Les chats sont-ils vraiment un danger pour la biodiversité ?

Photo d'illustration

Le député écologiste François-Michel Lambert voulait que le chat puisse être classé “espèce nuisible” afin de rendre possible les “battues administratives” aux chats pour protéger la biodiversité.

Les chats, ennemis de la biodiversité ? La question est posée après l’amendement proposé, puis jugé irrecevable par l’Assemblée nationale pour un problème de procédure, par le député François-Michel Lambert, coprésident du parti Liberté écologie fraternité.

“Pour lutter contre la disparition” de certaines espèces, “le chat doit faire partie des espèces d’animaux susceptibles d’être classées ‘nuisible’ pour que les préfets puissent (...) ordonner, le cas échéant, des battues administratives”, écrivait-il.

“Mon objectif c’est de sauver la biodiversité, pas de tuer des chats”

Quelques lignes qui ont suscité la colère de plusieurs associations de défense des animaux, dont la fondation Brigitte Bardot ou encore le journaliste Hugo Clement.

Face à la polémique, François-Michel Lambert explique : “Ce sont les chats sauvages qui posent problème, évidemment pas les chats domestiques. Mon objectif, c’est de sauver la biodiversité, pas de tuer un chat. Si on me dit qu’il existe d’autres solutions, cela me va très bien”, nous explique le député écologiste des Bouches-du-Rhône.

Car selon lui, la multiplication des chats sauvages est une menace pour la biodiversité. “Dans ma circonscription, on a des chats sauvages qui sont des super-prédateurs. Si on ne fait rien, le lézard endémique, le rouge-gorge, pourraient disparaître dans les espaces Natura 2000 ou dans les collines de Marcel Pagnol”, explique François-Michel Lambert.

La menace, une surpopulation des chats errants

Il existe peu de données disponibles sur le sujet. On estime la population des chats à environ 20 millions en France, dont au moins 8 millions sont considérés comme errants, selon Benoît Pisanu, chercheur associé au Museum d’Histoire naturelle. “Les vétérinaires notent une augmentation régulière de la population des chats. Mécaniquement, on peut en déduire que le nombre de chats errants augmente également”, estime le chercheur, qui reste prudent en raison du faible nombre de données disponibles.

Une hausse de la population qui peut avoir un impact sur la biodiversité “surtout localement, dans les zones protégées”. Selon lui, la menace essentielle est la surpopulation du nombre de chats errants qui pourrait “créer un déséquilibre dans la biodiversité, et menacer des espèces comme “les petits oiseaux, les petits rongeurs du type musaraigne”.

Les oiseaux de jardin de plus en plus victimes des chats

Une menace “réelle” dans les zones protégées, où la biodiversité est importante, mais dont il est ”difficile d’en mesurer l'importance par rapport à d'autres phénomènes comme l’urbanisation ou le changement climatique”, relativise Benoît Pisanu.

Une des rares données disponibles sur le sujet vient de la Société française pour l’étude et la protection des mammifères, qui estime que la part de la prédation des oiseaux de jardin par le chat a augmenté de 50% en 15 ans.

Si en France, le problème de l’impact des chats sur la biodiversité a du mal à être évoqué, c’est parce qu’on a “un affect avec cet animal. Vous remplacez le chat par le rat, il n’y aurait pas la même émotion à le classer comme nuisible”, ajoute le député François-Michel Lambert.

Un programme d’abattage de chats en Australie

Un problème d’affect avec les chats dont l’Australie ne s’est pas embarrassée. En juillet 2015, le gouvernement australien a déclaré “la guerre” aux chats sauvages, affichant l’objectif de 2 millions de chats tués en cinq ans.

Selon une étude parue dans Biological Conservation en 2017, les chats tueraient 377 millions d’oiseaux et 649 millions de reptiles chaque année en Australie. De quoi sérieusement menacer la biodiversité locale. D’autres résultats plus récent, parus en 2019 dans Nature, évoquent 800 millions de mammifères tués chaque année par les chats errants.

Les associations prônent la stérilisation

Si une telle mesure “pourrait être efficace, il y a d’autres options moins radicales à prendre avant comme des programmes de stérilisation ou de capture”, rappelle le chercheur.

La prévention et la responsabilisation, c’est justement ce que prônent les associations de protection des animaux. “Les propriétaires sont les premiers responsables de la hausse des chats errants. Il faut démultiplier la stérilisation, voire la rendre obligatoire, pour limiter l’accroissement non-controlé de la population”, prône Anne-Laure Dugué, responsable du programme faune en détresse à la LPO. La Ligue de Protection des Oiseaux juge par exemple que les chats sont responsables à 25% de la mortalité des passereaux dans les campagnes.