Covid-19 : comment le Portugal est devenu le pays le plus touché au monde ?

Au Portugal, les hôpitaux et les pompes funèbres sont au bord de la rupture.

Longtemps plébiscité pour sa bonne gestion de la pandémie, le Portugal se retrouve aujourd’hui dans une situation critique et atteint des chiffres encore jamais vus depuis le début de la pandémie. Explications

Lorsque la pandémie de Covid-19 est arrivée en Europe au printemps dernier, le Portugal était considéré comme un pays exemplaire dans sa gestion de la crise. Alors que l’Espagne était touchée de plein fouet par le virus, le Portugal a rapidement décidé de fermer la frontière terrestre avec son voisin et la population s’est disciplinée seule avant même le début du confinement. Mais près d’un an plus tard, la situation a bien changé. Fin janvier, le pays a atteint un record de plus de 16 000 nouveaux cas en une journée, alors que les 1000 cas n’avaient pas été dépassés lors de la première vague.

Le pays est désormais le plus touché au monde par le virus en nombre de décès et de nouveaux cas par rapport à sa population. “Nous sommes passés du miracle portugais au pays qui espère un miracle”, constate Miguel Guimaraes de l’Association médicale portugaise.

La moitié des décès enregistrés en 2021

Sur les 12 000 décès enregistrés depuis le mois de mars 2020, la moitié l’ont été depuis le 1er janvier 2021 et les pompes funèbres sont au bord de la rupture. Une situation critique qui a obligé le gouvernement portugais à demander de l’aide à médicale à l’international. L’Allemagne a accepté d’envoyer 26 médecins et ambulanciers ainsi que des 50 respirateurs et 150 lits pour les patients atteints du coronavirus. Dimanche, il ne restait plus que 7 lits disponibles dans tout le pays. Certains malades doivent être transférés en Autriche pour recevoir des soins.

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Strictement confiné depuis le 15 janvier, le pays peine à sortir la tête de l’eau. Beaucoup ont jugé cette décision trop tardive et pointent également du doigt l’absence de mesures strictes lors des fêtes de fin d’année. Il faut dire que le gouvernement avait décidé d’alléger les restrictions pour Noël en autorisant les déplacements dans le pays pour permettre les rassemblements familiaux.

Certains ministres et experts scientifiques ont déclaré que cette période de Noël où les restrictions ont été assouplies, couplée à l’arrivée du froid et des nouveaux variants ainsi qu’à l’attitude “trop détendue” des Portugais a plongé le pays dans une crise sans précédent. Pour le Dr Ricardo Mexia, président de l’Association portugaise des médecins de santé publique cité par l’Independent, le début de la campagne de vaccination a fait penser aux gens que “tout était fini” et de ce fait, ils se sont “trop relâchés”.

Un variant ravageur et une mauvaise communication

De son côté, le Premier ministre Antonio Costa insiste sur la responsabilité du variant anglais découvert trop tard. “Si nous avions appris à temps l’existence du variant anglais, nous aurions sûrement pris des mesures différentes pour la période de Noël” se défend-t-il. Le 21 janvier dernier, le Premier ministre socialiste précisait que ce variant représentait déjà 20% des infections dans le pays et que cette proportion pourrait atteindre les 60% dès la semaine suivante. Le chef du gouvernement portugais a également reconnu “des erreurs” de communication avec la population.

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Dernier pays d’Europe occidental a avoir signalé son premier cas de coronavirus, le gouvernement avait imposé un confinement à la mi-mars alors que le pays n’avait encore enregistré aucun décès lié au Covid-19. Pourtant, le secrétaire à la santé du Portugal Antonio Sales ne veut pas se comparer aux autres pays. “Je ne pense pas que nous étions excellents par le passé et que nous sommes horribles maintenant. Comme par le passé, on refuse ce genre de classement entre pays. On ne peut pas être si naïf et penser que la réaction d’un pays sera toujours efficace de bout en bout”, assure-t-il à l’Independant.

Le pays n’a pas retenu la clé de son succès passé

Également contacté par l’Independent, le Dr Filipe Froes, consultant respiratoire faisant partie d’un groupe de travail de santé publique qui conseille le gouvernement, pense quant à lui que le Portugal n’avait pas tiré les enseignements de son succès passé. “Lors de la première vague, nous avons été l’un des premiers pays à confiner et nous avons eu un très petit nombre de cas. Puis nous n’avons pas réalisé la fragilité de notre service de santé et n’avons pas réussi à tirer les leçons de cette pandémie. [...] Nous avons été trop laxistes avant et pendant Noël.”

Confinement général en place au moins jusqu’à mi-février, déplacements non-essentiels à l’étranger interdits, fermeture des écoles et de la frontière avec l’Espagne... le pays a remis en place les mesures qui l’avait préservé de la première vague de l’épidémie au printemps dernier.

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