Attention, cette vidéo de Donald Trump n'a aucun lien avec l'épidémie de mpox
Le 14 août 2024, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré une urgence sanitaire internationale face à la résurgence des cas de mpox en Afrique. Dans ce contexte, des internautes ont partagé une vidéo de Donald Trump qui mettrait "en garde contre les confinements et la fraude électorale", assurant qu'elle aurait été tournée "suite à l'annonce de l'OMS". En réalité, cette séquence, où l'ancien président affirme que les "confinements" et "l'hystérie" collective seraient des stratégies visant à perpétrer des présumées fraudes, date d'août 2023. Donald Trump y faisait référence au Covid-19 et non au virus du mpox.
"Le président Trump met en garde contre les confinements et la fraude électorale suite à l'annonce de l'OMS et la variole du singe", prétend la légende d'une vidéo de l'ancien dirigeant américain partagée sur X plus de 3.000 fois depuis le 15 août.
"Les fous de gauche s'efforcent de ramener les confinements et les mandats Covid avec leur peur soudaine sur les nouveaux variants qui arrivent", assure Donald Trump dans cette séquence.
Il affirme également qu'il y aurait une volonté de la part des dirigeants politiques américains de "relancer l’hystérie autour du Covid pour justifier plus de confinements, plus de censure, plus d'urnes illégales, plus de bulletins de vote par correspondance et des milliards de dollars de pots-de-vin à leurs alliés politiques en vue des élections de 2024 [...] les plus importantes de l'histoire de notre pays".
Enfin, le candidat à la présidence des États-Unis affirme dans l'enregistrement que, s'il était de retour à la Maison Blanche, il supprimerait les fonds fédéraux à toute école, université, compagnie aérienne ou système de transports publics qui impose le port du masque ou la vaccination obligatoire.
Des affirmations similaires prétendant que l'ancien dirigeant aurait filmé cette vidéo en réaction au déclenchement le 14 août 2024 par l'OMS de son plus haut niveau d'alerte sanitaire face à la résurgence de cas de mpox en Afrique ont circulé dans d'autres publications virales en français (1, 2), anglais et espagnol (lien archivé ici).
Mais les internautes qui ont publié ces messages utilisent en réalité une ancienne vidéo qui n'a aucun rapport avec le mpox.
L'émergence récente d'un autre variant de mpox
Le mpox, anciennement appelé variole du singe (cette terminologie n'est plus utilisée car elle donnait lieu à des stigmatisations racistes, d'où le nouveau nom trouvé par l'OMS), causée par un virus proche de la variole, se caractérise par des lésions cutanées, comme des pustules, une forte fièvre et des douleurs musculaires (lien archivé ici). Identifiée pour la première fois en République démocratique du Congo (RDC) en 1970, la maladie est longtemps restée circonscrite à une dizaine de pays africains. Mais, en 2022, elle a commencé à s'étendre dans le reste du monde, notamment des pays développés où le virus n'avait jamais circulé.
Il existe deux grandes familles de virus du mpox : le clade 1 et le clade 2, beaucoup moins dangereux. C'est ce dernier qui s'est répandu lors de l'épidémie de 2022. Celle-ci a, de fait, été très peu meurtrière, avec un taux de mortalité bien inférieur à 1%, ce que l'on peut aussi expliquer par la meilleure efficacité des systèmes de soins des pays développés.
Cette fois, c'est le clade 1 qui alimente une épidémie de mpox depuis bientôt un an en RDC et, dans une moindre mesure, dans d'autres pays africains comme le Burundi et le Kenya. La RDC a dit jeudi avoir recensé 548 morts depuis le début de l'année, pour près de 16.000 cas "potentiels" recensés. Cette flambée est en partie liée au clade 1 d'origine, mais aussi à l'émergence du clade 1b, récemment apparu.
Ce variant a été détecté cette semaine en Suède, une première hors d'Afrique.
Le clade 1 d'origine se transmet par plusieurs formes de contact humain, alors que le variant 1B semble surtout circuler par voie sexuelle. En 2022, l'épidémie s'était manifestement propagée par voie sexuelle, touchant très majoritairement des hommes homosexuels ou bisexuels.
Si les autorités sanitaires regardent avec une inquiétude l'épidémie actuelle, à commencer par l'OMS qui a déclenché son plus haut niveau d'alerte, c'est d'abord pour ses conséquences déjà lourdes en Afrique.
A ce titre, la vaccination apparaît cruciale. Plusieurs vaccins sont très efficaces contre le mpox, mais ils manquent en Afrique alors qu'en 2022, des campagnes ont pu facilement être lancées dans les pays développés.
Ancienne vidéo
A aucun moment de la vidéo virale Donald Trump ne mentionne le mpox ou même son ancienne dénomination "variole du singe". En revanche, l'ancien dirigeant et candidat républicain à la présidentielle de 2024 évoque à plusieurs reprises le Covid-19 et les restrictions liées à la pandémie, assurant par exemple qu'il y aurait eu une fraude électorale en 2020 en raison du confinement.
L'élection présidentielle américaine de 2020 remportée par le démocrate de Joe Biden avait suscité de nombreuses intox et Donald Trump n'a jamais reconnu sa défaite lors de ce scrutin (lien archivé ici).
Une recherche d'image inversée de la vidéo que nous examinons permet de retrouver des occurrences en ligne dès 2023. Le 30 août de cette année-là, le compte officiel de campagne de Donald Trump publie sur X la séquence avec pour légende : "Les tyrans du COVID veulent nous priver de notre liberté. Écoutez mes paroles : NOUS NE NOUS CONFORMERONS PAS" (lien archivé ici).
Une publication similaire comportant les mêmes vidéo et légende avait été partagée par l'ancien président sur son réseau social Truth Social également le 30 août (lien archivé ici).
COVID Tyrants want to take away our Freedom.
Hear my words— WE WILL NOT COMPLY. pic.twitter.com/Kql1YaxuO0— Team Trump (Text TRUMP to 88022) (@TeamTrump) August 30, 2023
Plusieurs médias avaient rédigé des articles sur les déclarations prononcées par l'ancien président dans cette vidéo (liens archivés ici et ici).
L'AFP a vérifié de nombreuses autres affirmations en lien avec la campagne électorale américaine de 2024, notamment en documentant le flot de désinformation visant le colistier de Kamala Harris Tim Walz ou encore les nombreuses infox entourant la tentative d'assassinat de Donald Trump.