Au Maroc, la révolte du Rif demeure dans les mémoires et sur les corps

Nasser Zefzafi, le 6 mai 2017..  © Mohamed el-Asrihi / AFP
Nasser Zefzafi, le 6 mai 2017.. © Mohamed el-Asrihi / AFP

Entrer chez les Zefzafi, c’est entrer dans un autre monde, un monde marqué par le temps qui s’est écoulé. La position des meubles a à peine changé depuis que Nasser Zefzafi n’est plus là, comme le souligne son père, Ahmed Zefzafi, en nous montrant différents endroits de la maison. Des drapeaux noirs flottent encore sur leur toit depuis le 29 mai 2017, date à laquelle Nasser a été arrêté pour avoir été à la tête du plus grand mouvement de protestation du siècle dans le Rif.

“Ils ont cassé cette porte, dit Ahmed en désignant l’entrée principale de leur maison, et sont entrés avec 54 agents de la brigade de la police nationale.” Ce sont les derniers souvenirs qu’il a de son fils, considéré désormais comme une figure mondiale du peuple berbère [amazigh] rifain.

Nasser Zefzafi s’est fait connaître comme l’un des militants au discours le plus incisif lors de la révolte du Rif de 2016 à 2017. Le mouvement populaire (Hirak) du Rif avait été déclenché par la mort d’un vendeur de poissons, Mouhcine Fikri, broyé dans un camion-poubelle dans lequel il tentait de récupérer ses marchandises confisquées par les autorités.

Spirale de misère

Les émeutes qui avaient suivi n’avaient pas seulement été un signe de solidarité populaire envers le malheureux vendeur de rue. La mort de Mouhcine Fikri découlait d’une politique générale qui tendait à marginaliser et à délaisser depuis des années la région du Rif et ses habitants – principalement des Imazighen [pluriel du mot berbère Amazigh, “homme libre”, terme utilisé par les Berbères pour se désigner], le peuple autochtone du nord de l’Afrique.

Nasser n’était pas un activiste au moment de cet incident. Comme beaucoup de Rifains à l’époque, il était au chômage, avec des perspectives bien sombres car sa région s’enfonçait de plus en plus dans une spirale de misère, contrairement à d’autres régions du Maroc en route vers la modernité.

“Ce n’est qu’à partir de ce jour-là qu’il a commencé à descendre dans la rue pour participer à des marches pacifiques avec des dépôts de fleurs et de bougies à Al-Hoceima”, raconte Ahmed.

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