Barnier menacé de censure, le gouvernement rejette la responsabilité sur les oppositions

À la veille du probable renversement du gouvernement, les ministres s’activent pour en dramatiser les enjeux et exhorter le PS et les écologistes à ne pas s’y associer.

POLITIQUE - Opération de la dernière chance. Pour sauver leur peau, les ministres jouent leur va-tout. À la veille de la probable adoption d’une motion de censure (une première depuis 1962), Antoine Armand a appelé ce 3 décembre sur France 2 la gauche et le Rassemblement national à se hisser « à la hauteur des responsabilités ».

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Sans crainte de catastrophisme, le ministre de l’Économie a assuré : « Ce n’est pas le budget qu’on censure, ce n’est pas le gouvernement qu’on censure, c’est le pays qu’on abîme ». Appelant de fait les oppositions à réfléchir à deux fois avant de voter la censure car « tous les secteurs seront perdants » : « Il n’y a pas de Français qui gagne » en cas de chute du gouvernement.

Pas moins de sept ministres ont été dépêchés dans les matinales radio et télé pour faire le service après-vente et tenter de sauver ce qui peut encore l’être. Le discours gouvernemental repose sur deux grands axes : pointer les risques sur l’économie si les comptes de la Sécurité sociale n’étaient pas adoptés, et exhorter une partie du Nouveau Front populaire à ne pas mêler ses voix à celles de l’extrême droite. « Les socialistes et les écologistes ont-ils perdu le sens des responsabilités ?, interroge la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher. Ont-ils oublié que les premiers touchés par les conséquences d’une nouvelle instabilité gouvernementale seraient nos compatriotes les plus modestes et de la classe moyenne ? »

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Et d’enchaîner, en s’adressant directement aux députés PS et Verts : « Vous avez l’opportunité de prouver qu’il reste quelque chose de l’héritage de Jean Jaurès, de Léon Blum, de Pierre Mendès-France ». Un argument osé, qui agace l’eurodéputé socialiste Pierre Jouvet : « Pompier pyromane. On négocie avec le RN, on le met au centre du jeu. Ce n’est ni sérieux, ni digne ».

« Censure et déshonneur »

Bruno Retailleau, connu pour ses positions très à droite, s’est quant à lui adressé aux députés RN, tentant de les dissuader de voter la censure... en utilisant l’argument inverse. « Le comportement de Marine Le Pen est totalement irresponsable ! Elle va mêler ses voix à celles de l’extrême gauche », a déclaré le ministre de l’Intérieur sur TF1. Lui aussi porte un discours déconnecté du budget de la Sécurité sociale : « Marine Le Pen le fait à un moment particulier, car il y a quelques jours, les Insoumis ont déposé un texte de loi pour abroger le délit d’apologie du terrorisme » du Code pénal.

Certains ministres s’appliquent, eux, à expliquer que seul le gouvernement est responsable. En miroir, les oppositions le seraient beaucoup moins. « Sur les retraites, sur les médicaments, sur les allègements de cotisations, nous avons fait des compromis, ouvert la porte et modifié la copie initiale », défend Laurent Saint-Martin, ministre du Budget. Non seulement, ces « gestes » tant vantés par le gouvernement en direction du Rassemblement national n’auront pas suffi, mais en plus, pour la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier, Michel Barnier alliera à la censure « le déshonneur ».

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