"Une carte sortie de prison": après la victoire de Trump, que va-t-il advenir de ses affaires judiciaires?

Poursuivi au pénal dans quatre affaires distinctes aux États-Unis, Donald Trump va probablement profiter de sa victoire à l'élection présidentielle américaine pour mettre un coup d'arrêt à ces procédures.

Avec cette élection présidentielle, Donald Trump jouait aussi son destin personnel. Poursuivi dans quatre affaires pénales aux États-Unis, sa victoire déclarée ce mercredi 6 novembre risque de mettre un coup d'arrêt à ces poursuites.

L'affaire la plus pressante est celle pour laquelle il a été reconnu coupable en mai. Le républicain a été condamné le 30 mai pour 34 délits de falsifications de documents comptables, destinées à cacher un paiement de 130.000 dollars à l'actrice de films X Stormy Daniels pour éviter un scandale sexuel à fin de sa campagne présidentielle de 2016. Donald Trump est ainsi devenu le premier ancien président des États-Unis à avoir été reconnu coupable au pénal.

>> Donald Trump élu président, suivez les résultats définitifs et les réactions en direct.

Mais le prononcé de sa peine, déjà reporté à la fin novembre, risque de l'être encore en raison de sa victoire, selon les médias américains. Donald Trump encourt jusqu'à 4 ans de prison dans cette affaire, mais Michael Dorf, professeur à la Cornell Law School, a déclaré à Business Insider qu'il était probable que si Donald Trump gagnait la Maison Blanche, il demanderait immédiatement le report de sa condamnation à la fin de sa présidence. Et même sans report, l'hypothèse que le juge Juan Merchan lui impose de la prison ferme, s'agissant d'une première condamnation pénale, apparaît désormais hautement improbable face aux difficultés pratiques insurmontables que soulèverait l'incarcération d'un président élu puis président en exercice, selon les experts.

Donald Trump est également poursuivi pour deux affaires au niveau fédéral. Il a été inculpé en 2023 de "complot à l'encontre de l'État américain", d'entrave à une procédure officielle et d'atteinte aux droits électoraux, en lien avec les événements survenus à l'issue de l'élection présidentielle de 2020 et ayant culminé avec l'assaut du Capitole le 6 janvier 2021. L'ancien président républicain est entre autres accusé d'avoir voulu invalider l'élection de Joe Biden en 2020 et d'avoir laissé faire les émeutiers qui ont attaqué le Congrès.

Donald Trump est aussi accusé, dans une autre affaire, d'avoir emporté dans sa résidence de Mar-a-Lago, en Floride, des documents de la Maison Blanche alors qu'il n'était plus président. Ces documents confidentiels doivent normalement revenir aux archives nationales. Il est accusé d'avoir ainsi mis en péril la sécurité des États-Unis.

Mais, selon les chaînes ABC et NBC, la politique de longue date du ministère de la Justice est de ne pas poursuivre un président en exercice, ce qui signifie que les poursuites fédérales contre Donald Trump pourraient être interrompues immédiatement.

Légalement, cette politique ne devrait pas s'appliquer à une procédure pénale déjà engagée avant son accession au pouvoir, puisque "c'est une situation très différente", affirme à l'AFP Claire Finkelstein, professeure de droit à l'université de Pennsylvanie (nord-est). Mais puisque c'est l'interprétation qui prévaudra sous une administration Trump, dans ces procédures fédérales, "en l'état actuel des choses, il ne pourrait être jugé qu'après avoir quitté le pouvoir", ajoute-t-elle.

Le républicain a aussi affirmé qu'il renverrait "en deux secondes" Jack Smith, le procureur spécial en charge de l'enquête dans ces deux affaires, s'il était élu président. Et même s'il était condamné à l'issue de ces procès, il aurait la possibilité de s'accorder à lui-même la grâce présidentielle, ce qui n'est jusqu'alors jamais arrivé aux États-Unis. Il ne peut toutefois pas le faire dans le dossier des paiements à Stormy Daniels puisqu'il s'agit d'une affaire jugée au niveau étatique, à New York, et la grâce présidentielle ne vaut que pour les affaires fédérales.

Donald Trump a été inculpé dans une quatrième affaire, dans l'État de Géorgie. Le milliardaire républicain fait face au total à 13 chefs d'accusation pour des tentatives de fraude électorale dans cet État remporté d'une courte tête par Joe Biden en 2020. La procureure en charge du dossier a recouru à une loi en vigueur dans cet État sur la délinquance en bande organisée, utilisée notamment contre les gangs et prévoyant des peines de cinq à vingt ans de prison.

Malgré la défaite du président sortant en Géorgie en 2020, "Trump et les autres prévenus ont refusé de reconnaître qu'il avait perdu et ont en connaissance de cause et délibérément participé à un complot pour changer illégalement le résultat de l'élection en sa faveur", selon l'acte d'accusation. Là encore, le Washington Post affirme qu'un éventuel procès n'aura "probablement pas lieu avant qu'il ne quitte la Maison Blanche". Selon NBC, son avocat Steve Sadow avait prévenu le juge "qu’en vertu de la clause de suprématie et de ses devoirs en tant que président des États-Unis, ce procès n’aurait pas lieu avant la fin de son mandat", afin de ne pas interférer avec ses fonctions.

"S'il gagne, dites adieu à toutes les affaires pénales", a résumé auprès d'ABC Karen Friedman Agnifilo, ancienne procureure adjointe à Manhattan. "Les affaires pénales sont terminées, que ce soit d'un point de vue juridique ou pratique", a-t-elle expliqué, ajoutant qu'une victoire de Donald Trump serait une "carte sortie de prison gratuite" pour lui.

Article original publié sur BFMTV.com