Bruno Retailleau a une façon bien à lui d’analyser les résultats des élections législatives

POLITIQUE - À ceux qui doutaient que le nouveau ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, comptait apparaître comme le chantre d’une autorité retrouvée, son discours tenu lors de la passation de pouvoir ce lundi 23 septembre devrait les éclairer.

Le gouvernement Barnier « ne reflète pas le résultat des législatives », estime Roland Lescure

Durant sa prise parole, l’ex-patron du groupe LR au Sénat, connu pour son vocabulaire puisant dans le lexique de l’extrême droite, a fixé comme cap une politique divisée en trois priorités : « rétablir l’ordre, rétablir l’ordre et rétablir l’ordre ». Gérald Darmanin appréciera.

Un discours musclé que le nouveau locataire de la Place Beauvau a tenu à adosser à une légitimité politique que son parti, Les Républicains, n’a pas (du tout) obtenue par les urnes lors des élections législatives. Pour ce faire, et alors que ses troupes pèsent à peine 47 députés à l’Assemble nationale, Bruno Retailleau a préféré donner une interprétation des résultats du scrutin. Quitte à jouer les équilibristes.

Clin d’œil au RN

« Que nous a dit le peuple souverain, et notamment au premier tour de ces élections législatives ? Il nous a envoyé un message que nous devons entendre, et comme l’a dit le Premier ministre sans aucun sectarisme », a lancé le successeur de Gérald Darmanin comme vous pouvez le voir dans la vidéo ci-dessus. Et de poursuivre : « ce message il est clair, les Français veulent plus d’ordre, d’ordre dans la rue, d’ordre aux frontières ».

Selon Bruno Retailleau, cette demande « ne nous vient pas des Français de droite ou de gauche, elle nous vient de l’immense majorité des Français ». Une référence à peine voilée au Rassemblement national, arrivée en tête au premier des élections législatives. Raison pour laquelle le ministre de l’Intérieur dit tirer sa légitimité de la « majorité nationale », comme pour mettre au défi les députés RN de se montrer conciliants avec la politique qu’il compte conduire. Ainsi, si l’on résume, le score réalisé par l’extrême droite le soir du 30 juin donne au nouveau ministre de l’Intérieur le mandat pour opérer un tour de vis sécuritaire et migratoire. Point barre.

Un premier tour pas si limpide

Or, le message (si tant est qu’il en existe effectivement un) envoyé par les électeurs au premier tour des élections législatives est-il si limpide que le prétend Bruno Retailleau ? Si le Rassemblement national a bien réuni 9 377 297 millions de voix le soir du 30 juin, auxquelles on peut ajouter celles obtenues par l’Union de l’extrême droite conduite par Éric Ciotti (1 251 210 de voix) ou des Républicains (2 104 918), l’union de la gauche sous la bannière du Nouveau Front populaire avait réuni à elle seule 8 974 566 électeurs.

De son côté, le camp présidentiel, qui n’a pas particulièrement fait campagne sur une ligne dure sur le plan sécuritaire ni migratoire, mais autour de la question du pouvoir d’achat, de l’accès à la santé et au logement, ainsi que sur le travail et le mérite, a récolté 6 425 217 de voix. Un paysage électoral plutôt complexe mais surtout très loin de « l’immense majorité des Français » sur laquelle le ministre de l’Intérieur dit tirer sa légitimité pour conduire sa politique sécuritaire.

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