Budget 2025 : ce match à 5 qui va incendier l’Assemblée nationale, de la Commission à l’hémicycle

Premier débat majeur de l’ère Barnier à Matignon, l’exécutif défend son budget à partir de ce mercredi en commission des Finances à l’Assemblée nationale.

On vous présente le match à 5 qui va incendier l’Assemblée nationale sur le budget (photo d’Antoine Armand et Michel Barnier prise le 15 octobre 2024)

POLITIQUE - Michel Barnier se sent « l’âme d’un sapeur-pompier ». Cela tombe bien. Un mois après la confidence du Premier ministre sur la situation qu’il dit avoir « découvert » à Matignon, le gouvernement défend son budget à l’Assemblée nationale dans une ambiance sans doute incandescente.

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Antoine Armand (Économie) et Laurent Saint-Martin (Comptes publics) sont attendus à 17 heures ce mercredi pour le coup d’envoi des débats en commission des Finances. Au programme : 60 milliards d’euros d’économies, 1 900 amendements, et cinq familles différentes - au moins - qui vont ferrailler pour imposer leurs vues.

Nouvelle donne politique oblige, l’examen de ce texte financier ne ressemblera effectivement à aucun autre. Plus encore que le jeu classique entre la majorité et son opposition, l’exécutif, plus fragile que jamais, va devoir composer avec des offensives venues de toutes parts. Même de son propre camp.

Rien ne sera simple pour le gouvernement. Alors qu’il a dû préparer son budget dans un temps record, l’exécutif va maintenant essayer d’éviter son détricotage par l’Assemblée nationale. Pour l’instant, la feuille de route prévoit 60 milliards d’euros d’économie, pour ramener le déficit vers les 5 % du PIB (contre 6,1 actuellement.)

D’autant que les ministres prévoient d’autres mesures impopulaires. Après avoir annoncé la hausse des impôts (sur les plus riches) ou la suppression de 4 000 postes d’enseignants, Laurent Saint-Martin et Antoine Armand doivent effectivement lever plusieurs incertitudes au cours des débats. Ils vont par exemple préciser où raboter les 5 milliards d’euros supplémentaires promis sur les ministères, et les contours de la surtaxe sur les billets d’avion. Pas facile.

Dans ce contexte un brin inflammable, Michel Barnier aurait sans doute bien aimé pouvoir compter sur l’appui franc et massif de son propre parti et de ses 47 députés. Ce n’est pas le cas. Au contraire, le groupe des députés Les Républicains (canal historique) est celui qui a déposé le plus d’amendements au budget. Une incongruité, tant cette pole position est d’ordinaire l’apanage des groupes d’opposition.

En réalité, le budget préparé par l’exécutif ne sied que moyennement à Laurent Wauquiez et ses troupes, lesquels excluaient tout pacte avec la macronie il y a encore quelques semaines. Concrètement, si la droite semble prête à s’asseoir sur plusieurs de ses lignes rouges (comme les hausses d’impôts ou la désindexation provisoire des retraites sur l’inflation), elle espère engranger des victoires en « faisant obstacle » notamment au relèvement de la taxe sur l’électricité et au malus automobile.

Autant d’attentions qui peuvent recouper celles de l’aile droite du camp présidentiel. Car derrière l’offensive des Républicains, la macronie n’est pas en reste pour essayer de modifier la feuille de route de l’exécutif. Du côté d’Horizons (le parti d’Edouard Philippe) ou des macronistes issus des Républicains, on espère bien supprimer les articles sur la taxation de l’électricité, des chaudières à gaz, des grandes entreprises… Et limiter à une année contre trois la contribution exceptionnelle demandée aux plus fortunés.

En revanche, à l’autre bout du camp présidentiel, les revendications sont toutes autres. Le MoDem, et plusieurs élus de la fameuse « aile gauche » veulent plutôt « pérenniser » la surtaxe sur les hauts revenus et relever la « flat tax » sur les revenus du capital.

Pour ce faire, ils pourront sans doute trouver des relais de poids dans l’autre équipe majeure de ce match à cinq : le Nouveau Front populaire. À gauche, les députés ont effectivement décidé d’être « raisonnables » dans le dépôt des amendements (780 contre plus de 1 000 l’année dernière). Un changement de stratégie opérée pour éviter l’obstruction et donc de donner des arguments faciles au gouvernement pour dégainer l’article 49.3.

Le NFP se recentre sur 10 grandes propositions tirées de son programme aux législatives anticipées. Avec des chances réelles de pouvoir imposer certains points clefs, étant donné les nouveaux rapports de force à l’Assemblée. L’objectif, avoué par Éric Coquerel, le président (LFI) de la commission des Finances, est en tout cas limpide : rendre le budget « NFP compatible. »

Autant de sujets qui promettent des discussions incendiaires au Palais Bourbon. Entre la gauche et le gouvernement… mais pas seulement. Si les élus du Rassemblement national gardent le mystère sur leur attitude en commission ou en séance, le parti d’extrême droite cherchera comme toujours à tirer ses marrons du feu. Avec, cette année, une position d’arbitre encore plus confortable.

Sur le fond, Marine Le Pen et ses ouailles veulent taxer davantage les rachats d’actions ou supprimer, comme une partie du « socle commun », la surtaxe sur l’électricité. Sur la forme, ils n’hésiteront pas à se faire gardiens de ce qu’ils pensent être les priorités des Français. Avec, comme on l’a vu depuis les changements à Matignon, un certain succès pour se faire entendre de Michel Barnier. Les « pompiers » du gouvernement n’ont pas fini d’éteindre les feux.

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