Bayou "mis sous surveillance"? Des écologistes dénoncent une forme d'"inquisition"
Il faisait l'objet d'une "mise sous surveillance" par des militantes féministes depuis trois ans. Accusé par son ex-compagne d'avoir exercé des "violences psychologiques" sur elle, le secrétaire national d'Europe-Ecologie-Les Verts (EELV) Julien Bayou a démissionné de ses fonctions lundi.
Selon des révélations du quotidien Libération, ce dernier savait qu'il se trouvait dans le viseur d'un groupe de féministes depuis 2019. Ce collectif informel, dont faisait partie notamment partie l'une de ses ex-compagnes, enquêtait sur son compte, dénonçant son attitude envers les femmes.
De Yannick Jadot à Eva Jolly, ces révélations ont créé du remous parmi les cadres et anciens cadres du parti. Selon les informations de BFMTV, EELV organise ce samedi une réunion d'urgence du bureau exécutif et de la cellule de lutte contre les violences sexistes et sexuelles
Des proches et des ex-compagnes questionnées
D'après les informations de Libération, cette surveillance s'est installée alors que Julien Bayou a acquis une réputation de "coureur". L'objectif, tel qu'exposé à l'époque par les militantes: protéger les femmes tombant sous son charme. C'est ainsi que ces enquêtrices contactent des proches et anciennes compagnes de Julien Bayou, afin de se renseigner sur son comportement.
"Quand j’ai été approchée par Eugénie (l'une des militantes du collectif, dont le prénom a été changé, ndlr), que je connaissais bien, je suis rentrée dans son jeu en me confiant. J‘ai parlé comme on parle de son ex-amoureux, pas très dithyrambique quoi", confie notamment auprès de Libération une ancienne compagne.
Si celle-ci n'avance pas de violences psychologiques, ce n'est pas le cas de toutes: sur un groupe WhatsApp créé spécifiquement pour communiquer sur le "cas Bayou", les membres du groupe échangent autour des "pressions" et des "manipulations" qu'elles estiment avoir subi de la part du chef du parti.
"Cela a entraîné trois ans de difficultés pour lui, pour sa compagne et des ex-compagnes de qui on essayait d'avoir des informations", décrit Lilian Alemagna, chef du service politique de Libération, en direct sur BFMTV ce samedi.
La cellule de lutte interne s'auto-saisit
Le 30 juin dernier, l'une d'elles, Aline (le prénom a été changé) contacte la cellule d'EELV chargée de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles en expliquant vouloir se suicider et dénonçant le manque de réaction face à l'attitude de Julien Bayou. La cellule s'auto-saisit alors.
La suite, c'est la révélation dans les médias de l'existence de ces accusations de violences psychologiques à l'encontre de Julien Bayou, puis sa démission, lundi. Celui-ci martèle cependant n'avoir jamais été entendu par la cellule, malgré des demandes répétées.
"Ce que cela dit, c'est la manière de traiter ces affaires en interne, avant des cellules de lutte contre les VSS [Violences Sexistes et Sexuelles, ndlr] qui au final se politisent et se retrouvent paralysées", ajoute Lilian Alemagna sur BFMTV, tout en précisant que "les choses se faisaient en-dehors du parti politique".
"Des agissements hors de tout cadre"
Membre de la cellule, Rosalie Salaün-Gourlaouen s'est fendue d'un tweet après la parution de l'article, disant y être "aisément reconnaissable". Elle dénonce de son côté un "tissu de mensonges".
"Je suis indignée que des personnes pour qui j'ai de l'estime politique prennent au sérieux ces allégations", écrit-elle encore.
Ces révélations créent du remous parmi les sympathisants d'EELV. Eva Joly, ancienne eurodéputée écologiste, estime notamment que "ces agissements hors de tout cadre desservent la cause qu'ils sont censés faire avancer et sont dangereux pour celles-là mêmes qu'on prétend protéger", comme elle l'écrit dans un tweet.
Réaction similaire pour l'eurodéputée Karima Delli, qui dénonce un "délire". "Le féminisme n’est pas l’inquisition. Il est temps de se parler maintenant avant qu’il ne soit trop tard!", déclare-t-elle également sur Twitter.
Jadot déplore la démission de Bayou
Invité de BFMTV vendredi matin, Yannick Jadot pointait du doigt pour sa part toute la gestion de l'affaire, estimant que Julien Bayou n'aurait pas du démissionner. Lui recommandait plutôt une mise en retrait et juge la sanction trop sévère.
"À partir du moment où la cellule n’a pas rendu son travail, on n’a pas à sanctionner", en l'absence de "dépôt de plainte" et alors même que la personne accusée "n'a pas pu se défendre" a-t-il expliqué.
Selon les informations de BFMTV, alors que se tient le Conseil fédéral d'EELV ce samedi et dimanche, une réunion d'urgence du bureau exécutif et de la cellule de lutte contre les violences sexistes et sexuelles est en cours.