Changement d'heure : quand sera-t-il supprimé ?

Alors que le Parlement européen avait adopté en 2019 une directive visant à mettre fin aux changements d'heure, le texte n'est toujours pas entré en application.

Bientôt la fin du changement d'heure ? (Photo : XAMAX/picture alliance via Getty Images)

La distinction entre heure d'été et heure d'hiver va-t-elle enfin disparaître ? A l'occasion du dernier week-end d'octobre 2024, les Français et tous les autres citoyens de l'Union européenne (UE) reculeront leurs horloge d'une heure dans la nuit du samedi 26 au dimanche 27, afin de se conformer au traditionnel changement horaire semestriel.

Chaque année en effet, les Européens passent à l'heure d'été fin mars et à l'heure d'hiver fin octobre. Instaurée au cours du XXe siècle, cette mesure et son efficacité ont toutefois été vivement contestées depuis plus d'une décennie, au point qu'il a été envisagé de supprimer purement et simplement le changement d'heure.

A l'origine, comme le rappelle La Manche Libre, l'objectif du changement d'heure est de "faire des économies en profitant d'une heure de plus d'ensoleillement" pendant la période estivale. Dans le principe, avancer artificiellement l'horloge en été permettrait de décaler l'utilisation de l'éclairage et donc "d'économiser des ressources énergétiques", comme le résume Vie publique.

Le site gouvernemental indique que le changement d'heure a été introduit pour la première fois en France en 1916, en pleine Première Guerre mondiale, afin d'économiser du charbon. Maintenue ensuite pendant une trentaine d'années, puis supprimée à la Libération en 1944, la mesure a finalement été réintroduite en 1975. Cette fois, il s'agissait de réagir aux conséquences du choc pétrolier de 1973, en faisant des économies sur le fioul, principale ressource utilisée dans la production d'électricité à l'époque.

Près d'un demi-siècle plus tard, l'efficacité du changement d'heure pour économiser de l'énergie est toutefois grandement remise en cause. Les études menées sur la fin du XXe et le début du XXIe siècle montrent en effet un déclin croissant des gains d'électricité obtenus grâce au changement d'heure. Selon Capital, ils représentaient 1200 Gwh en 1996 et seulement 440 Gwh en 2009.

"Ces dernières années, ils s'établissent autour de 351 GWh, soit 0,07% de la consommation d’électricité totale", complète l'Agence de la transition écologique (Ademe), citée par le média d'actualité économique. Une étude publiée par le Parlement européen en 2017 corrobore cette perte d'efficacité du changement d'heure en évoquant un "effet marginal en matière d’économie d’énergie". Selon ce rapport, les économies réalisées représenteraient "entre 0,5% et 2,5% selon les pays de l’UE".

Comme l'expliquent ces différentes études, la perte d'efficacité du changement d'heure est directement liée à l'évolution du réseau électrique, qui a permis une meilleure isolation et un meilleur rendement des appareils électriques, notamment d'éclairage. En économisant une heure de fonctionnement de ce réseau plus performant et moins énergivore, on obtient logiquement des gains moins importants.

De plus en plus repris et diffusé ces dernières années, cet argument a justifié l'ouverture d'un débat public sur l'utilité du changement d'heure, à l'échelle de l'UE. En 2018, pas moins de 4,6 millions de citoyens européens ont ainsi participé à une consultation en ligne sur le sujet. 84% d'entre eux se sont dits favorables à la suppression du changement d'heure. L'année suivante, une consultation lancée par l'Assemblée nationale française auprès de plus de 2 millions de citoyens a donné le même résultat : près de 84% d'opinions favorables à la fin des heures saisonnières.

A la suite de la consultation en ligne de l'UE, les législateurs européens ont logiquement planché sur le sujet à partir de septembre 2018. Quelques mois plus tard, en mars 2019, le Parlement européen a approuvé la directive 2018/0332(COD), programmant la "suppression du changement d’heure saisonnier, au printemps et en automne, à compter de 2021". Le texte précisait que les pays de l'UE pourraient choisir de conserver soit l'heure d'hiver, soit l'heure d'été.

Le processus de concrétisation de cette directive n'a toutefois jamais été mené à terme. Comme l'explique Vie publique, elle devait en effet initialement être adoptée par le Conseil européen fin 2020, mais ce calendrier a été complètement chamboulé par la pandémie de Covid-19, au point que selon les autorités françaises, ce texte n'est désormais "plus à l’ordre du jour et ne devrait pas être discuté dans un avenir proche".

D'après Slate, la mise à l'arrêt du projet de directive est la conséquence directe des difficultés rencontrées par les 27 états membres de l'UE pour se mettre d'accord sur les modalités de mise en œuvre du texte. Confrontées à des dossiers autrement plus urgents et brûlants (crise économique, guerre en Ukraine, crise environnementale...), les instances européennes ont finalement décidé d'évacuer le sujet.

Pour faire en sorte de ne léser aucun des pays membres, mais aussi pour éviter d'ouvrir entre ces derniers des négociations qui s'annonçaient particulièrement périlleuses, l'UE a finalement décidé de ne rien changer du tout. Toujours en vigueur, le changement d'heure semestriel est donc loin d'être enterré et devrait en toute logique continuer d'être appliqué pendant plusieurs années.