En Chine, Emmanuel Macron est accompagné d’Ursula von der Leyen

Emmanuel Macron et la présidente de la Commission européenne (ici en photo à Madrid, le 29 juin 2022) se rendront en Chine pour une visite d’État d’une durée de trois jours.
Emmanuel Macron et la présidente de la Commission européenne (ici en photo à Madrid, le 29 juin 2022) se rendront en Chine pour une visite d’État d’une durée de trois jours.

INTERNATIONAL - Ursula von der Leyen, le « bad cop » d’Emmanuel Macron en Chine ? Ce n’est pas seul que le président de la République arrive à Pékin mercredi 5 avril pour une visite d’État de trois jours durant laquelle il rencontrera son homologue Xi Jinping. Et la présence à ses côtés de la présidente de la Commission européenne est loin d’être anodine.

En conviant cette dernière, Emmanuel Macron démontre encore une fois sa volonté d'inscrire la relation franco-chinoise dans le cadre européen. En 2019, il avait convié Angela Merkel et Jean-Claude Juncker à une rencontre à Paris avec Xi Jinping. Et la même année, c’est accompagné d’un commissaire européen et d’un ministre allemand qu’il s’était rendu à Shanghai. « L’idée, c’est de montrer une posture collective d’unité, là où la Chine privilégie habituellement les relations bilatérales, parce qu’on est plus forts à 27 », souligne le chercheur Marc Julienne, responsable des activités Chine au Centre Asie de l’Institut français des relations internationales (Ifri).

Cette fois-ci, en faisant le choix d’emmener la présidente de la commission européenne à sa propre visite d’État, le locataire de l’Élysée envoie « un signal fort », juge le chercheur. Là où Emmanuel Macron, accompagné d’une soixantaine de grands patrons et industriels, défendra « les intérêts économiques et culturels » de l’Hexagone et de l’UE selon l’Élysée, Ursula von der Leyen affichera, elle, une position inflexible vis-à-vis des droits humains et de l’agression russe en Ukraine.

« Nous devons réduire les risques »

Cette position, la présidente de la Commission européenne l’a déjà défendu jeudi dernier, lors d’un discours offensif à l’égard de Xi Jinping. « L’objectif du Parti Communiste Chinois est un changement de l’ordre international avec la Chine au centre », a-t-elle dit, estimant que le pays avait « tourné la page de l’ère des réformes et de l’ouverture » au profit de celle de « la sécurité et du contrôle ». Au regard de ce changement d’attitude, « nous ne devons pas nous couper de la Chine, mais nous devons réduire les risques », a-t-elle aussi insisté, évoquant des « relations ni noires, ni blanches » avec Pékin.

Quels risques évoque-t-elle ? D’abord, celui d’un soutien assumé, et notamment militaire, de la Chine à la Russie. Car jamais Pékin n’a condamné Moscou pour l’invasion de l’Ukraine et les démentis chinois ne suffisent pas à faire taire les rumeurs de livraisons d’armes. « Nous devons être francs : la manière dont la Chine continuera de réagir face à la guerre de Poutine sera un facteur déterminant de l’avenir des relations entre l’UE et la Chine », a souligné Ursula von der Leyen.

Autre risque, celui d’un « découplage » diplomatique et économique, qui ne serait bénéfique ni pour la Chine, ni pour l’Union européenne, l’un de ses principaux partenaires économiques. Ursula von der Leyen l’a elle-même reconnu, la relation sino-européenne est l’une des « plus complexe et importante » au monde mais elle est devenue « plus distante et plus difficile » au cours des dernières années. Une mise au point s’impose donc, afin de fixer « les conditions d’un engagement sain », selon elle.

Le « good cop » Macron

Entrera ainsi en scène le « good cop » Macron. Comparé à la présidente de la commission européenne, réputée proche de Washington et que certains imaginent prendre la tête de l’Otan, le chef d’État français fait figure d’interlocuteur privilégié avec Xi Jinping. L’Élysée assume : « le président n’ira pas en Chine pour remettre en cause (ses) lignes rouges », mais avant tout pour renforcer l’ambition française et européenne « en matière d’accès aux marchés et de conditions équitables de concurrence ».

Jouer le duo avec Ursula von der Layen est donc le moyen pour Emmanuel Macron de maintenir sa position stratégique sans faire l’impasse sur les sujets qui fâchent mais en les faisant porter par une autre.

Marc Julienne y voit cependant en risque. Celui de l’effacement en cas d’attitude « trop timorée » de la part du président français. « Il emmène quelqu’un qui pourrait ruer dans les brancards et retenir l’attention de la presse internationale. Si tout ce qu’il ramène c’est une tentative d’apaiser sur l’Ukraine et quelques contrats, je ne suis pas sûr qu’en termes d’image ce soit très positif », conclut le chercheur.

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