Attaque au Capitole : peut-on comparer les militants pro-Trump et les Gilets Jaunes ?
Après l’invasion historique du Capitole par des militants pro-Trump alors que le Congrès entamait la certification de la victoire de Joe Biden à la présidentielle, de nombreux parallèles ont été faits avec les Gilets Jaunes. Est-ce vraiment comparable ?
Ce sont des images qui ont choqué le monde entier. Mercredi 6 janvier, le Capitole, le siège du congrès américain, a été envahi par des partisans de Donald Trump qui ont interrompu la cérémonie de certification de la victoire de Joe Biden à l'élection présidentielle américaine. Des militaires de la Garde nationale ont été envoyés sur place, des bâtiments ont dû être évacués, des coups de feux ont été tirés, une femme est décédée dans le Capitole... Ces scènes chaotiques sont “une agression sans précédent contre la démocratie”, selon les termes utilisés par le président-élu des États-Unis Joe Biden.
Largement commenté en France, ce triste événement a beaucoup été comparé à ceux que nous avons connu lors des manifestations des Gilets Jaunes. Saccage de lieux symboliques, intrusion dans un ministère en enfonçant la porte avec un chariot élévateur, tentative de pénétration de force à l’Assemblée nationale, incendie d’une préfecture, affrontements très violents avec les forces de l’ordre... autant d’attaques à l’encontre du gouvernement et de la démocratie qui ont poussé certains observateurs à faire le lien entre les deux événements, à l’instar de Prisca Thévenot, porte-parole d’En Marche, sur les antennes de BFM TV ce jeudi matin.
Sidération au lendemain des événements au #Capitole !
Et pourtant il convient encore et toujours de rappeler à certains représentants politiques qu’aucune violence contre nos institutions démocratiques ne peut et ne doit être justifiée, excusée pic.twitter.com/5fo0KkIIIz— Prisca THEVENOT (@priscathevenot) January 7, 2021
Le député Jean Lassalle n’a pas non plus hésité à faire le parallèle entre ces militants pro-Trump et les Gilets Jaunes qui “étaient aux portes de l’Élysée”, dans une série de tweets critiquant l’attitude d’Emmanuel Macron face à la situation.
3) Qu’aurait dit la France si le président américain s’était exprimé sur fond de drapeau tricolore, en décembre 2018, lorsque les gilets jaunes étaient aux portes de l’Élysée ? @jeanlassalle #Macron #Trump #Capitole ⤵ pic.twitter.com/Zl9BOJr7yK
— Jean Lassalle (@jeanlassalle) January 7, 2021
Si les images venues des États-Unis peuvent paraître similaires à celles que nous avions pu observer lors de certaines manifestations des Gilets Jaunes, il est important de remettre les choses dans leur contexte.
Deux mouvements que tout oppose
À Washington, les militants qui se sont retrouvés devant le Capitole répondaient à l’appel de Donald Trump de contester la victoire de Joe Biden à l’élection présidentielle. Le mouvement des Gilets Jaunes est tout le contraire : la mobilisation historique naît d’une pétition lancée par des citoyens pour dénoncer une hausse des taxes sur l’essence. Rien de politique donc à l’origine, contrairement aux États-Unis.
Les premières mobilisations, à Paris notamment, montre que les gilets jaunes étaient avant tout un mouvement apolitique, où s’y côtoyaient notamment des symboles d’extreme droite comme d’extreme gauche.
Contrairement aux Gilets Jaunes, ces militants américains défendent une idéologie, à savoir une idéologie d’extrême-droite avec notamment plusieurs suprémacistes blancs, comme le prouvent les symboles néofacistes observés lors de cette attaque.
Le ressort idéologique de la minorité des pro-Trump qui est entrée dans le Capitole est :
- suprémaciste, comme en témoigne notament les nombreux symboles néo fascistes (lire ici👇)https://t.co/BHYPw0EIqe— Mathieu Molard (@MatMolard) January 7, 2021
Des mouvements radicaux
Parmi les militants pro-Trump qui ont fait irruption au congrès américain, il y avait comme lors des manifestations des Gilets Jaunes de nombreux groupuscules différents. Mais ceux qui ont agi à Washington (QAnon, Proud Boys, Wotanistes, Keystone United, National Socialist Movement, Blue Lives Matter...) sont des mouvements d’extrême droite ou qui en sont proches. Aucun symbole de l’extrême-gauche ne semble avoir été observé à Washington.
Vidéo - “Cela n’aurait jamais pu se produire en France”
Deux contextes différents
Aux États-Unis, cette attaque historique est arrivée à un moment bien précis : lors de la certification de la victoire de Joe Biden et du parti démocrate à l’élection présidentielle. Il s’agit donc d’un mouvement de contestation contre une prise de pouvoir avec des militants qui n’acceptent pas la défaite républicaine.
En France, l’une des revendications principales des gilets jaunes montre à quel point le mouvement était différent des États-Unis. En réclamant majoritairement le RIC (Référendum d’initiative citoyenne), les gilets jaunes réclamaient davantage de démocratie, au contraire des manifestants à Washington qui s’opposent à un processus démocratique.
Le mouvement des gilets jaunes, très hétéroclite dans sa composition, a rassemblé plus d’un million de personnes venu de tous horizons à travers toute la France contre plusieurs milliers de pro-Trump du côté des États-Unis.
Quelques points communs sont cependant notables en termes d’organisation. Les appels à la violence se sont notamment multipliés en ligne plusieurs jours à l’avance. Mais il est important de souligner que cette manière de faire n’est plus rare à l’heure où de très nombreuses manifestations s’organisent sur les réseaux sociaux.
Si on peut trouver des similitudes entre ces militants pro-Trump et certains gilets jaunes en termes de motivations, à savoir contester le gouvernement en s’en prenant à symboles forts de la nation, le contexte et l’identité des manifestants en font deux mouvements difficilement comparables.
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