"Trop, c'est trop": comment les derniers trumpistes du Sénat ont lâché leur champion

Le leader de la future ex-majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, le 6 janvier 2021 - Drew Angerer / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP
Le leader de la future ex-majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, le 6 janvier 2021 - Drew Angerer / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Il leur aura fallu qu'un parfum d'insurrection trumpiste flotte dans l'air de Washington D.C. pour abandonner le chef. Après l'invasion du Capitole par des soutiens de Donald Trump mercredi, les sénateurs ont repris le cours de la séance de certification des résultats de l'élection présidentielle remportée par Joe Biden. Parmi la quinzaine d'élus républicains qui comptaient y faire obstruction, il ne reste plus que quelques jusqu'au-boutistes.

Le retournement le plus notable - et le plus écœuré - est probablement celui de Lindsey Graham, sénateur de Caroline du Sud et longtemps ardent défenseur du trumpisme. "Trop, c'est trop", a-t-il lancé dans l'hémicycle. Initialement, cet élu conservateur était l'un de ceux, avec Ted Cruz et Josh Hawley, qui encourageaient le plus Donald Trump à contester sa défaite.

"Trump et moi, on a fait un sacré parcours. J'enrage que tout cela se termine ainsi. Mon Dieu, j'enrage. De mon point de vue, il a été un président conséquent. Mais aujourd'hui, (...) tout ce que j'ai à dire c'est, ne comptez plus sur moi", s'est désolé Lindsey Graham.

"Je ne peux plus m'opposer"

D'autres thuriféraires du président sortant se sont senti contraints de retourner leur veste. À l'instar de la sénatrice Kelly Loeffler, qui vient d'être battue en Géorgie et a rappelé que le matin, elle avait "pleinement l'intention de faire obstacle à la certification des votes électoraux" de la présidentielle.

"Toutefois les événements qui se sont déroulés aujourd'hui m'ont obligée à reconsidérer. Et je ne peux plus, en mon âme et conscience, m'opposer à la certification de ces grands électeurs", a-t-elle déclaré.

D'autres sénateurs du Grand Old Party ont tenu le même raisonnement, tels que Mike Braun de l'Indiana, Steve Daines du Montana, Marsha Blackburn du Tennessee ou James Lankford de l'Oklahoma. "À l'évidence, la commission que nous avions exigée ne se tiendra pas", a déclaré ce dernier, par allusion à une commission censée examiner les accusations de fraude portées par 11 sénateurs républicains.

C'est d'ailleurs la première prise de parole de James Lankford qui a été interrompue lorsque le Sénat a été envahi par des trumpistes massés à l'extérieur.

"Nous nous dirigeons ce soir vers une certification de Joe Biden en tant que président des États-Unis", a ainsi concédé ce républicain qui a soutenu les différents recours en justice de Donald Trump contre le scrutin de novembre.

Six irréductibles

Il reste toutefois une poignée d'irréductibles, notamment Josh Hawley du Missouri et Ted Cruz du Texas. Cet ex-candidat à l'investure républicaine de 2016, qui se positionne plus que jamais pour 2024, fait partie des six sénateurs à avoir maintenu leur vote contre la certification des 11 grands électeurs d'Arizona favorables à Joe Biden. Une manière de s'arrimer l'électorat trumpiste en attendant l'inévitable.

Josh Hawley estime que le Congrès doit neutraliser l'élection du démocrate, mais l'a réitéré dans des termes moins offensifs qu'auparavant. "Nous avons bien besoin d'une enquête sur les irrégularités et les fraudes", a-t-il dit.

Qu'il s'agisse de 6 ou de 14 sénateurs, l'initiative de ce dernier carré de trumpistes n'avait d'emblée aucune chance d'aboutir. Seulement désormais, la réduction de leurs effectifs permettra d'accélérer le processus de certification des résultats de Joe Biden.

Cela ne préjuge en rien, pour ce qui concerne ceux qui ont préservé leur siège, de leur volonté d'être plus conciliants avec le futur président des États-Unis. Plutôt, leur défection interroge la trajectoire à venir du Parti républicain, dont la conversion au trumpisme est dorénavant lestée des événements inédits de mercredi dans la capitale américaine.

Article original publié sur BFMTV.com