En Colombie, la “chapelle sixtine de l’Amazonie” victime de la déforestation
Un voyage au parc colombien de Chiribiquete, aussi appelé la “chapelle Sixtine de l’Amazonie” pour ses peintures rupestres vieilles de 20 000 ans, est habituellement une expérience magique. Une expédition hors du commun rendue possible par la signature de l’accord de paix avec les Farc en 2016, qui a ouvert au public de nombreux espaces où rôdait la guérilla.
Mais en ce mois d’août 2024, ce voyage dans le sud du pays sud-américain fut, pour la journaliste María Jimena Duzán, tragique, comme elle l’a raconté dans la revue Cambio :
“Sur le papier, ce parc national […] couvre 43 000 kilomètres carrés. Mais ce que nous avons vu du ciel est une autre réalité. Là où il devrait y avoir une forêt dense, nous avons vu des parcelles de terre récemment défrichées. Certaines d’entre elles étaient même occupées par du bétail.”
Comme une bonne partie de la Colombie, le Chiribiquete est la proie d’un “front de colonisation” constitué par des paysans et des éleveurs de bétail, au service d’hommes d’affaires et de politiciens véreux, qui déboisent la jungle pour s’approprier les terres défrichées. Le tout avec l’accord des dissidents des Farc, qui refusent de se soumettre et qui contrôlent cette partie du territoire, où ils cultivent la feuille de coca.
Peuples indigènes
Un peu plus à l’est, là où devrait se trouver la frontière agricole, d’immenses plantations de palmiers africains “ressemblant à des taches vertes obscures” ainsi que de vastes rizières ont remplacé le bétail. C’est “une industrie impressionnante, qui prétend être durable” mais qui fait en réalité partie du cycle de déboisement sans contrôle de l’Amazonie qui a repris son cours cette année, après une courte pause liée aux négociations de paix infructueuses entre les dissidents des Farc et le gouvernement du président Gustavo Petro.
“Au rythme où vont les choses, il est probable que ce front de colonisation atteindra les tepuys (les montagnes abritant des peintures rupestres) dans dix ans. Si cela se produit, non seulement cela mettra en danger les peuples indigènes en isolement volontaire qui habitent ces forêts, mais cela signifiera aussi la mort du Chiribiquete”, avertit dans Cambio le biologiste Rodrigo Botero, qui a accompagné Duzán lors de l’expédition, tout en signalant l’existence de voies construites pour acheminer le bétail au cœur du parc.
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