Augmenter les impôts ? Ça ne doit « pas être tabou » dit Moscovici avant l’épreuve du budget

Le premier président de la Cour des Comptes estime que le débat fiscal doit être rouvert. Une position qui va à rebours de la politique d’Emmanuel Macron.

ÉCONOMIE - Plus que jamais, il persiste et signe. Le président de la Cour des Comptes Pierre Moscovici met en garde samedi 7 septembre dans Le Parisien sur la préparation du budget 2025, « sans doute le budget le plus délicat de la Ve République. » Et afin de rééquilibrer les finances publiques, il préconise de renoncer à un des dogmes d’Emmanuel Macron.

Interrogé par Le Parisien sur les leviers qui permettraient d’assainir un peu les finances françaises, Pierre Moscovici écarte les « remèdes miracles par la croissance ». Il préfère évoquer d’autres pistes comme des économies « intelligentes » qui « ne dégradent pas les services publics », par exemple sur les postes de l’apprentissage.

Mais pas uniquement. Le premier président de la Cour des Comptes estime que « le débat fiscal ne doit et ne peut pas être tabou ». S’il ne cible pas ouvertement une catégorie de la population, Pierre Moscovici souligne que « nos concitoyens, notamment les classes populaires et moyennes, ont le sentiment que pèsent sur eux des charges fiscales lourdes, alors que d’autres y échapperaient ». Il plaide, sans davantage de précisions, pour qu’un débat sur l’augmentation des impôts ait lieu « entre le gouvernement et le parlement ».

Ce n’est pas la première fois que Pierre Moscovici s’exprime de la sorte, loin de là. En mars 2024, avant même le tourbillon politique provoqué par la dissolution, il estimait déjà que le débat sur la fiscalité devait « au moins être posé ». Sans vouloir toucher au montant de l’impôt obligatoire, il évoquait alors la piste de « prélèvements exceptionnels, temporaires ».

Mais qu’elle concerne les classes moyennes ou aisées, cette position va à rebours de la ligne de Bercy, qui a fait de l’augmentation des impôts, exceptionnelle ou pérenne, une ligne rouge. Tout juste le gouvernement a-t-il mis en place, après moult débats houleux, une « contribution exceptionnelle » des énergéticiens, qui n’a d’ailleurs pas rapporté autant qu’espéré. La nomination de Michel Barnier, issu des LR, ne devrait pas marquer d’inflexion radicale sur ce plan.

En réaction, la gauche a fait de la taxation des superprofits un cheval de bataille. Les partis du NFP remettent le sujet sur la table dès que possible et l’examen du budget 2025 ne devrait pas faire exception, surtout dans une Assemblée nationale sans majorité.

Michel Barnier a en théorie jusqu’au 1er octobre pour présenter le projet de loi de finances 2025 sur le bureau de l’Assemblée nationale. Auparavant, le texte doit être soumis au Haut Conseil des finances publiques, organisme qui dépend de la Cour des Comptes. Ce dernier a besoin de sept jours pour rendre son avis sur le PLF et le PLFSS (le budget de la Sécu) et « il doit pouvoir travailler sérieusement », met en garde Pierre Moscovici.

L’ancien ministre socialiste dit donc préférer que le dépôt du projet de loi à l’Assemblée nationale intervienne un peu plus tard que prévu, avec « une ou deux semaines » de délai afin que le texte proposé soit « sérieux et crédible ». Et d’avertir le nouveau Premier ministre : « Pour le budget 2025, il faut une rupture, en tout cas un point d’inflexion très net. »

Outre le calendrier français, le nouvel exécutif est aussi attendu au tournant par Bruxelles sur la présentation de son plan de réduction du déficit vers l’objectif des 3 % en 2027. L’échéance est fixée au 20 septembre, mais un délai a été demandé par la France pour « assurer une cohérence entre le plan et le projet de loi de finances 2025 », a fait savoir le ministère de l’Économie samedi 7 septembre. La réponse de l’UE n’a pas encore été rendue publique.

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