Daniel Ortega en passe d'être triomphalement réélu au Nicaragua

Après dépouillement dans 66,3% des bureaux de vote, Daniel Ortega, le candidat du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) obtient 72,1% des suffrages, contre 14,2% à Maximino Rodriguez, candidat du Parti libéral constitutionnaliste (PLC) de droite. /Photo prise le 6 novembre 2016/REUTERS/Oswaldo Rivas

par Enrique Pretel et Ivan Castro MANAGUA (Reuters) - Ancien guérillero converti aux bienfaits de l'économie de marché, homme politique le plus populaire au Nicaragua, le président Daniel Ortega semble bien parti pour remporter haut la main un troisième mandat présidentiel de cinq ans. Après dépouillement dans 66,3% des bureaux de vote, le candidat du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) obtient 72,1% des suffrages, contre 14,2% à Maximino Rodriguez, candidat du Parti libéral constitutionnaliste (PLC) de droite. L'annonce de ces résultats provisoires de l'élection de dimanche par la commission électorale a été accueillie par des cris de joie des partisans du FSLN qui sont descendus dans la rue pour célébrer la réélection d'Ortega. A 70 ans, Daniel Ortega peut s'enorgueillir de présider aux destinées d'un pays certes pauvre, mais stable et doté d'une croissance économique régulière depuis dix ans. Les investissements étrangers affluent dans le petit pays d'Amérique centrale où, inexistants il y a quelques années, des centres commerciaux flambant neufs, des hôtels sont construits. Depuis son retour au pouvoir, en 2006, après une décennie dans l'opposition, le PIB par habitant au Nicaragua a augmenté de 67%, selon la Banque mondiale. Il se situait en 2015 à 2.087 dollars. Mais tout le monde ne partage pas cet avis et les détracteurs de Daniel Ortega voient en lui un autocrate aux tendances despotiques et adepte du népotisme. On dit de lui qu'il a la mainmise sur l'appareil judiciaire, la police et les forces armées. Il a nommé de nombreux proches à des postes clés et fait adopter en 2014 un changement de la Constitution levant la limite au nombre de mandats présidentiels. L'OPPOSITION DIVISÉE Ses rivaux l'accusent de mettre en place une dynastie similaire à celle des Somoza que le jeune Ortega et les Sandinistas renversèrent en 1979. Le rôle grandissant de son épouse, Rosario Murillo, qui se présente à ses côtés aux suffrages des électeurs au poste de vice-présidente, est particulièrement critiqué par l'opposition. "Ortega s'impose et peu lui importe s'il viole les droits des autres", a dénoncé Maximino Rodriguez dans une interview à Reuters. "Il est supposé avoir combattu la dictature d'(Anastasio) Somoza, mais les sandinistes eux-mêmes le cataloguent aujourd'hui comme étant pire que Somoza", ajoute le candidat du Parti libéral constitutionnaliste (PLC), un ancien des "Contras", groupe paramilitaire d'extrême droite engagé contre les sandinistes dans les années 1980. La campagne d'Ortega a été facilitée par l'éclatement du Parti libéral indépendant (PLI), principale formation de l'opposition qui s'est divisée entre les partisans de ses deux chefs rivaux, Pedro Reyes et Eduardo Montealegre. Les partisans de ce dernier, désavoué en justice, ont été exclus du parti. Ils présentent Reyes comme une "marionnette" d'Ortega. Les Etats-Unis et des organisations internationales comme la Commission inter-américaine des droits de l'homme (CIDH) ont fait part de leur préoccupation après l'exclusion des pro-Montealegre mais s'inquiètent aussi du refus d'Ortega d'accepter que des observateurs internationaux assistent au processus électoral, pour lequel 4,3 millions de Nicaraguayens sont inscrits. (Gilles Trequesser et Henri-Pierre André pour le service français, édité par Jean-Stéphane Brosse)