Budget 2025 : ces points du texte sur lesquels le Sénat s’est opposé au gouvernement de Michel Barnier
POLITIQUE - Certes Michel Barnier est plus à l’aise au Palais du Luxembourg qu’au Bourbon. Alors que la partie recettes du budget de l’État pour 2025 est soumise au vote du Sénat ce dimanche 1er décembre, le Premier ministre a de quoi être serein. Mais l’examen par les sénateurs du projet de loi de finances ne s’est pas fait sans revers pour le gouvernement malgré tout.
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Au Sénat, où sa famille politique des Républicains est le groupe le plus important, Michel Barnier sait pouvoir compter sur une majorité avec les élus centristes pour adopter son texte. Par nature opposés à toute hausse de la fiscalité, les sénateurs ont cette fois approuvé l’essentiel des mesures phares du gouvernement, en quête de 60 milliards d’euros d’économies pour relever des finances publiques en berne et ramener le déficit à 5 % du PIB en 2025, contre 6,1% en 2024.
Ainsi, des dispositifs comme la taxe temporaire sur les très hauts revenus et la contribution exceptionnelle des grandes entreprises ont passé sans encombre le filtre sénatorial. Le Sénat a aussi voté contre l’augmentation de la taxe sur l’électricité, censée rapporter plus de trois milliards d’euros. Au départ contre l’avis du gouvernement, avant que Michel Barnier se range à cet avis, deux jours plus tard, dans un geste envers l’extrême droite qui le menace de censure. Mais tout n’a pas un goût de victoire pour autant.
Logement et transports
La chambre haute a apporté de nombreuses modifications ayant trait au secteur du logement, le plus souvent contre l’avis du gouvernement. Plusieurs mesures, susceptibles d’alourdir les finances publiques, ont ainsi été votées comme le prolongement pour trois mois du dispositif Pinel censé s’arrêter au 31 décembre. Les sénateurs ont choisi de généraliser le prêt à taux zéro à tout le territoire pour les logements neufs et anciens, quand le gouvernement ne souhaitait l’étendre qu’aux constructions neuves. Idem pour les droits de succession abaissés à condition que cet argent serve à construire, acheter ou rénover une habitation et à vivre sur une période minimale de 3 ans. Le gouvernement souhaitait au contraire réduire le nombre de bénéficiaires potentiels et restreindre la mesure à l’acquisition d’un logement neuf.
Autres défaites sur les transports, avec l’adoption, contre l’avis du gouvernement, d’un amendement visant à étendre le « malus poids » aux véhicules électriques les plus lourds. Enfin, si les sénateurs ont approuvé la taxe sur le transport aérien qui prendra la forme d’une augmentation du prix des billets d’avion, ils ont exclu du dispositif les Outre-mer, la Corse et les petites lignes aériennes. Avec pour conséquence un gain plus faible qu’espéré pour le gouvernement.
« Exit tax », « flat tax » et taxe Gafam
Comme pour contrebalancer ces manques à gagner, les sénateurs ont misé sur le relèvement de taxes déjà existantes. Et écorné considérablement au passage des marqueurs du premier quinquennat Macron. Exemple avec l’« exit tax », mécanisme ciblant les plus-values pour dissuader l’exil fiscal, vidé de sa substance par Emmanuel Macron. Une alliance des sénateurs centristes et de la gauche a permis de rallonger les délais d’application dans un cas précis. Même configuration sur la « flat tax », aussi appelée « prélèvement forfaitaire unique » (PFU) et qui plafonne à 30% depuis 2018 la ponction sur les revenus du capital, comme les dividendes ou l’assurance-vie. La même alliance a permis le relèvement du taux à 33 %, avec un gain espéré de 800 millions d’euros.
L’impôt sur la fortune immobilière (IFI) qui remplace l’ISF, a vu son périmètre d’application considérablement élargi. Et enfin, toujours contre l’avis du gouvernement, les sénateurs ont aussi alourdi une taxe sur les GAFAM, les grandes entreprises du numérique, de 3 % à 5 %.
Le Sénat à la rescousse des collectivités
Reste encore un volet de taille, et sur lequel le gouvernement misait beaucoup pour récupérer quelque 5 milliards d’euros : les collectivités. Face à la grogne montante, exprimée notamment aux Assises des départements et au Congrès des maires, Michel Barnier avait annoncé que l’effort demandé serait réduit « très significativement », sans avancer de chiffres. Le Sénat l’a pris au mot.
La chambre haute, toujours très conciliante avec les collectivités, s’est ainsi opposée, à l’unanimité, à la réduction du Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), un système d’accompagnement des collectivités dans leurs dépenses d’investissement. La mesure initiale devait rapporter 800 millions à l’État, mais le gouvernement s’était dit prêt à renoncer à 80 % de cette enveloppe. Les sénateurs l’ont purement et simplement exclue du PLF.
Ces défaites pourraient n’être que temporaires pour le gouvernement. Même si le Sénat approuve cette partie comme attendu ce dimanche, le projet de loi, parce qu’il a été rejeté par l’Assemblée nationale, devra de toute façon passer par une Commission mixte paritaire (CMP). Si elle est conclusive, le texte soumis en seconde lecture au Parlement pourrait bien faire l’objet d’un 49.3. Si elle n’est pas conclusive, c’est la copie initiale qui sera représentée au Parlement en nouvelle lecture. Avec, dans les deux cas, la possibilité pour Michel Barnier de garder les modifications qui lui plairont et de faire disparaître les autres.
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