdjanais de la Défense a quant à lui affirmé que l'armée arménienne avait bombardé la région du Dacheskan depuis Vardenis, une déclaration réfutée par Erevan.

Le parquet d'Azerbaïdjan a annoncé mardi soir que douze civils azerbaïdjanais avaient été tués par les tirs arméniens, sans préciser depuis quelle date, et que 35 autres avaient été blessés.

Ces affrontements sont les plus graves depuis le cessez-le-feu de 1994 entre les deux anciennes républiques soviétiques, qui s'opposent depuis des décennies au sujet du Haut-Karabakh.

Ils font craindre un embrasement de cette région du Caucase traversée par des oléoducs essentiels à l'approvisionnement des marchés mondiaux du pétrole et du gaz.

En visite à Athènes, le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a exhorté les deux camps à mettre fin aux combats et à travailler avec le groupe de Minsk, une entité créée au début des années 1990 sous l'égide de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) afin d'encourager une résolution politique du conflit.

Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a quant à lui déclaré que la Russie, également membre du groupe de Minsk, souhaitait également que cessent les affrontements.

Le Kremlin a fait savoir que Vladimir Poutine s'était entretenu avec le Premier ministre arménien et qu'il appelait les belligérants à prendre des mesures pour faire baisser la tension.

L'Elysée a déclaré que la France, qui copréside le groupe de Minsk, entendait mettre en place dans les jours qui viennent une coordination internationale sur le Haut-Karabakh pour établir les responsabilités et trouver une voie de sortie.

(Nailia Bagirova, Nvard Hovhannisyan et Maxim Rodionov; avec Elizabeth Pineau à Paris, version française Claude Chendjou, Nicolas Delame et Jean-Philippe Lefief, édité par Jean-Stéphane Brosse)