TOUT COMPRENDRE - La polémique du drapeau européen sous l'Arc de Triomphe

Le drapeau européen flotte sous l'arc de Triomphe, éclairé aux couleurs de l'Europe, samedi 1er janvier 2022 - JULIEN DE ROSA / AFP
Le drapeau européen flotte sous l'arc de Triomphe, éclairé aux couleurs de l'Europe, samedi 1er janvier 2022 - JULIEN DE ROSA / AFP

"La première polémique de 2022", comme l'ont baptisée les réseaux sociaux, a en réalité débuté le 31 décembre. L'installation d'un drapeau européen sous l'Arc de Triomphe a provoqué d'intenses critiques d'une partie de la classe politique, extrême-droite en tête, avant qu'il ne soit retiré par le gouvernement moins de 48 heures après sa mise en place.

BFMTV.com revient sur cette polémique.

• Quel point de départ?

Depuis le 1er janvier 2022, la France a pris la présidence tournante du Conseil de l'Union européenne (la "PFUE"), pour la première fois depuis 2008 et ce, pour une durée de six mois. Pour marquer l'événement, le drapeau étoilé européen a été déployé, dès le 31 décembre, sous l'Arc de Triomphe. Pour la même occasion, plusieurs dizaines de monuments ont été illuminés en bleu, dont la Tour Eiffel, le Panthéon, le Louvre ou encore le Palais de l'Élysée.

L'installation a rapidement fait réagir la classe politique, extrême-droite en tête, qui y a vu une atteinte à la souveraineté française, s'insurgeant contre le remplacement du drapeau français - qui n'est pas accroché en permanence sous l'Arc - contre l'étendard européen.

876450610001_6289479714001

C'est la candidate à la présidentielle du Rassemblement national, Marine Le Pen, qui a réagi la première, en fin d'après-midi vendredi, se disant "outrée que le drapeau français ait été remplacé par celui de l'Union européenne sous l'Arc de Triomphe, au-dessus de la tombe du soldat inconnu". Dénonçant "une provocation" qui "offense ceux qui se sont battus pour la France", elle a demandé à "Emmanuel Macron de rétablir notre drapeau national".

Toujours à l'extrême-droite, mais hors Rassemblement national, Éric Zemmour, également candidat, s'est également fendu d'un message fustigeant l'installation sur Twitter. "L'Arc de Triomphe sous Macron: après le saccage et l'empaquetage, l'outrage", a-t-il écrit, en référence aux gilets jaunes et à l'installation de l'artiste Christo qui avait recouvert le monument il y a quelques mois.

Autre candidat à l'extrême-droite, Nicolas Dupont-Aignan est allé encore plus loin, qualifiant Emmanuel Macron de "profanateur qui piétine nos couleurs nationales": "Jamais je ne lui pardonnerai cela!", a-t-il fulminé.

Plus tard dans la soirée, c'est Valérie Pécresse, candidate des Républicains, qui a réagi: "Présider l"Europe oui, effacer l’identité française non!", demandant "solennellement à Emmanuel Macron de rétablir notre drapeau tricolore à côté de celui de l'Europe sous l'Arc de Triomphe". "Nous le devons à tous nos combattants qui ont versé leur sang pour lui", a-t-elle achevé.

876450610001_6289574497001

• Un dispositif mis en place "quelques jours", pour le gouvernement

Face à la polémique naissante, l'exécutif a pris la parole dans la soirée de vendredi. Clément Beaune, secrétaire d'État chargé des Affaires européennes, a ainsi confié à BFMTV que le "dispositif est en place pour quelques jours, avec les illuminations". Quant au drapeau français, il "sera évidemment réinstallé ensuite, sans le drapeau européen", a assuré le ministre.

Des propos réitérés par Clément Beaune dans une déclaration transmise samedi à l'Agence France-Presse (AFP). "Il est aberrant de voir la droite tout mélanger et courir désespérément après les polémiques stériles de l'extrême-droite", a ajouté le ministre auprès de nos confrères en référence notamment à Valérie Pécresse.

• Marine Le Pen dépose un recours en annulation auprès du Conseil d'État

Non satisfaite par la réponse du gouvernement, la candidate du Rassemblement national a annoncé samedi, en fin d'après-midi par communiqué, le dépôt "dans les prochains jours" d'un recours en annulation et d'une demande de suspension de la décision auprès du Conseil d'État.

"J’ai donc décidé d'attaquer devant le Conseil d’État cette décision présidentielle, qui méconnait manifestement: l’article 2 de la Constitution (en vertu duquel 'l'emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge'); son article 3, relatif à la souveraineté nationale (les électeurs français ayant rejeté en 2005 le projet de Constitution européenne reconnaissant le drapeau de l’Union européenne); et le principe fondamental reconnu par les lois de la République, en vertu duquel l'emblème national doit toujours flotter sur les bâtiments publics", détaille Marine Le Pen.

Une procédure qui n'a pas alarmé l'exécutif, une source gouvernementale confiant dans la foulée à BFMTV que "le drapeau français ne figure pas en permanence sous l'Arc de triomphe, Marine Le Pen devrait le savoir. Donc rien n'a été enlevé". "Le drapeau européen sera retiré dans quelques jours et le drapeau français sera remis selon les règles habituelles, pour les occasions officielles", a rappelé la même source.

• Le drapeau finalement retiré

Alors qu'il a été martelé que l'étendard étoilé allait rester "plusieurs jours" sous le monument de la place de l'Étoile, il a finalement été retiré dans la nuit de samedi à dimanche. Un retrait qui a "été anticipé", comme l'a confié une source proche de l'Élysée à BFMTV ce dimanche matin, ce que l'exécutif a ensuite démenti.

• Le Pen se réjouit de voir Macron "reculer", l'Élysée réfute "toute reculade"

"Le drapeau européen a été enlevé dans la nuit, conformément au timing prévu", a indiqué l'Élysée ce dimanche matin après le retrait du drapeau européen, ajoutant qu'il était prévu que le drapeau de l'UE "reste au vent le 31 décembre et le 1er janvier pour marquer le coup d'envoi symboliquement de la présidence de l'UE, au même titre que l'illumination en bleu de plusieurs monuments" en France.

"Il n'y a eu aucune reculade, aucun changement", a assuré plus tard dans la matinée Clément Beaune, expliquant sur France Inter qu'"il était prévu que le drapeau [européen] soit retiré dans la journée de dimanche". "Je suis fier que ce symbole ait été arboré sous l'Arc de Triomphe", a-t-il ajouté, fustigeant au passage "la droite égarée qui vient s'aplatir devant Marine Le Pen".

De son côté, cette dernière s'est félicitée, saluant "une belle victoire patriotique", estimant que "le gouvernement a été obligé de retirer le drapeau de l'Union européenne de l'Arc de Triomphe". "Merci à la mobilisation massive de tous les amoureux de la France et de la République pour faire reculer Emmanuel Macron", a insisté la candidate du Rassemblement national sur Twitter.

Les dizaines de monuments illuminés en bleu le resteront pour leur part sept jours. "Dans toutes les villes de France, il y aura des illuminations en bleu et étoilées. Ce sera le plus beau symbole que l'on peut opposer à l'extrême droite et à une partie de la droite égarée", s'est réjoui le secrétaire d'État aux Affaires européennes.

Article original publié sur BFMTV.com