Borne annonce 230 millions d'euros pour soutenir les départements et les rassure sur leur avenir

Le président de la République a concrétisé dimanche sa volonté de simplifier l'organisation territoriale du pays en mandatant le député Éric Woerth pour que l'action publique "gagne en efficacité" afin que les Français "puissent bénéficier de services publics à la hauteur de leurs besoins".
Dans sa lettre de mission, il estime que l'organisation territoriale, "fruit de notre histoire", est devenue "trop complexe", que les Français "ne s'y retrouvent plus" et souhaite une réduction du "nombre de strates décentralisées, aujourd'hui trop nombreuses". Des mots qui ont choqué les élus des départements.

"Vive les départements"

Dans son discours vendredi, la Première ministre a tenu d'emblée à les rassurer, estimant qu'"aujourd'hui et demain, le département est un échelon indispensable pour l'action publique locale" et concluant par un "Vive les départements!". La locataire de Matignon a également annoncé une enveloppe de plus de 230 millions d'euros pour les soutenir financièrement.

Issus de la Révolution française, essentiellement dotés de compétences sociales, les départements sont régulièrement menacés de disparition.
En 2010 déjà, une loi prévoyait de remplacer les conseillers généraux et régionaux par des conseillers "territoriaux", une disposition finalement abandonnée avant d'être reprise aujourd'hui par Emmanuel Macron, tandis que Manuel Valls avait proposé en 2014 de rayer de la carte les conseils départementaux.

"Le nombre délirants" de réformes territoriales

"Quand je vois se rouvrir un débat sur la décentralisation en se posant la question du nombre de strates, je pense qu'on va droit dans le mur", a déclaré vendredi François Sauvadet (UDI), président de Départements de France (DF), pour qui "la vraie réforme de la décentralisation attendue, c'est le changement des pratiques de l'Etat".
Quarante ans après les grandes lois de décentralisation, les départements estiment que le sens originel de la décentralisation, à savoir plus de pouvoir politique donné aux collectivités, s'est perdu en route. "Après un nombre délirant de réformes institutionnelles depuis 2010, avec la création des métropoles puis des régions, cantons et intercommunalités XXL, les élus souhaitent aujourd'hui une pause", relève Arnaud Duranthon, maître de conférences à l'Université de Strasbourg et auteur d'une étude sur la décentralisation. Le nouvel appel à supprimer une strate de collectivités se situe selon lui dans une approche "très technicienne" et "très instrumentale" du territoire, avec pour objectif principal "d'encourager la croissance économique" face à la globalisation des échanges.

"Soit une provocation soit un énième coup d'épée dans l'eau

Les dernières réformes territoriales ont fait du département "la variable d'ajustement de la décentralisation en l'affaiblissant par la réduction de ses compétences, par la diminution de ses potentialités fiscales et en organisant sa concurrence par les métropoles et les régions", abonde Nelly Ferreira, maître de conférences à l'Université de Cergy-Pontoise. Interrogés, les élus ne sont pourtant pas inquiets outre mesure.

"Soit c'est une provocation, soit c'est un énième coup d'épée dans l'eau avec cette tarte à la crème du nombre des strates qui réapparaît", juge Stéphane Troussel, président PS du conseil départemental de Seine-Saint-Denis.

"Quand les préfets sont allés taper à la porte des départements pour les aider à lutter contre le Covid, on ne parlait pas du niveau des strates", a-t-il encore ironisé.

Article original publié sur BFMTV.com