Bruno Le Maire ultra-offensif à l’Assemblée nationale : « avec la censure, vous avez fait dérailler la France ! »

Interrogé sur son rôle dans le dérapage du déficit, Le Maire fulmine contre les députés

POLITIQUE - La meilleure défense, c’est toujours l’attaque. Convoqué par les députés qui cherchent à identifier les causes et les responsables du dérapage inédit des comptes publics en 2024, l’ancien ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire n’a pas perdu une seconde ce jeudi 12 décembre pour ventiler ses nombreuses critiques à l’égard de son auditoire.

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« Qui êtes-vous pour juger ? », a-t-il par exemple lancé aux membres de la Commission des Finances, un brin agacé, en accusant l’Assemblée nationale d’avoir « fait dérailler la France » avec l’adoption de la motion de censure contre Michel Barnier la semaine dernière et en dénonçant à nombreuses reprises « l’hypocrisie », selon lui, des parlementaires.

Pour résumer, l’ancien ministre tout-puissant à Bercy sous Emmanuel Macron pendant 7 années estime que les députés n’ont pas de leçon à lui faire sur la tenue des comptes publics. Ceci, alors qu’ils essayent depuis plusieurs jours d’enquêter sur « les causes de la variation et des écarts des prévisions fiscales et budgétaires » constatés pour les années 2023 et 2024. Le déficit, prévu autour de 4 % au début de l’année s’envole aujourd’hui à plus de 6 % du PIB.

Le Maire tance les députés

« Je parle devant des parlementaires qui, à de rares exceptions près, ont tous voulu alourdir la facture des mesures exceptionnelles de soutien face au Covid et qui refusent maintenant de sortir de ces mesures. Je parle devant des parlementaires qui se précipitent aux 20 heures pour annoncer que les retraites seront bien revalorisées au 1er janvier. Et vous dites vouloir réduire le poids de la dette ? Hypocrisie », a par exemple tancé Bruno Le Maire, en référence aux âpres débats budgétaires de cet automne. Et aux concessions faites par Michel Barnier, notamment à la droite.

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L’ancien ministre de l’Économie et des Finances a encore jugé « très facile » de lui faire porter la « responsabilité de la dégradation des comptes publics. Si facile que tout le monde ou presque depuis mon retrait de la vie publique a emprunté ce chemin dans un unanimisme suspect, indigne de notre démocratie. » La diatribe, qualifiée de « roborative » par Éric Coquerel, le président (insoumis) de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale, a provoqué quelques gloussements dans la salle. « C’est une blague ?  », a entendu une journaliste de l’AFP dans l’assistance au début de l’offensive de celui qui est désormais professeur à Lausanne, en Suisse.

Quelles responsabilités ?

Il faut dire que Bruno Le Maire est sur le banc des accusés depuis des mois. Une première commission d’enquête sénatoriale a déjà démontré, il y a quelques semaines, les responsabilités (à des niveaux différents) des représentants macronistes dans les derniers gouvernements. Entre « attentisme » et « irresponsabilité. »

« Le gouvernement connaissait en réalité l’état critique de nos finances publiques dès le mois de décembre 2023. Il aurait dû, selon nous, réagir vigoureusement. Mais il ne l’a pas fait », a ainsi expliqué le président socialiste de la commission des Finances Claude Raynal lors des conclusions des débats mi-novembre. Son collègue, le LR Jean-François Husson dénonçait pour sa part « un sentiment d’irresponsabilité de ceux qui étaient alors au gouvernement. »

Au cœur des questions notamment : le silence des ministres et de la première d’entre eux Élisabeth Borne, au moment où, à l’automne 2023, des notes de Bercy alertent sur la dégradation des comptes. Et le refus par Emmanuel Macron et Gabriel Attal, quelques mois plus tard, en pleines élections européennes, de procéder à un budget rectificatif qui aurait permis de rattraper (un peu) le coup. Au Sénat, Bruno Le Maire avait déjà refusé d’endosser une quelconque responsabilité sur ces questions, pointant du doigt tour à tour, les services techniques de Bercy, puis l’inaction de son successeur à Bercy et de Michel Barnier à Matignon. La meilleure défense, c’est aussi la défausse.

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