Canicules marines : les records de chaleur des océans illustrent le cercle vicieux du changement climatique
CLIMAT - Il y a le feu au lac. Aux océans même. Cet été, les records de chaleur se succèdent dans les mers et les océans, envoyant un nouveau signal du dérèglement climatique à l’Humanité. Ce vendredi 4 août, le service européen de surveillance du climat Copernicus annonce qu’un nouveau record a été battu : après l’Atlantique nord et la Méditerranée, c’est la température mondiale de la surface des océans qui a explosé.
Elle « a atteint 20,96 °C le 30 juillet » 2023, a indiqué Copernicus. Le précédent record remontait à mars 2016, la température avait alors atteint les 20,95 °C. Ces données concernent les océans entre les 60e parallèles nord et sud, excluant donc uniquement les régions polaires.
Une boucle climatique négative, destructrice pour la biodiversité
Au-delà des conséquences néfastes pour la vie marine, cette chaleur exceptionnelle a un impact important sur les équilibres climatiques. Problème : si le dérèglement du climat est la conséquence de ces records de chaleur, elle en est aussi la cause.
« Bien qu’il y ait certainement d’autres facteurs de court terme, la cause principale sur le long terme est sans aucun doute l’accumulation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère causée par les activités humaines, en premier lieu la combustion des énergies fossiles », a ainsi souligné auprès de l’AFP le professeur Rowan Sutton, de l’université de Reading.
Or les océans sont les principaux puits de carbone de la planète. Ils absorbent 90 % de l’excès de chaleur du système terrestre provoqué par l’activité humaine au cours de l’ère industrielle, et cet excès d’énergie ne cesse d’augmenter au fur et à mesure que les gaz à effet de serre s’accumulent dans l’atmosphère. Mais plus les eaux se réchauffent, moins elles ont de capacité à absorber le CO2, ce qui vient renforcer le cercle vicieux du réchauffement climatique global de la planète.
Cette surchauffe des océans aura d’autres effets en chaîne sur la biodiversité, comme les migrations d’espèces ou l’arrivée d’espèces invasives menaçant les stocks de poissons et donc la sécurité alimentaire de certaines parties du globe.
« La vague de chaleur océanique représente une menace immédiate pour une partie de la vie marine, on voit déjà des signes de blanchiment des coraux en Floride qui en sont la conséquence directe et je m’attends à d’autres conséquences négatives », a souligné le professeur spécialisé sur le changement climatique, Piers Forster, auprès de l’AFP.
Les records se suivent et risquent d’être à nouveau battus
L’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA), qui utilise une base de données différente de celle de Copernicus, relève elle aussi la même tendance au réchauffement des océans ces derniers mois, avec un record de températures atteint le 4 avril, à 21,06 degrés. Au 1er août, la température des océans était quasiment au même niveau (21,03 °C) et toujours au-dessus du précédent record de 2016.
Ce record de températures fait suite à une série d’autres depuis plusieurs semaines. La semaine dernière, les eaux de l’Atlantique Nord ont déjà atteint une température moyenne encore jamais mesurée jusqu’ici, avec un record de température moyenne de l’eau de surface de 24,9 °C observé le 26 juillet, selon des données provisoires du NOAA. L’Atlantique Nord atteint généralement son pic de température en septembre.
Quelques jours plus tôt, c’était la mer Méditerranée qui avait battu son record de chaleur journalier, avec une température médiane de 28,71 °C, selon le principal centre de recherches maritimes espagnol.
Une température record de 38,3 °C a même été relevée lundi 24 juillet au large des côtes de Floride. Une température qui correspond à celle d’un bain ou d’un jacuzzi, et qui pourrait représenter potentiellement un record absolu mondial en matière de mesure ponctuelle, si son exactitude est confirmée.
Selon un rapport du Giec de 2019, les canicules marines sont deux fois plus fréquentes depuis 1982. Leur intensité pourrait être 10 fois plus forte en 2100 qu’au début du XXe siècle si les émissions ne baissent pas.
Alors que le phénomène El Niño, qui a tendance à réchauffer les eaux, vient à peine de commencer, ces records ont des chances d’être à nouveau battus rapidement. Selon les experts, ses pleins effets ne se feront réellement sentir que vers la fin de cette année et se poursuivront sur les prochaines années.
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