TOUT COMPRENDRE - Qu'est-ce que la technique d'interpellation "de l'étranglement" abandonnée par la police?

La "prise par le cou, dite de l'étranglement" va être bannie des techniques d'interpellation des forces de l'ordre, a annoncé ce lundi le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner.

"Elle ne sera plus enseignée dans les écoles de police et de gendarmerie", a-t-il ajouté.

Mais qu'est-ce que cette méthode qui, selon les propres mots du ministre "comportait des dangers"? BFMTV.com fait le point sur cette technique, mise en cause dans la mort de Cédric Chouviat, un conducteur de scooter, à Paris en janvier dernier.

  • Qu'est-ce que cette technique d'étranglement?

La technique dite de l'étranglement est l'un des outils dont disposent policiers et gendarmes au cours d'une interpellation pour immobiliser un individu.

"L'agent se place derrière la personne alors qu'elle est debout puis encercle son cou afin de l'amener au sol", explique à BFMTV.com Laurent-Franck Liénard, avocat spécialiste dans la défense des forces de l'ordre.

Cette technique est à différencier du plaquage ventral, ou "décubitus ventral". Durant la conférence de presse, Christophe Castaner a été à plusieurs reprises interrogés sur cette autre méthode, régulièrement remise en cause car entravant "fortement les  mouvements respiratoires et pouvant provoquer une asphyxie positionnelle", selon l'ONG Acat. Il ne s'agit toutefois pas de la même action puisque celle-ci est effectuée quand la personne est déjà au sol.

"Cette dernière peut causer des lésions si l'agent replie également les jambes au niveau des fesses", précise à BFMTV.com Laurent-Franck Liénard.

  • Dans quelle affaire cette technique a-t-elle été pointée du doigt?

Récemment, la "prise par le cou" a été critiquée dans l'affaire de la mort de Cédric Chouviat, le 3 janvier dernier. Lors d'un contrôle de police à proximité de la tour Eiffel, ce livreur, qui aurait par ailleurs eu une attitude véhémente à l'égard de la patrouille de police, est mis à terre, ventre au sol, le casque de scooter toujours vissé sur la tête, selon des images amateurs. Trois policiers se trouvent sur lui et essaient de le maîtriser.

Des témoins ont raconté à la famille avoir vu les policiers procéder à "une clé d'étranglement" pour l'immobiliser. C'est cette dernière qui serait, selon les avocats de la famille, à l'origine du malaise cardiaque dont a ensuite été victime ce quadragénaire, père de cinq enfants.

  • Qu'en pensent les défenseurs des familles de victimes de violences policières?

"C'est une bonne chose car c'est une technique extrêmement dangereuse", a réagi sur notre plateau Me Arié Alimi, avocat de la famille de Cédric Chouviat. Et de rappeler: "Cédric est mort quasiment sur le coup."

"Mais ça ne répond pas à ce que nous demandons (...). Il y a un problème global qui concerne la relation entre l'Etat et la population", a-t-il estimé.

Quelques minutes avant la conférence de presse, Me Alimi et ses confrères William Bourdon et Vincent Brengarth interpellaient Christophe Castaner afin d'interdire complètement le plaquage ventral.

"Nous regrettons qu'il n'ait pas été mis immédiatement un terme à la technique du plaquage ventral et vous redemandons, par la présente, d'interdire cette technique mortifère", pressaient les défenseurs de la famille de Cédric Chouviat, d'après des informations de Franceinfo.

Une requête à laquelle le ministre de l'Intérieur n'a donc visiblement pas souhaité répondre.

  • Qu'en pensent les syndicats de police?

Dans les rangs des forces de l'ordre, l'annonce a été accueillie avec un scepticisme généralisé.

"C'est surprenant qu'on la supprime alors que c'est la seule méthode qui permette d'interpeller quelqu'un qui se rebelle ou qui porte atteinte à l'intégrité physique des policiers", regrette à notre antenne Yvan Assioma, secrétaire régional Île-de-France du syndicat Alliance Police nationale. "On a pas d'autres moyens, c'est le seul moyen non-létal d'amener quelqu'un au sol."

"Elle est utilisée tout le temps", abonde Maître Liénard. "C'est une décision déconnectée des réalités de terrain. Sans ça, ils vont finir par arrêter les interpellations", présage le pénaliste.


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Article original publié sur BFMTV.com