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TOUT COMPRENDRE - Tensions en Méditerranée: pourquoi le ton monte entre la France et la Turquie

Recep Tayyip Erdogan et Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse à l'Elysée en janvier 2018. - Ludovic Marin - Pool - AFP
Recep Tayyip Erdogan et Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse à l'Elysée en janvier 2018. - Ludovic Marin - Pool - AFP

Le ton monte entre la Turquie et la France. Depuis une semaine, un conflit opposant la Turquie et la Grèce dans une zone riche en hydrocarbures de la Méditerranée orientale a ravivé les tensions avec Paris.

Alors qu'Athènes accuse Ankara de mener des recherches illégales dans ses eaux, la France dénonce les actions "unilatérales" de la Turquie et a déployé temporairement deux chasseurs Rafale et deux bâtiments de guerre pour faire "respecter le droit international". De son côté, la Turquie accuse ce vendredi la France de se comporter "comme un caïd".

• Que se passe-t-il en Méditerranée?

Mardi dernier, le 11 août, le déploiement par la Turquie d'un navire de recherche sismique a mis le feu aux poudres. Escorté par des frégates militaires, le bâtiment a pour mission d'effectuer des recherches de gisements d'hydrocarbures, dans une zone revendiquée par Athènes, au large de l'île Karpathos.

La Grèce, qui a rapidement condamné cette "violation", a déployé des unités de la marine et de l'armée de l'air dans la zone, pour "surveiller" les activités turques. Le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a par ailleurs prévenu "qu'aucune provocation ne resterait sans réponse". Dans la foulée, son pays a appelé l'Union européenne à organiser une réunion d'urgence.

• Pourquoi la tension est-montée d'un cran entre la Turquie et la Grèce ?

Les tensions actuelles sont en grande partie dues à un différend entre Athènes et Ankara concernant les délimitations de leurs frontières maritimes, à l'origine de nombreuses disputes ces dernières années entre ces deux membres de l'Otan.

La Turquie n'a jamais signé la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, qui définit les limites des eaux territoriales. La découverte ces dernières années de vastes gisements gaziers en Méditerranée orientale a aiguisé l'appétit de la Turquie qui a envoyé des bateaux de prospection à la recherche d'hydrocarbures dans les eaux chypriotes, là où se trouvent les puits de gaz.

Depuis 1974, l'armée turque occupe la partie nord de l'île et estime "que puisqu'il y a un Etat turc à Chypre, elle n'a pas besoin de négocier pour explorer ses eaux territoriales", explique à Franceinfo Joëlle Dalègre, spécialiste de la Grèce contemporaine et de ses relations avec la Turquie.

Athènes accuse ainsi Ankara de violer son territoire en effectuant des recherches énergétiques au sud de la petite île grecque de Kastellorizo, située à quelques kilomètres de la côté turque.

"Revendiquer une souveraineté maritime en se servant de l'île de Meis, située à deux kilomètres des côtes turques et 580 kilomètres de la Grèce métropolitaine, ne peut s'expliquer rationnellement", estime le président turc.

• Que vient faire la France dans cette affaire?

Paris a rapidement condamné les actions turques en Méditerranée. Mercredi, deux jours après l'envoi du navire, Emmanuel Macron a annoncé un renforcement de la présence militaire française dans la zone concernée, en signe de soutien avec la Grèce. Deux chasseurs Rafale et deux navires de guerre ont été déployés "temporairement" pour marquer "sa volonté de faire respecter le droit international".

Emmanuel Macron a par ailleurs déploré "les tensions provoquées par les décisions unilatérales de la Turquie en matière d'exploration pétrolière" et a accusé Ankara de "violer" la souveraineté de la Grèce et celle de Chypre.

La Turquie a affirmé ce vendredi qu'elle ne souhaitait pas une escalade des tensions avec la Grèce en Méditerranée orientale, tout en condamnant l'intervention française.

"La France, en particulier, devrait cesser de prendre des mesures qui accentuent les tensions. Ils n'obtiendront rien en se comportant comme des caïds", a déclaré vendredi le chef de la diplomatie turque Mevlüt Cavusoglu.

• Que dit la communauté internationale ?

Pour les Etats-Unis, la France et la Turquie sont "toutes deux des alliés extrêmement importants au sein de l'Otan et nous voudrions voir les tensions diminuer", a réagi plus tôt, jeudi, un porte-parole du ministère américain de la Défense, Jonathan Hoffman.

Le président français a assuré ce vendredi sur Twitter que ses vues sur la situation en Méditerranée orientale, en Libye et au Liban étaient "convergentes" avec celles de Donald Trump et du prince héritier d'Abou Dhabi Mohammed ben Zayed, après s'être entretenu avec eux.

De son côté, l'Union européenne devait réunir ces dernières heures les ministres des Affaires étrangères de ses pays membres pour afficher sa solidarité avec la Grèce, en plus de discuter de la situation au Bélarus. Avant cette réunion, l'Allemagne a appelé à "tout entreprendre pour éviter une nouvelle escalade" entre Ankara et Athènes.

Article original publié sur BFMTV.com