Centres de rétention de migrants en Albanie : un tribunal italien saisit la Cour de justice de l'UE
Un deuxième revers judiciaire pour la politique migratoire du gouvernement de Giorgia Meloni : ce lundi, un tribunal de Rome a finalement annoncé avoir saisi la Cour de justice de l'Union européenne pour trancher le débat sur les camps de rétention en Albanie. Cette saisine bloque de fait tous les transferts vers les centres de rétention dans ce pays.
Les juges italiens ont décidé de saisir les Hauts magistrats de Luxembourg pour s'assurer que la législation italienne soit bien conforme aux textes européens. Pour des questions de délai légal, les sept migrants concernés, de nationalités égyptienne et bangladaise, "retourneront en Italie dans les prochaines heures", a indiqué une source gouvernementale.
Dans une affaire précédente, des juges de la section des affaires migratoires du tribunal de Rome avaient déjà annulé la rétention des 12 premiers migrants conduits en Albanie, invoquant un récent arrêt de la CJUE sur les pays de provenance considérés "sûrs" par les pays d'accueil.
Pour contourner l'obstacle, le gouvernement de Giorgia Meloni avait adopté 48 heures plus tard un décret en inscrivant dans la loi 19 pays considérés comme "sûrs" par le gouvernement.
Face à ce décret, des juges du tribunal de Bologne ont également saisi il y a quinze jours la Cour de Luxembourg pour clarifier la situation face aux "divergences évidentes" et aux "conflits d'interprétation" dans le système juridique italien.
Ils ont également estimé qu'il n'était pas possible de déclarer des pays entiers sûrs lorsqu'il existe des preuves de la persécution de minorités.
"On pourrait dire, paradoxalement, que l'Allemagne nazie était un pays extrêmement sûr pour la grande majorité de la population allemande : à l'exception des juifs, des homosexuels, des opposants politiques, des personnes d'origine rom et d'autres groupes minoritaires", ont-ils plaidé.
Les centres prévus pour accueillir les personnes migrantes en Albanie, après l’accord signé entre Rome et Tirana, prévoient qu’à l’exception des personnes vulnérables, les migrants secourus en mer Méditerranée par les garde-côtes italiens soient désormais pris en charge sur le sol albanais moyennant un financement de l'Italie.
Ce projet controversé d'externalisation des centres de rétention en dehors de l'Union européenne fait débat. En octobre dernier, les chefs d'Etat et de gouvernement s'étaient penchés sur la question. Dans une lettre adressée aux capitales, Ursula von der Leyen avait lancé le débat en proposant d'accélérer les retours et d'ouvrir des centres de rétention dans des pays tiers. Cette proposition répondait à une demande de 15 États membres qui souhaitaient transférer les déboutés du droit d'asile vers des pays tiers sûrs.
Selon les chiffres du ministère de l'Intérieur, 58 504 migrants sont arrivés en Italie entre le 1er janvier et le 11 novembre 2024, contre 146 868 sur la même période en 2023.