"Une attirance qui remonte à sa petite enfance": la fascination de Delon pour "le milieu du grand banditisme"
Si le métier d'acteur a été, pour Alain Delon, un "coup de pot" qui lui a évité de devenir "voyou" ou "maquereau", il ne l'a pas empêché d'avoir beaucoup d'amis truands et aussi, d'ailleurs, policiers.
Parmi les liaisons dangereuses, assumées, de cet amateur d'armes de collection et de chevaux de course, de boxe et de casino, figuraient François Marcantoni, ami de jeunesse, bien connu de la justice, "Mémé" Guérini, un des caïds de la pègre marseillaise, François Besse, le lieutenant de Jacques Mesrine, "l'ennemi public n°1", les frères Zemmour...
Une fascination pour le milieu des gangsters
En 2017, il est entendu par un juge, en marge d'une affaire de grand banditisme: des véhicules immatriculés à son nom avaient été trouvés dans la propriété d'un roi de la pègre parisienne, Marc Hornec.
"J'ai eu beaucoup de rapports avec le grand banditisme, je l'ai même touché du doigt", confessait-il en 2021 dans Paris Match. "Mais j'ai toujours préféré les policiers, ceux qui nous défendent".
À Bernard Pivot qui l'interrogeait en 1996 sur la visite qu'il venait de rendre en prison à François Besse, il avait simplement répondu: "Ça fait partie de mes pulsions personnelles. Je n'ai pas envie d'en parler".
"Il est fasciné par le milieu des gangsters, c'est une attirance qui remonte à sa petite enfance, quand il jouait dans la cour de la prison de Fresnes (où son beau-père était surveillant) avec les enfants des gardiens, entre flics et voyous", disait en 2015 à l'AFP son biographe Bernard Violet.
L'affaire Markovic
À 14 ans, en 1949, le père d'un copain l'enrôle dans un film d'amateur en 8 mm. Il y joue - déjà - un jeune malfrat qui se fait flinguer, comme cela va lui arriver si souvent dans ses futurs long-métrages.
Alain Delon, dont la vie a parfois ressemblé à un polar, tient des dizaines de fois un rôle de voyou ou de flic. Comme dans le chef d'oeuvre de Jean-Pierre Melville Le Samouraï (qui deviendra son surnom), où il joue un gangster traqué. Comme dans Flic story, de Jacques Deray, où il interprète Roger Borniche, célèbre policier.
"Le cinéma et son ambition démesurée de reconnaissance lui ont probablement permis de ne jamais tomber du mauvais côté", disait Bernard Violet, à la sortie de son livre Les Mystères Delon (2000) que n'a d'ailleurs pas apprécié la star. "J'ai compté pas moins de 19 cadavres dans son entourage ou ses relations amicales !", ajoutait le biographe.
"Une propension à s'enfermer dans des rôles de flic ou de voyou"
"Ses relations avec le Milieu et l'affaire Markovic ainsi que sa propension à s'enfermer peu à peu dans des rôles de flic ou de voyou (...) suscitent la controverse", écrit de son côté Vincent Quivy dans Alain Delon, ange et voyou (2017).
Trafiquant notoire, Stefan Markovic était arrivé clandestinement en France en 1958. Il rencontre Delon en 1964 sur le tournage du film Les Félins où il est figurant. Flambeur, fréquentant le Paris de la nuit, il devient garde du corps de l'acteur, a une liaison avec Nathalie Delon (alors au bord du divorce). En 1968, son cadavre ligoté est découvert dans une décharge des Yvelines.
Sur fond de scandale politico-mondain, qui fait trembler le régime, François Marcantoni, décédé en 2010, est inculpé en 1969 pour le meurtre. Il passe un an en prison avant de bénéficier d'un non-lieu. Et aucun élément tangible n'a jamais permis d'avancer la moindre responsabilité d'Alain Delon dans l'assassinat.