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"C'était une scène d'apocalypse": des habitants de Beyrouth témoignent après les explosions

Le port de Beyrouth après l'explosion, le 4 août 2020 - STR / AFP
Le port de Beyrouth après l'explosion, le 4 août 2020 - STR / AFP

"C'était une scène d'apocalypse". Visages hagards et apeurés, immeubles dévastés, carcasses de voitures, corps gisant au sol... Deux énormes explosions dans le port de Beyrouth ont fait mardi au moins 100 morts, plus de 4000 blessés, selon un bilan encore provisoire, et provoqué des scènes de panique dans la capitale libanaise, déclarée ville "sinistrée". La phase de sidération qui a suivi les deux détonations a laissé place à l'effroi dans cette ville décrite comme complètement détruite par des habitants toujours sous le choc.

"On a été projetés dans les airs"

"On a entendu une première explosion, on est allé voir ce qu'il se passait mais on n'a pas eu le temps", raconte un jeune homme, blessé au visage. "Je n'ai pas réalisé qu'il y aurait une seconde explosion, et à ce moment là, du verre a explosé devant moi", explique-t-il.

A la première déflagration, certains ont cru à un bombardement, d'autres à un tremblement de terre. Une habitante de la capitale raconte qu'elle a d'abord pensé que les bruits étaient des feux d'artifice, "quelques secondes plus tard on a été projetés dans les airs". Tous décrivent les vitres se brisant aux coups des explosions, dont le souffle a tout emporté.

Un habitant de la ville, Hadi Nasrallah, raconte à BFMTV qu'il était en voiture autour du quartier où ont eu lieu les explosions. Avec la première détonation, "soudainement je ne pouvais plus entendre, j'ai vu comme un flash", explique-t-il. Sous le choc, son taxi s'arrête, "il m'a regardé et d'un coup on a entendu une large explosion. Toutes les glaces des voitures se sont brisées, comme celles des bâtiments autour de nous".

"Notre appartement s'est écroulé sur nous littéralement" raconte à BFMTV Wissam Sharaf Charaf un autre habitant de Beyrouth. "On a été soufflé par une vague gigantesque, un souffle gigantesque, le bruit nous a déchiré les oreilles, et puis c'était fini, c'était l'apocalypse. Je suis allé en Haïti, j'ai fait la guerre du Liban, j'ai fait reporter de guerre, jamais je n'ai vu ça", explique-t-il.

"C'est l'horreur, on a l'impression que c'est une scène de guerre"

Après le choc de l'explosion, c'est la panique dans les rues de la capitale, jonchées de débris. "On a commencé à recevoir des textos, des notifications comme quoi il y a eu une explosion à Beyrouth, sans savoir si c'était un attentat, une frappe israélienne ou tout simplement un accident", raconte à BFMTV Khalil Masri, Français expatrié à Beyrouth.

Son logement a subi des dommages importants, et dans les rues, il découvre "beaucoup de dégâts, des magasins endommagés, des stores qui ont volé, des meubles qu'on retrouve dans la rue qui ont volé à partir de l'appartement des gens... C'est une scène d'apocalypse, c'est une scène qui nous a rappelé la guerre d'il y a trente ans, et on ne s'attendait pas du tout à ça, surtout dans la situation que le pays traverse actuellement".

"C'est vraiment l'horreur dans la ville, on a l'impression que c'est une scène de guerre, toute la ville est entièrement détruite", rapportait mardi soir sur BFMTV Rosemay Hacine, professeure de philosophie à Beyrouth. Elle décrit les voitures détruites, les dégâts dans les maisons, "les façades, les immeubles, les vitres... C'est partout, jusqu'à la banlieue".

"Il y a beaucoup de gens qui ont passé la nuit dans la rue parce qu'ils n'avaient nulle part où aller", raconte sur BFMTV Patricia Khoder, journaliste à L'Orient-Le jour, qui se dit en état de choc. "Ce matin on ne sait pas à quoi s'attendre quand on va sortir de chez nous, on appréhende le fait de voir la ville complètement soufflée, on a trois quartiers qui ont été compètement rasés par l'explosion (...) le port est complètement détruit, il n'y a plus rien".

"Les hôpitaux ressemblent à une ville de zombies"

Ce mercredi matin, "il y a toujours des gens qui cherchent leur famille, leur soeur, leur frère, leurs parents auprès des hôpitaux" surchargés, décrit la journaliste. Dans les rues cette nuit, des soldats évacuaient des habitants abasourdis, certains couverts de sang, T-shirt autour du crâne pour panser leurs blessures, tandis que des habitants cherchaient désespérément leurs proches manquant à l'appel, et que les ruines sont fouillées pour retrouver des survivants.

"C'est l'apocalypse à Beyrouth, les hôpitaux ressemblent à une ville de zombies", explique Wissam Sharaf Charaf, "il y a des gens en morceaux, il y a des traumatismes crâniens en masse, on m'a opéré sans anesthésie..."

Après la panique de la nuit, Khalil Masri décrit lui une "ville déserte", "très très calme par rapport à d'habitude" et quasiment sans voiture en circulation. "On ne comprend pas ce qu'il s'est passé. On était vivant et d'un seul coup notre ville est morte, Beyrouth est morte", lâche Wissam Sharaf Charaf.

Article original publié sur BFMTV.com