TOUT COMPRENDRE - Les élections législatives allemandes, la fin de l'ère Merkel

Le palais du Reichstag en Allemagne qui abrite le Bundestag (Photo d'illustration) - AFP
Le palais du Reichstag en Allemagne qui abrite le Bundestag (Photo d'illustration) - AFP

Après près de 16 ans à gouverner l'Allemagne, la chancelière Angela Merkel s'apprête à quitter ses fonctions à l'issue des élections législatives du 26 septembre qui marqueront la fin de son quatrième mandat. Elue pour un premier mandat le 22 novembre 2005, Angela Merkel - qui se rapproche du record de longévité de son mentor Helmut Kohl - a annoncé il y a déjà trois ans qu’elle ne briguerait pas un nouveau mandat.

Qui sera son successeur? Le scrutin s'annonce aussi indécis que décisif pour l'avenir du pays. Les sociaux-démocrates du SPD font la course en tête dans les sondages, devant l'Union chrétienne-démocrate (CDU) et son allié bavarois CSU, et les Verts.

· Pourquoi Angela Merkel ne brigue-t-elle pas un cinquième mandat?

La chancelière de 67 ans, qui gouverne la première puissance économique européenne depuis 2005, a annoncé de longue date qu'elle ne se représenterait plus. Dès octobre 2018, alors que la CDU vient d'essuyer un revers électoral dans l'Etat régional de Hesse, la dirigeante fait part de sa décision de ne pas solliciter un cinquième mandat en 2021.

Son mandat actuel sera "le dernier", assure-t-elle, précisant ne pas vouloir non plus entamer de carrière dans les institutions européennes, comme certains médias lui en prêtaient l'intention. C'est la première fois depuis 1949 qu'un chef de gouvernement sortant décide de ne pas se représenter.

· Quel est le mode de scrutin?

Les élections législatives allemandes se déroulent selon un système de vote complexe, qui allie scrutin uninominal direct à un tour et principe proportionnel. Chacun des 60,4 millions d'électeurs dispose de deux voix pour élire les députés, dont le nombre a été fixé à 598 au minimum. Le chiffre final devrait toutefois être supérieur et ne sera connu qu'à l'issue du scrutin.

La moitié des sièges (299) sont attribués par un scrutin uninominal direct à l'échelle des circonscriptions. Le candidat arrivé en tête, même s'il n'atteint pas les 50%, est élu. Ce qui favorise traditionnellement les grands partis, les petits n'ayant que très peu de députés élus directement.

Mais les électeurs disposent d'une deuxième voix, qu'ils doivent attribuer à une liste de partis dans chaque Etat régional. C'est là qu'intervient le système proportionnel, mis en place sous l'influence des alliés après la guerre pour éviter un retour du totalitarisme, avec un seuil minimum de 5% des suffrages pour entrer au Bundestag.

L'électeur peut voter deux fois pour le même parti ou différencier son choix. Les Allemands optent souvent pour cette dernière solution car ils sont habitués à être gouvernés par des coalitions, en raison du système proportionnel, et essaient d'influencer leur composition.

· Que disent les sondages?

Les sociaux-démocrates d'Olaf Scholz et les chrétiens-démocrates d'Armin Laschet sont donnés favoris à la succession d'Angela Merkel, au coude à coude dans les sondages.

Le premier est crédité de 25% des intentions de vote tandis que les chrétiens-démocrates le talonnent avec 23%, un score historiquement bas, selon un sondage pour la chaîne publique ZDF publié jeudi soir.

· Sur quelle coalition pourrait déboucher cette élection?

Indécis comme jamais, ce scrutin offre au moins une certitude: c'est une coalition de partis qui dirigera l'Allemagne, baptisée selon les couleurs associées aux formations politiques. Aucun parti ne devrait obtenir, ni même approcher, la majorité absolue, rendant ainsi incontournable la formation d'une coalition à deux partenaires, voire trois, ce qui serait inédit. Chaque formation dispose d'une couleur attitrée.

Feu tricolore: cette coalition entre le SPD (rouge), les Verts et le FDP (jaune) est un des scénarios probables. Le SPD, en tête dans les sondages avec environ 25%, et les Verts, troisièmes (autour de 18%), ne cachent pas leur envie de gouverner ensemble, comme ce fut le cas notamment durant les années Schröder (1998-2005).

Si les sondages sont confirmés dans les urnes, ils devraient cependant avoir besoin d'un troisième partenaire, un costume que pourraient endosser des libéraux écartés du pouvoir depuis 2013 et crédités d'environ 11% des suffrages.

Rouge-rouge-vert: cet attelage reste un scénario envisageable, avec la gauche radicale, créditée d'environ 6%, en partenaire d'appoint des sociaux-démocrates et écologistes.

Jamaïcaine: cette coalition serait formée par les conservateurs, les Verts et les libéraux dans un assortiment de couleurs évoquant le drapeau de la Jamaïque. CDU-CSU et FDP partagent beaucoup de points communs, notamment en matière économique, et cette combinaison pourrait permettre à des conservateurs arrivés en deuxième position de conserver la chancellerie en s'entendant avec les libéraux.

Kényane: cette coalition serait une réédition de la grande coalition actuelle, qui associe chrétiens-démocrates et sociaux-démocrates auxquels s'allieraient les "Grünen" pour former un attelage noir, rouge et vert. Mais le parti d'Angela Merkel ne semble pas privilégier la voie de la participation à une coalition en tant que "partenaire junior", c'est-à-dire sans occuper la chancellerie.

Allemande: dans ce scénario, SPD, CDU et FDP s'allieraient pour gouverner l'Allemagne, une "option" envisageable pour la direction du parti libéral. Mais cette solution est jugée "mauvaise" pour près de deux tiers des Allemands, selon le sondage pour ZDF. Elle écarterait en outre du pouvoir des Verts devenus un des partis les plus populaires, en particulier chez les jeunes.

· Que va-t-il se passer après le 26 septembre?

La chancelière ne quittera pas ses fonctions au soir des élections mais assurera les affaires courantes jusqu'à la désignation de son successeur par les députés du Bundestag, l’assemblée parlementaire allemande. Or cette période de transition peut durer de longues semaines, voire des mois, le temps que le parti arrivé en tête trouve une majorité.

Des tractations vont s'engager avec d'autres formations politiques. La future équipe gouvernementale définit sa feuille de route sous la forme d'un "contrat de coalition". En 2005, la CDU et le SPD avaient mis deux mois pour former un gouvernement de grande coalition.

Mais après le scrutin de septembre 2017, les négociations avaient duré jusqu'en février 2018: la CDU avait tenté dans un premier temps de s'entendre avec les Verts et le Parti libéral FDP mais ce dernier avait finalement décidé de se retirer des discussions, forçant la CDU à s'allier avec le SPD.

Article original publié sur BFMTV.com