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Ce qu’on sait vraiment de la fraude sociale, cible du gouvernement

Photo d'illustration / Getty Images
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Bruno Le Maire a relancé le sujet de la fraude sociale sur BFMTV, en évoquant les "aides renvoyées au Maghreb".

C'est l'un des sujets préférés de la droite et de l'extrême droite : se focaliser sur la fraude sociale. Un sujet qui semble en passe d'être celui du gouvernement, à en croire les propos de Bruno Le Maire, ministre de l'Économie, sur BFMTV mardi 18 avril.

Un chiffre difficile à calculer

Un objectif confortée par Olivier Dussopt sur la même antenne. Le ministre du Travail a annoncé un renforcement des outils de luttes contre les fraudes. Un thème dont les chiffres suscitent de nombreux fantasmes.

La fraude sociale, c'est l’ensemble des fraudes commises à l’encontre de la Sécurité sociale, qui compte quatre branches : famille (CAF), retraite (CNAV), recouvrement (URSSAF) et maladie (Assurance maladie). Mais c'est un chiffre compliqué à calculer : l’Assemblée nationale, le Sénat et la Cour des comptes s’y sont tour à tour cassé les dents ces dernières années.

1,6 milliard d'euros de fraude détecté

Selon l'État et les organismes de prestations sociales, 1,6 milliard d'euros de fraude sociale ont été détectés en 2022. Sur cette somme, près de la moitié, 788 millions d'euros concernent la fraude au recouvrement social avec des redressements issus de la lutte des URSSAF contre le travail informel. Second poste de fraude, celle à la CAF, 49 000 cas détectés pour un préjudice total de 351 millions d'euros, soit à peine 0,4% des sommes versées.

Toujours selon les chiffres officiels, la fraude à l'Assurance maladie, qui concerne 19 000 dossiers, représente 316 millions d'euros, soit 0,1% des sommes versées. Les dirigeants de la caisse reconnaissent que la traque aux tricheurs chez les assurés n’a qu’un "impact financier limité".

Une fraude évaluée entre 7 et 9 milliards

Le filon se situe surtout du côté des soignants, par exemple en facturant des actes médicaux non effectués et en se faisant rembourser en tiers payant. Enfin, on recense 155 millions d'euros de fraude au réseau de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), soit 0,1% des retraites versées par la Sécurité sociale.

Mais ces chiffres ne reflètent que la réalité de la fraude détectée, qui n'est que la partie émergée de l'iceberg, et il est compliqué d'évaluer la réalité de la fraude sociale. En 2019, une note de l'Acoss, l'organisme de recouvrement des cotisations sociales, estimait que la fraude à la Sécurité sociale avait représenté entre 7 et 9 milliards d'euros en 2018, dont entre 1,9 et 2,6 milliards d’euros pour la CAF, soit 6 à 8 fois supérieur à la fraude détectée. En 2021, la Caisse d’allocations familiales (CAF) chiffrait elle le coût de la fraude à 2,8 milliards d’euros. Soit un peu moins de 3% des prestations versées la même année.

La fraude fiscale, entre 80 et 100 milliards d'euros

Une fourchette allant de 14 à 45 milliards d’euros est régulièrement évoquée, sans autre fondement qu’une étude britannique estimant les fraudes et erreurs cumulées, entre 3% et 10% dans les systèmes de santé de plusieurs pays occidentaux. Une estimation assez vague donc.

La fraude sociale reste cependant largement moindre que la fraude fiscale. Le syndicat Solidaires Finances estime depuis plusieurs années que la fraude fiscale oscille entre 80 et 100 milliards d'euros par an, Bercy indique de son côté que l'administration fiscale a mis en recouvrement 14,6 milliards d'euros en 2022. Une fraude à laquelle le gouvernement compte également s'attaquer.

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