BNP Paribas s'inquiète de la conjoncture et de la fiscalité

Le directeur général de BNP Paribas, Jean-Laurent Bonnafé. La banque française, dont le résultat annuel a logiquement été plombé par son contentieux aux Etats-Unis, estime que la situation économique et le relèvement programmé de la fiscalité du secteur bancaire vont peser sur ses performances. /Photo prise le 5 février 2015/REUTERS/Gonzalo Fuentes

par Matthias Blamont et Leigh Thomas

PARIS (Reuters) - BNP Paribas a prévenu jeudi que la situation économique et le relèvement programmé de la fiscalité du secteur bancaire allaient peser sur ses performances après avoir publié un résultat annuel logiquement plombé par son contentieux aux Etats-Unis.

Comme ses concurrentes européennes, la banque française affronte une croissance économique anémique sur le Vieux continent, une inflation quasi nulle et un environnement de taux bas susceptible de perdurer plusieurs années du fait des mesures exceptionnelles décidées ces derniers mois par la Banque centrale européenne pour stimuler l'activité.

A Bruxelles, la Commission a relevé jeudi matin ses prévisions pour la zone euro, estimant que la chute des cours du pétrole était positive, mais prévoit une baisse des prix cette année.

"Le groupe fait face à un contexte économique et de taux d'intérêt détérioré (...) Ce contexte a un impact négatif sur les revenus générés sur les dépôts dans la banque de détail et n'a pas véritablement d'impact positif sur les marges de crédit", explique BNP Paribas dans un communiqué.

L'action BNPP a démarré la séance dans le rouge à la Bourse de Paris. Vers 13h45, elle recule de 4,01% à 46,850 euros, accusant la plus forte baisse de l'indice CAC 40 (-0,2%).

"Les chiffres et le dividende sont conformes aux attentes mais les perspectives sont prudentes", a réagi un opérateur de marché parisien.

"Nous souhaitions davantage de compressions de coûts. L'augmentation des économies va essentiellement être absorbée par la hausse des dépenses de conformité (...) De plus, BNPP dévalorise son objectif de ROE (rendement des capitaux propres) - auquel le marché ne croyait pas d'ailleurs", écrit Omar Fall, analyste auprès de Jefferies International.

Sans remettre formellement en question les objectifs de son plan stratégique 2014-2016, lequel vise notamment un ROE d'au moins 10% l'année prochaine, l'entreprise a jugé ses prévisions initiales trop optimistes.

"L'écart cumulé entre le scénario de base et le scénario révisé est de -60 points de base de croissance pour la zone euro en 2016. Ce contexte a un effet défavorable sur les volumes de crédit dans la banque de détail et chez CIB (banque de financement et d'investissement, NDLR) notamment", souligne BNP Paribas.

La banque s'attend en outre à payer plus d'impôts et à mobiliser davantage de fonds pour s'adapter à la régulation, en Europe pour contribuer à la mise sur pied de l'Union bancaire, mais également aux Etats-Unis, sans compter le futur mécanisme "Total Loss Absorbing Capacity" (TLAC) décidé par le G20 et dont les modalités exactes restent à définir.

"Au total, l'ensemble de ces nouvelles taxes et réglementations devrait avoir un impact de l'ordre de 500 millions d'euros sur le résultat net du groupe en 2016 (...) Cet impact devrait se réduire par la suite avec la baisse puis la disparition de certaines taxes et contributions ainsi que de certains coûts de mise en place."

DIVIDENDE MALGRÉ TOUT

La majorité des analystes interrogés par Reuters anticipent un ROE de BNP Paribas entre 8 et 9% l'an prochain.

"L'année 2014 a permis de montrer la force de notre modèle. Hors exceptionnels, le groupe affiche plus de sept milliards d'euros de résultat net, tous nos pôles sont en progression. Nous sommes face à des vents contraires mais la force du groupe, c'est son modèle", a insisté le directeur général, Jean-Laurent Bonnafé, pour justifier la décision de ne pas modifier les ambitions du plan stratégique.

La banque a accepté le 30 juin dernier de s'acquitter d'une amende record de 8,97 milliards de dollars et de plaider coupable de deux chefs d'accusation dans le cadre d'un accord avec les autorités américaines qui lui reprochaient d'avoir contourné pendant plusieurs années des règles d'embargo s'appliquant aux transactions en dollar, notamment au Soudan et en Iran. et

Ce montant, couplé aux coûts imposés par l'adaptation à la réglementation, ont fait dégringoler le résultat net publié en 2014 à 157 millions d'euros. Il avait atteint 4,82 milliards en 2013.

Le produit net bancaire signe pour sa part une progression de 2% à 39,17 milliards d'euros.

Le conseil d'administration a cependant décidé de proposer à la prochaine assemblée générale un dividende de 1,5 euro par action au titre de 2014, comme en 2013 et en 2012.

(Avec Alexandre Boksenbaum-Granier, édité par Jean-Michel Bélot)