Budget de la Sécu : c'est quoi la CMP, dont la réunion pourrait mettre en péril le gouvernement Barnier ce mercredi ?
Composée à parts égales de députés et de sénateurs, une commission mixte paritaire est réunie lorsque les deux chambres sont en désaccord sur un texte.
Un processus de conciliation régulièrement employé sous la Ve République. Ce mercredi 27 novembre, la commission mixte paritaire (CMP) du Parlement doit se réunir pour trouver un accord sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.
Comme l'explique le Huff Post, la réunion de l'instance pourrait avoir pour conséquence de précipiter la chute du gouvernement de Michel Barnier, mais son but est avant tout, en théorie, de faire le point sur un texte qui a récemment fait l'objet d'un imbroglio législatif entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
Deux textes différents respectivement votés par l'Assemblée nationale et le Sénat
Alors que l'Assemblée avait adopté une "version remaniée", cette dernière a été validée trop tard pour que le Sénat puisse l'examiner. A la place, ce dernier a approuvé la "version initiale" transmise par le gouvernement, créant donc une situation impossible où deux versions différentes du texte ont été votées par les deux chambres.
Le Premier ministre Michel Barnier n'a donc eu d'autre choix que de convoquer une CMP, instance précisément prévue pour ce genre de cas de figure. Comme l'explique un article publié sur le site officiel du Sénat, cette dernière peut en effet être réunie "en cas de désaccord persistant entre les assemblées sur un projet ou une proposition de loi".
Le rôle de la CMP : trouver un compromis
Le mode d'emploi de la CMP est précisément défini par l'article 45 de la Constitution française : "Lorsque, par suite d'un désaccord entre les deux Assemblées, un projet ou une proposition de loi n'a pu être adopté après deux lectures par chaque Assemblée (...) le Premier ministre ou, pour une proposition de loi, les présidents des deux assemblées agissant conjointement, ont la faculté de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion."
Plus concrètement, comme le résume un article de La Chaîne Parlementaire, le rôle de la CMP est à chaque fois "de tenter de parvenir à un compromis sur un texte lorsque celui-ci a été voté dans des versions différentes par les deux Chambres du Parlement", dans le but de faire passer une version finale du texte susceptible de satisfaire tout le monde.
Composée de sept députés et sept sénateurs
Au terme des discussions de la CMP, deux cas de figure très simples peuvent se présenter. Soit un accord est trouvé et dans ce cas, le texte validé en CMP est proposé au vote des deux chambres "en vue de son adoption définitive". Soit aucun accord n'est trouvé et dans ce cas, le projet de loi repasse en lecture au Sénat et à l'Assemblée, cette dernière étant toutefois assurée par la Constitution d'avoir le dernier mot si le désaccord persiste.
Comme son nom l'indique, la commission mixte paritaire est nécessairement équilibrée, dans sa composition, entre l'Assemblée nationale et le Sénat. Elle est ainsi constituée de sept députés et de sept sénateurs (respectivement nantis de sept suppléants). Pour ce qui est de l'Assemblée, les groupes désignent directement un ou plusieurs parlementaires chargés de les représenter à la CMP, tandis qu'au Sénat, les participants sont choisis par une commission.
Une répartition qui doit refléter les rapports de force politiques
Dans les deux cas, l'appartenance politique de la délégation envoyée à la CMP doit refléter les rapports de force en vigueur au sein de chacune des deux chambres. Par exemple, les sept députés participant à la CMP convoquée ce mercredi 27 novembre sont répartis ainsi : deux membres du RN (Joëlle Mélin et Christophe Bentz), une de LFI (Élise Leboucher), un du PS (Jérôme Guedj), un d'Horizons (Frédéric Valletoux), une de la coalition présidentielle EPR (Stéphanie Rist) et un issu de LR (Yannick Neuder).
L'autre contingent composant cette CMP est moins éclaté en termes d'appartenance politique, puisqu'on compte dans ses rangs trois sénateurs LR (Philippe Mouiller, Pascale Gruny et Corinne Imbert), une UDI (Élisabeth Doineau), une issue de la coalition présidentielle RDPI (Solanges Nadille) et deux du groupe Socialiste, Ecologiste et Républicain (Annie Le Houérou et Bernard Jomier).
30% des textes de lois adoptés depuis 1959 sont passés en CMP
Le fonctionnement d'une CMP est régi et délimité par de nombreuses subtilités, décrites notamment par le site du Sénat, mais il faut retenir qu'à l'issue des discussions de la commission, celle-ci doit nécessairement délibérer sur une proposition de rédaction. En fonction des membres présents, le vote doit alors être paritaire (autant de sénateurs que de députés doivent voter). Il faut ensuite que le texte recueille la majorité des suffrages pour être adopté par la CMP et proposé aux deux chambres. En cas d'égalité ou de minorité de votes, la proposition de compromis est abandonnée.
Loin d'être une procédure d'exception, la CMP est au contraire devenue une instance fréquemment utilisée dans la vie politique française. Depuis 1959, selon le Sénat, environ 30% des projets et propositions de loi ont donné lieu à la convocation d'une CMP. Dans un tiers des cas, cela n'a débouché sur aucune conciliation et c'est finalement la version de l'Assemblée qui a été adoptée. Le reste du temps, un accord a été trouvé et on estime ainsi qu'au total sous la Ve République, près d'un texte de loi sur cinq a été adopté après avoir fait l'objet d'un compromis en CMP. Quel sera, cette fois, le sort du projet de loi sur le budget de la Sécu ?