Publicité

Sarkozy nie toute "intention" de fraude dans l'affaire Bygmalion

SARKOZY NIE TOUTE "INTENTION" DE FRAUDE DANS L'AFFAIRE BYGMALION

PARIS (Reuters) - Un Nicolas Sarkozy combatif a nié mardi devant la justice toute "intention de fraude" ou toute "négligence" dans le financement de sa campagne pour l'élection présidentielle de 2012 à l'origine de l'affaire dite "Bygmalion".

Pendant quatre heures au tribunal de Paris, l'ancien président de 66 ans a réfuté toute connaissance d'un montage frauduleux aux fins de financer cette campagne pour quelque 42,8 millions d'euros, près du double du plafond autorisé.

"Y a-t-il une intention de nuire, de frauder ? Non", a-t-il répété devant le tribunal où il s'est livré à une énergique prestation, s'adressant souvent à l'auditoire derrière lui.

Nicolas Sarkozy est poursuivi pour "financement illégal de campagne électorale", ce qui est passible d'un an d'emprisonnement et 3.750 euros d'amende, aux côtés de 13 autres prévenus - anciens cadres de Bygmalion et de l'UMP, experts-comptables - poursuivis pour "faux", "usage de faux", "abus de confiance" ou "escroquerie", des délits passibles de trois à cinq ans de prison et 375.000 euros d'amende.

Grand absent des débats depuis l'ouverture du procès le 20 mai, Nicolas Sarkozy, masque noir et costume bleu nuit, s'est défendu mardi d'avoir pris la moindre part au système de fausses factures avec force gestes et arguments, partant parfois dans des digressions sur sa vie politique.

"Y a-t-il eu un seul moment où j'ai passé outre à un seul de leur avertissement ou de leur conseil? Non", a-t-il martelé, évoquant les ex-dirigeants de l'UMP, les responsables de l'agence de communication Bygmalion et son équipe de campagne.

"Moi, à partir du moment où ça fonctionnait et où tout le monde me disait que ça passait, je n'avais aucune raison de m'en préoccuper plus que cela", a-t-il plaidé en réponse aux questions de la présidente, Caroline Viguier.

"Est-ce que vous m’imaginez aller dans une réunion pour parler du prix des drapeaux, du coût des trains à affréter ? Je n’aurais pas tenu deux minutes. J’étais surchargé de travail", a expliqué celui qui cumulait en 2012 les rôles de chef de l'Etat et de candidat à l'élection présidentielle.

Des explications à rebours des auditions de Jean-François Copé, ex-secrétaire général de l'UMP, et de son directeur de cabinet d'alors, Jérôme Lavrilleux, qui ont évoqué, sans le nommer, "un candidat" décisionnaire et au fait de "la valeur des choses".

"ELLE EST OÙ LA CAMPAGNE EN OR MASSIF ?"

"Elle est où la campagne qui s'emballe, la campagne somptueuse, la campagne en or massif? Qu'on me dise en quoi ma campagne a été différente de celle de M. Hollande et de celle de Mme Le Pen", a notamment souligné l'ancien président à propos de la séquence qui a abouti à sa défaite face au socialiste François Hollande en mai 2012.

Nicolas Sarkozy n'est pas mis en cause pour le système de fausses factures. L'accusation le cible pour avoir ignoré des alertes et bénéficié de la fraude qui lui a permis de dépasser le plafond autorisé de dépenses électorales de 22 millions d'euros, pour des meetings somptuaires notamment.

"Cette campagne n'a pas coûté ce qu'on dit", a-t-il dit. "(Sinon) on aurait dit 'Sarkozy est devenu fou, il offre du caviar au public de ses meetings'".

Nicolas Sarkozy a reconnu sa responsabilité politique et administrative dans ce dossier mais repoussé toute responsabilité pénale.

"Elle exigerait de ma part une volonté frauduleuse et cette volonté frauduleuse, elle n'existe pas", a dit l'ancien président, qui est avocat de profession.

A l'évocation de notes remises en mars et en avril 2012 évoquant les dépassements des frais de campagne, Nicolas Sarkozy a affirmé avoir alors dit à son directeur de campagne, Guillaume Lambert : "Vous n'engagez aucune autre dépense que celles déjà prévues".

Parfois recadré par la présidente, Nicolas Sarkozy s'est presque justifié de ses emportements: "Je défends mon honneur et donc je le défends avec passion, ce n'est pas un show, je le sais."

Et l'ancien président de conclure : "J'ai voulu dire au tribunal, du fond coeur, sans calcul, ce qu'avait été la vérité. Et, madame la présidente, c'est la vérité que j'ai dite."

Le 1er mars dernier, Nicolas Sarkozy a été condamné à trois ans de prison, dont un ferme, pour corruption et trafic d'influence dans l'affaire dite "des écoutes Paul Bismuth". Une première pour un ancien président de la Ve République.

(Elizabeth Pineau, édité par Sophie Louet)