La chanteuse sud-africaine Tyla, symbole des questionnements sur l’héritage culturel
En 2023, j’ai remarqué qu’une jeune femme, difficile à définir ethniquement, apparaissait fréquemment dans mes suggestions d’écoute sur les plateformes musicales. J’ai découvert qu’elle s’appelait Tyla et qu’elle venait de ma ville natale, Johannesburg, en Afrique du Sud. La même année, elle devenait l’une des exportations culturelles les plus prometteuses d’Afrique du Sud, grâce à un mélange de rythmes amapiano associés à la sensibilité pop d’une star internationale.
Pour moi, Tyla représente quelque chose de bien plus intéressant. Elle a transcendé l’étiquette de “pop star” et est devenue à son insu un symbole du racialisme, pressée de toutes parts de définir clairement son identité ethnique et son rapport à sa couleur de peau. Son succès fulgurant l’a en effet amenée à se rapprocher d’un public noir américain assez large, sans oublier ses fans sud-africains qui nourrissent les divisions en essayant de la protéger. Ce faisant, elle offre une réflexion captivante sur la diaspora, le concept de race et l’héritage culturel.
Une culture métisse à part entière
En tant que Sud-Africaine noire, je considère le métissage comme un élément normal et banal de notre tissu social. J’ai grandi en comprenant, comme la plupart des Sud-Africains, que le métissage, par son double héritage, était une identité et un vécu qui faisaient partie intégrante de notre culture. Mais pour ceux qui ne le savent pas, le terme “métis” [coloured en anglais sud-africain] était une classification raciale utilisée pendant l’apartheid en Afrique du Sud.
Cette catégorie – imposée pour séparer les personnes d’origine mixte des populations noires et blanches – est entrée dans le droit sud-africain en 1950 avec la loi sur l’enregistrement de la population et la loi sur les zones réservées [deux des principales lois constituant le régime d’apartheid et qui limitaient notamment le lieu de résidence des populations noires]. Cependant, comme l’expliquent les auteurs Tessa Dooms et Lynsey Ebony Chutel dans Coloured. How Classification Became Culture [“Gens de couleur. Comment cette classification est devenue une culture à part entière”, inédit en français], l’identité coloured s’est affranchie de ses origines coloniales et de l’apartheid pour devenir, à l’instar de l’identité noire, une identité raciale à part entière, aussi complexe que diverse.
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