Attentats en Espagne : le pire a sans doute été évité

Barcelone a rendu hommage dimanche, dans sa célèbre cathédrale de la Sagrada Familia, aux victimes des attentats en Catalogne, pendant que la police révélait des détails glaçants sur les assaillants, qui disposaient de 120 bonbonnes de butane. Les auteurs des attentats de jeudi et de vendredi en Espagne s’apprêtaient à commettre “un ou plusieurs attentats“ de “manière imminente“, quand un raté a entraîné la déflagration qui a détruit la maison où ils préparaient les attaques, a déclaré le chef de la police catalane Josep Lluis Trapero. Dans cette maison d’Alcanar (à 200 km au sud-ouest de Barcelone), qu’ils occupaient depuis environ six mois, les jihadistes avaient entreposé au moins 120 bonbonnes de gaz, a-t-il révélé, expliquant que la police avait fait cette découverte en inspectant les décombres. Martine Groby, une retraitée française de 61 ans voisine de la villa, a raconté à l’AFP avoir vu depuis avril quatre hommes “qui parlaient tous français“, aller et venir en déchargeant avec méfiance des marchandises. Selon cette femme qui regrette de ne pas avoir signalé leurs activités, ils faisaient des allers-retours à deux, pendant que les deux autres restaient, soit à pied avec des sacs à dos, soit dans une camionnette blanche ou sur deux motos “puissantes“ et “s’arrangeaient toujours pour que je ne voie pas ce qu’ils déchargeaient“. L’inspection de leur repaire a aussi permis de découvrir des substances explosives, y compris des traces de TATP, explosif prisé des jihadistes du groupe Etat islamique (EI) qui a revendiqué les attentats, car il se fabrique avec des ingrédients en vente libre. Moins de 24 heures après la déflagration qui s’est produite mercredi soir, la cellule a perpétré un double attentat au véhicule-bélier à Barcelone et à Cambrils. Parmi les suspects, un seul était encore en fuite dimanche, mais la police ignorait s’il se trouvait encore en Espagne. “Nous ne savons pas où il est“, a admis Josep Lluis Trapero. La cellule en tant que telle est “neutralisée”, a cependant souligné le responsable des affaires intérieures de la région Joaquim Forn. Le groupe comprenait 12 personnes dont un imam, a ajouté Josep Lluis Trapero, sans donner son nom. L’imam Abdelbaki Es Satty, âgé d’une quarantaine d’années, aurait pu radicaliser la douzaine de jeunes qui auraient intégré la cellule avec lui. “Il était très solitaire, se joignait plus à des jeunes qu‘à des personnes de son âge“, a déclaré à l’AFP à Ripoll un Marocain de 43 ans ayant souhaité rester anonyme. D’après des médias espagnols, Abdelbaki Es Satty avait déjà été incarcéré pour des délits mineurs. Selon El Pais et El Mundo, citant des sources de la lutte antiterroriste, il a fréquenté en prison, dont il est sorti en janvier 2012, des détenus ayant eu un lien avec les attentats islamistes de mars 2004 qui avaient causé la mort de 191 personnes dans des trains de banlieue à Madrid. Pendant que l’enquête avançait, Barcelone a rendu dimanche hommage aux victimes. Près de 2 000 personnes ont assisté à la “messe pour la paix et la concorde“ organisée dans l’emblématique basilique de la Sagrada Familia. Le chef du gouvernement conservateur Mariano Rajoy, était assis, protocole oblige, à côté du président de la Catalogne Carles Puigdemont avec lequel les différends se multiplient autour de ses projets indépendantistes. “L’union nous rend fort, la division nous ronge et nous détruit“, a curieusement dit dans son homélie l’archevêque de Barcelone Juan-Jose Omella. A l’extérieur s‘étaient massées des centaines de personnes, sous le regard de tireurs d‘élite postés sur les toits environnants. Douze des 14 personnes tuées dans les attentats ont été formellement identifiées. Parmi elles, un petit garçon de sept ans australo-britannique dont la famille avait diffusé un avis de recherche déchirant, et un autre enfant, espagnol, de trois ans. Dimanche après-midi dix personnes étaient encore entre la vie et la mort. Dans la soirée, les Barcelonais ont vécu un autre moment de communion, très spécial, dans leur cher Camp Nou, où le Barça a remporté un succès poignant face au Betis Séville (2-0) pour la reprise du Championnat de football d’Espagne. Les joueurs arboraient un brassard noir et leurs noms sur les maillots avaient disparu pour laisser place à un sombre “Barcelone”. Maarten Demunster, un spectateur Belge, de 44 ans a refusé d’annuler son billet contrairement à ce que d’autres avaient fait. “J’ai eu peur. Forcément. (...) mais ne pas venir, c’est exactement ce qu’ils veulent“, a-t-il confié à l’AFP. “La reconquête de la normalité représente la plus grande des défaites pour ceux qui veulent porter atteinte à notre style de vie… dont fait partie le football“, avait aussi déclaré le président catalan. Avec agence (AFP)