Au Canada, le “temps du feu” est arrivé

Nous étions à peine en mai que près de 30 000 personnes avaient déjà dû être évacuées à cause de dizaines d’incendies ravageurs dans la province de l’Alberta. Le bilan des destructions ne cessait de s’alourdir et, dans la bouche des responsables politiques, on entendait des termes comme “sans précédent”.

Sans précédent ? Mais où étaient-ils en 2017, quand la Colombie-Britannique a connu la pire saison d’incendies jamais enregistrée, qui a causé quatre tempêtes de pyrocumulonimbus simultanées ? Où étaient-ils en 2016, quand la ville de Fort McMurray a brûlé des jours durant en même temps que 6 000 km2 de forêt ?

Le “bruit” des fluctuations climatiques

Non, la situation actuelle n’est pas sans précédent. Suis-je en colère ? Oui. À la fin des années 1970, les experts d’Exxon eux-mêmes prédisaient que l’augmentation du CO2 d’origine industrielle ne se fondrait bientôt plus dans le “bruit” des fluctuations climatiques imprévues et serait mesurable à travers la hausse des températures mondiales, tout particulièrement dans les latitudes élevées comme celles du Canada.

J’ai commencé l’écriture de mon dernier livre, Fire Weather, en 2016, quelques jours seulement après que Fort McMurray a disparu dans un pyrocumulonimbus de 14 kilomètres de hauteur provoqué par les incendies.

Déjà à l’époque j’avais compris que si un incendie pouvait causer de tels ravages dans une ville prospère de la région subarctique, alors que les lacs étaient encore gelés et la rivière Athabasca bordée de blocs de glace, il était facile d’imaginer les dégâts qu’un feu de ce genre pourrait causer dans des villes plus au sud où les constructions en bois abondent, comme Vancouver, ou dans les zones périurbaines où vivent actuellement la moitié des Canadiens et un tiers des Américains.

Une menace annoncée

Cela fait plus d’un demi-siècle que la menace est connue, et elle s’abat aujourd’hui sur nous avec une fureur redoublée. La saison des grands incendies est de plus en plus longue, et les feux de plus en plus destructeurs. C’est ce que j’appelle “les feux du XXIe siècle”, parce que c’est avec le nouveau siècle que les incendies sont devenus hors norme. Avant l’an 2000, les tempêtes de feu des pyrocumulonimbus étaient des phénomènes extrêmement rares. Aujourd’hui, elles sont monnaie courante. L’Alberta en a connu plusieurs durant la seule première semaine de mai.

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