Avec la conférence de soutien au Liban, Macron tente aussi d’avancer sur la crise politique qui perdure

Depuis l’explosion du port de Beyrouth et la crise politique, la France multiplie les preuves d’engagement envers le Liban. Sans grand succès pour l’instant.

France's President Emmanuel Macron (R) welcomes Lebanon's Prime Minister Najib Mikati prior to their meeting at The Elysee Presidential Palace in Paris on October 23, 2024. (Photo by Ludovic MARIN / AFP)

POLITIQUE - « Le Liban a besoin de la France et la France ne lui fera pas défaut. » Avant la conférence internationale sur le Liban qui s’ouvre ce jeudi 24 octobre à Paris, le ministre français des Affaires Étrangères Jean-Noël Barrot insiste sur le lien entre les deux pays. Paris assume de vouloir jouer un rôle dans la désescalade régionale face aux frappes israéliennes mais aussi dans la résolution de la crise politique qui mine le Liban depuis plusieurs années.

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À l’initiative du président de la République, Paris accueille les représentants de 70 pays, parmi lesquels le Premier ministre libanais Najib Mikati pour une « conférence internationale de soutien à la population et à la souveraineté du Liban ». L’évènement sera ouvert par Emmanuel Macron dès 10h avant des interventions du Premier ministre libanais Najib Mikati et du secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres, suivies d’une plénière. La priorité est de répondre à l’appel de fonds de l’ONU pour une aide de plus de 400 millions de dollars en faveur des quelque 800 000 personnes déplacées, a indiqué l’Élysée. Mais pas que.

Il s’agit aussi d’« appuyer la souveraineté du Liban pour aider à la stabilité du pays » qui se trouve dans « un vide institutionnel et présidentiel » depuis fin 2022 et la fin du mandat du président Michel Aoun, sur fond de corruption de la classe politique et d’une crise économique sans précédent. Un objectif que la France s’est fixé depuis 2020, sans réel succès à ce stade.

De l’implication française à la « responsabilité » des dirigeants libanais

Ancienne puissance mandataire, la France, qui compte quelque 23 000 ressortissants au Liban, s’est particulièrement impliquée localement depuis l’explosion du port de Beyrouth en août 2020. Emmanuel Macron s’y est rendu à deux reprises dans les semaines qui ont suivi le drame et trois conférences de soutien, similaires à celle qui se tient ce jeudi, ont été organisées par Paris en août 2020, décembre 2020 et août 2021, rappelle la présidence. La dernière a permis de lever quelque 300 millions d’euros destinés à aider la population.

Investissement supplémentaire, Emmanuel Macron a fait en juin 2023 de Jean-Yves Le Drian son représentant personnel au Liban. L’objectif affiché était clair : favoriser le dialogue entre les différents acteurs politiques libanais pour aboutir à l’élection d’un nouveau président. Mais depuis, la situation n’avance pas. La faute à l’absence de majorité parmi les parlementaires chargés d’élire un nouveau chef d’État - ou de présence suffisante de ces mêmes parlementaires lors des séances à Beyrouth.

Contacté par Le HuffPost, l’entourage de Jean-Yves Le Drian défend son action, évoquant ses six déplacements sur place et son implication pour la relance du « Quinquette », un cercle de discussions entre les cinq pays qui œuvrent pour résoudre la crise présidentielle libanaise (France, États-Unis, Qatar, Arabie saoudite, Égypte). La diplomatie, cela prend du temps et ce n’est pas parce que les avancées ne sont pas immédiatement visibles qu’elles n’existent pas, nous glisse-t-on en substance.

L’Élysée balaie de son côté tout désamour des Libanais pour la France face à l’absence d’avancées concrètes : « Notre engagement a été absolument constant face aux différentes crises qui ont frappé le Liban. Les Libanais reconnaissent que la France reste à leurs côtés et apprécient cet engagement à la fois personnel et national. » Mais le Palais n’hésite plus pointer la « responsabilité » des acteurs libanais. « La question du blocage politique au Liban est du ressort des Libanais », répète-t-on.

« Avancer parallèlement » sur le cessez-le-feu et la crise politique

La conférence de soutien - qui dans son intitulé comporte d’ailleurs une mention à la « souveraineté » libanaise - doit aussi permettre « de préparer l’avenir (...) en facilitant le dialogue indispensable pour sortir de la crise politique » a insisté Emmanuel Macron le 17 octobre, en marge d’une conférence de presse à l’issue d’un sommet européen à Bruxelles.

L’Élysée dit vouloir « avancer parallèlement » sur le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah et sur la crise politique, sur la même ligne que Jean-Yves Le Drian qui alertait sur le risque de « danger de mort » pour le pays en cas d’échec sur les deux tableaux. « Il importe qu’aujourd’hui, tous les efforts soient faits pour qu’on puisse retrouver d’abord une collectivité libanaise qui s’assume pleinement, politiquement, qui se dote des institutions, ce qui n’est pas encore le cas », insistait l’émissaire du président sur BFMTV le 16 octobre. L’Élysée continue à miser sur le diplomate aguerri « en contact étroit avec l’ensemble des responsables libanais ».

De son côté depuis le 7 octobre 2023, Emmanuel Macron s’est entretenu à dix reprises avec des représentants des forces politiques libanaises : le Premier ministre Najib Mikati, le commandant en chef des Forces Armées libanaises, l’ancien président du parti socialiste progressiste ainsi que le président de la Chambre des députés. L’organisation de la conférence a rendu possible un entretien, en face-à-face cette fois, entre le chef de l’État français et le Premier ministre libanais mercredi 23 octobre.

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