Au Burkina Faso, des femmes se sont lancées dans la sécurité
Pour des raisons liées aux pesanteurs socioculturelles, nos trois témoins ont préféré s’exprimer sous le couvert de l’anonymat. Elles ont aussi souhaité ne pas être filmées. Elles veulent éviter en outre des malentendus avec leurs employeurs.
Cathia, la vingtaine, assise sur un fauteuil, scrute les faits et gestes de ceux qui rentrent dans l’immeuble où elle travaille. Le teint ébène, de taille fine, plutôt réservée, ici c’est elle qui assure la sécurité des biens et des personnes. Cela fait deux ans qu’elle occupe cette position, elle est vigile.
Ce métier généralement exercé par des hommes a réussi à charmer de plus en plus de femmes à Ouagadougou ces dernières années. Cathia en est une. Elle est issue d’une modeste famille vivant en zone rurale. Sa soif des études l’a poussée à chercher du travail pour se permettre de faire la classe de terminale.
Après la classe de première, elle a décidé de proposer ses services à “une société de vigiles” de la place. Durant les vacances, elle a été payée 50 000 FCFA par mois [76 euros]. Grâce à cette activité, elle a pu passer le baccalauréat.
Les qu’en-dira-t-on
Son dévouement et sa détermination lui ont permis d’obtenir la mention “très bien” en série littéraire au bac 2023. Cette étape franchie, elle a décidé une fois de plus de se tourner vers ce métier pendant ses vacances.
Elle est payée 40 000 FCFA par mois [61 euros] dans son boulot actuel. Elle confie que ce job n’est pas une mince affaire, surtout pour les femmes : “Souvent, avec les contrôleurs, ce n’est pas facile. Certains contrôleurs exagèrent avec les femmes vigiles. Ils respectent plus les hommes vigiles que nous.”
“L’entourage passe son temps à dire que ce travail n’est pas fait pour les femmes.”
“Dans le quartier, je suis un peu gênée de dire que je suis vigile. Si les gens l’apprennent, ils vont commencer à te manquer de respect. Heureusement que ma famille le sait et m’encourage. Mon petit ami m’encourage également.”
Elle dit ne pas être sûre de poursuivre son cursus à l’université. En effet, étant mère, elle doit s’occuper de son enfant, qui va faire la classe de CP1 à la prochaine rentrée scolaire. Elle compte demander à son employeur de l’accompagner en la faisant travailler à mi-temps. S’il n’accepte pas et qu’elle n’a pas d’autres options professionnelles, il se peut qu’elle décroche. Pour l’heure, Cathia reste optimiste et dit peser le pour et le contre.
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