VIDÉO - Un aveugle violemment refusé par un chauffeur Uber à cause de son chien guide

La loi prévoit pourtant que "l'accès aux transports (...) soit autorisé aux chiens guides ou d'assistance accompagnant les personnes titulaires de la carte d'invalidité".

Il est 8h40 quand Anthony s'apprête à monter dans un Uber, dans le XVe arrondissement de Paris, pour accompagner sa fille de quatre ans à l'école. Avec lui, son chien guide, qui l'accompagne au quotidien. Car Anthony est aveugle depuis l'âge de sept ans.

Comme souvent, Anthony commande son VTC sur l'application Uber. Sauf qu'une fois le chauffeur arrivé sur place, rien ne se passe comme prévu. "En voyant le chien, le chauffeur me dit qu'il ne prend pas de chien à bord, et refuse de nous laisser monter", nous explique par téléphone Anthony, qui a filmé les échanges avec le chauffeur.

Un dialogue de sourd

Dans la vidéo que nous avons pu consulter, Anthony essaie d'expliquer au chauffeur que la loi oblige tous les transports recevant du public, dont les VTC, à accueillir les chiens d'assistance, le chauffeur lui oppose qu'il précise sur son profil qu'il refuse d'embarquer les animaux, ajoutant qu'il existe une option, payante, pour voyager avec un animal à bord. Une option qui évidemment ne concerne par les chiens guide d'aveugle.

L'intervention d'une passante qui confirme au chauffeur l'obligation d'accepter les chiens guide d'aveugle à bord semble faire plier le chauffeur, qui descend de son véhicule pour, imagine-t-on, faire grimper le chien dans le coffre.

La situation dégénère

Anthony se dirige vers l'arrière du véhicule, pensant avoir obtenu gain de cause, d'autant que le chauffeur lui lance, en désignant son chien : "Je le prends, il n'y a pas de soucis". Le chauffeur referme finalement le coffre, tient ensuite des propos confus, évoquant un dépôt de plainte, une réclamation à Uber, puis réaffirme son accord pour prendre le chien après avoir appelé Uber.

Alors que le chauffeur pianote sur son téléphone pour semble-t-il tenter de joindre Uber, Anthony se décide à faire monter son chien à l'arrière. La situation dégénère alors, le chauffeur agrippant Anthony, avant de tirer violemment le chien par l'arrière, dans un accès de colère, comme les images en attestent.

"Je suis habitué, c'est peut-être ça le plus triste"

"Je ressens beaucoup de colère et de tristesse pour ma fille de quatre ans qui a assisté à la scène sans dire un mot et a vu une scène avec une telle violence. Moi, je suis habitué, c'est peut-être ça le plus triste", nous confie-t-il.

Après cette altercation, Anthony nous explique avoir joint le service client Uber, qui lui a affirmé "tout faire pour qu'il croise le moins possible la route de ce chauffeur lors de ses réservations", lui conseillant toutefois de "refuser la course si ce chauffeur lui était proposé" lors de la mise en relation. Anthony nous a annoncé son intention de porter plainte. Contacté par nos soins, un porte-parole d'Uber dénonce une "altercation inacceptable et affirme avoir "immédiatement procédé à la suspension temporaire du compte du chauffeur le temps d'une investigation interne".

L'entreprise affirme sensibiliser régulièrement les chauffeurs à l’accompagnement des personnes en situation de handicap, notamment via un podcast, des vidéos ou encore des newsletters à destination des chauffeurs.

Un problème dans certains commerces et hôtels

Une situation qui n'est pas une première pour Anthony, qui nous confirme avoir déjà eu des problèmes similaires par le passé avec des chauffeurs de la plateforme. En décembre dernier, après une altercation avec un chauffeur en présence de plusieurs témoins suite au refus d'embarquer son chien d'assistance, Uber décide de suspendre son compte client, face au témoignage contradictoire du chauffeur.

Un problème d'acceptation des chiens d'aveugle qui concerne aussi des hôtels, commerces ou piscines dans lesquels il s'est déjà rendu. "Il y a une méconnaissance de la loi, parfois, mais aussi beaucoup de mauvaise foi", déplore Anthony.

Une amende de 450 euros

L'entrepreneur n'est pas le seul à avoir connu ce genre d'incidents avec la plateforme. En mars 2020 à Toulouse, trois chauffeurs Uber refusent successivement à Florie, 34 ans, de la conduire à la gare en raison de la présence de son chien guide. À l'époque, relate France 3 Occitanie, "l'entreprise américaine a adressé un message à l'ensemble de ses chauffeurs afin de leur rappeler la législation concernant le refus des chiens guides pour une course et des risques de "suspension des comptes chauffeurs" Uber encourrus".

La loi du 11 février 2005 prévoit que "l'accès aux transports, aux lieux ouverts au public, ainsi qu'à ceux permettant une activité professionnelle, formatrice ou éducative est autorisé aux chiens guides ou d'assistance accompagnant les personnes titulaires de la carte d'invalidité". Le refus d'accès à un transport à une personne titulaire de la carte d'invalidité est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la troisième classe (jusqu'à 450 €).

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