Appui international à un accord en Libye, un oeil sur l'EI

par Steve Scherer et Lesley Wroughton ROME (Reuters) - Plusieurs puissances mondiales et régionales réunies dimanche à Rome ont apporté leur soutien à la formation d'un gouvernement d'unité en Libye, promettant une aide économique et surtout une assistance dans le domaine de la sécurité pour faire face à la progression des djihadistes de l'Etat islamique (EI). Cette conférence internationale réunissait 17 pays, dont l'Allemagne, la Chine, l'Egypte, la Russie et la Turquie, sous la présidence des Etats-Unis et de l'Italie en vue de faciliter la formation d'un gouvernement d'union en Libye, pour mettre fin au chaos dans ce pays plus de quatre ans après la chute de Mouammar Kadhafi. Le communiqué adopté à l'issue des discussions appelle à un cessez-le-feu immédiat sur tout le territoire libyen et précise que la communauté internationale s'engage à assister les futures autorités du pays. "Nous sommes prêts à soutenir la mise en oeuvre d'un accord politique et soulignons notre ferme engagement à apporter au gouvernement d'accord national un soutien politique et une assistance technique, économique, sécuritaire et antiterroriste pleine et entière", peut-on lire dans la déclaration de Rome. Le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, le chef de la diplomatie italienne, Paolo Gentiloni, et l'émissaire spécial de l'Onu pour la Libye, l'Allemand Martin Kobler, se sont dits optimistes quant à la perspective de signature d'un accord d'unité nationale le 16 décembre par les deux gouvernements rivaux qui se disputent la légitimité du pouvoir. La plupart des délégués des deux gouvernements libyens "sont prêts à signer un accord et refusent d'en être empêchés par une ou deux personnes ou par des considérations politiques isolées", a dit John Kerry à la presse. De son côté, Paolo Gentiloni a souligné que "le message envoyé aujourd'hui est clair : ce qui importe, c'est la stabilisation de la Libye parce que cela peut aussi contribuer à la lutte contre le terrorisme". Les pays occidentaux s'inquiètent de l'implantation des djihadistes de l'Etat islamique dans la région de Syrte, l'ancien fief du "guide" libyen. Le Premier ministre français, Manuel Valls, a ainsi déclaré vendredi que la France devrait combattre l'EI "demain sans doute en Libye" et non plus seulement en Irak et en Syrie. "LA FIN DES NÉGOCIATIONS VA RENFORCER LES 'DURS'" L'Onu tente depuis un an de trouver une solution politique à la crise en Libye. L'accord prévoit que le futur gouvernement d'union puisse demander une aide militaire internationale pour combattre l'Etat islamique. L'organisation djihadiste ne cesse d'accentuer sa présence dans le pays, où elle compterait quelque 3.000 combattants. "Les Libyens veulent riposter et ils veulent une aide internationale pour la faire", a indiqué un diplomate américain, ajoutant que les Occidentaux pourraient entraîner et équiper les forces libyennes. La Chambre des représentants, le Parlement libyen légitime, et le Congrès général national (CGN), assemblée concurrente qui siège à Tripoli, ont conclu le week-end dernier un accord de principe en vue du règlement du conflit. Cet accord prévoit la formation d'un comité de dix membres, cinq de chaque parlement, qui devra désigner un Premier ministre intérimaire et ses deux adjoints. Des élections législatives seront organisées dans les deux ans. Les miliciens islamistes de l'Aube libyenne ont formé un "gouvernement de salut national" après s'être emparés de Tripoli en août 2014, ce qui a contraint l'exécutif et la Chambre des représentants reconnus internationalement à s'exiler dans l'est du pays. Ils ont en outre reformé à Tripoli l'ancienne législature, le CGN. La proposition faite par l'Onu prévoit la mise en place d'un Conseil présidentiel composé de six membres, qui devra représenter les centres de pouvoir régionaux traditionnels du pays, ainsi que d'une Chambre des représentants et d'une seconde chambre, consultative, le Conseil d'Etat. Ce Conseil présidentiel pourrait former un gouvernement dans les trente jours suivant la signature de l'accord. Mais les structures tribales de la Libye et la fragmentation des forces politiques font peser une lourde menace sur les chances de voir un accord appliqué. "La fin des négociations va renforcer les 'durs'", a estimé le groupe de réflexion International Crisis Group (ICG) avant la conférence de Rome. (Guy Kerivel et Henri-Pierre André pour le service français)