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La Grèce et ses créanciers prêts de conclure un projet d'accord

Alexis Tsipras a déclaré mardi que la Grèce avait soumis lundi soir à ses créanciers un projet d'accord global dont le sort dépendait désormais des dirigeants politiques européens. /Photo prise le 2 juin 2015/REUTERS/Alkis Konstantinidis

par Renee Maltezou

ATHENES (Reuters) - Les créanciers internationaux de la Grèce sont sur le point de boucler un projet d'accord qu'ils veulent soumettre au gouvernement d'Alexis Tsipras, a-t-on appris mardi de source proche des discussions, une démarche qui viserait à donner un nouveau souffle aux discussions sur l'aide financière.

Le Premier ministre grec a annoncé qu'Athènes avait soumis à ses bailleurs de fonds un projet de réformes "global" et "réaliste", ajoutant qu'un accord dépendait désormais des dirigeants politiques européens.

Ses propos ont été interprétés comme une tentative de couper l'herbe sous le pied aux créanciers pour les empêcher de lui faire une offre "à prendre ou à laisser" et de prouver aux électeurs grecs que leur pays conservait l'initiative.

Sans en préciser le contenu, Alexis Tsipras a déclaré que les propositions de son gouvernement avaient été transmises aux créanciers lundi soir. Un responsable grec a précisé que le document leur avait été envoyé avant la réunion en fin de soirée à Berlin des dirigeants allemand et français et de ceux de la Banque centrale européenne et du Fonds monétaire international.

"Nous avons soumis un projet réaliste pour sortir la Grèce de la crise. Un projet réaliste dont l'acceptation par les institutions, nos créanciers et nos partenaires en Europe marquera la fin du scénario de la division de l'Europe", a dit le chef du gouvernement à la presse à l'issue d'une réunion à Athènes.

"Nous n'attendons pas d'eux qu'ils soumettent une proposition. La Grèce soumet un projet, il est désormais clair que (...) la décision appartient aux dirigeants politiques de l'Europe", a-t-il ajouté.

ACCORD CETTE SEMAINE ?

De source proche des pourparlers, on déclare que les créanciers sont eux-mêmes en train de parachever la rédaction de leur offre à Athènes. "Nous y sommes presque", dit-on.

Une porte-parole de la Commission européenne a expliqué que les négociateurs des deux parties échangeaient de multiples documents, ce qui est en soi "déjà un bon signe". Les discussions continuent et "nous ne sommes pas encore au bout", a-t-elle ajouté.

Pour le président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, une reprise de l'aide financière à la Grèce n'est "même pas théoriquement possible" cette semaine.

Interrogé par la chaîne néerlandaise RTL, il a expliqué que "même si les institutions en Grèce parviennent à un accord cette semaine, il faudrait qu'il passe par l'Eurogroupe". "Donc, même théoriquement, il n'est pas possible cette semaine" de reprendre le versement des aides à Athènes, a-t-il ajouté.

On ignorait dans l'immédiat si le document rédigé par le gouvernement grec, que certains représentants de l'UE ont dit ne pas avoir pu consulter pour l'instant, contenait des avancées sur les dossiers les plus épineux, comme les retraites, la réforme du marché du travail, les objectifs d'excédent budgétaire primaire ou encore les effectifs de la fonction publique.

De sources proches des négociations, on rapporte que le document grec n'inclut aucune concession sur les sujets majeurs.

En début de journée, Pierre Moscovici, le commissaire européen aux Affaires économiques, avait évoqué de "vrais progrès" dans les discussions, ajoutant qu'"on commence à travailler de manière consistante sur les retraites".

"Mais nous n'y sommes pas encore", avait-il ajouté.

Lundi soir, le président de la BCE, Mario Draghi, et la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, ont débattu de la Grèce à Berlin avec le président français, François Hollande, la chancelière allemande Angela Merkel et le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker.

300 MILLIONS D'EUROS À PAYER VENDREDI

Cette rencontre au sommet tenue à l'improviste illustre une volonté apparente des responsables politiques de reprendre le dossier en main, alors qu'ils insistaient ces derniers mois sur le fait que les négociations devaient se poursuivre au niveau des experts.

Le temps presse pour toutes les parties puisque la Grèce doit faire face vendredi et au cours des prochaines semaines à des échéances financières de plus en plus difficiles à honorer.

Or un défaut d'Athènes ne manquerait pas d'attiser les craintes d'un "Grexit", une sortie pure et simple de la Grèce de la zone euro, et de déclencher de nouvelles turbulences sur les marchés financiers.

Le ministre allemand de l'Economie, Sigmar Gabriel, a affirmé mardi qu'un défaut de la Grèce aurait des conséquences "gigantesques" pour l'Europe, tout en ajoutant espérer qu'un accord soit conclu pour éviter un tel scénario.

De source gouvernementale grecque, on dit que le remboursement d'environ 300 millions d'euros au FMI dû vendredi sera effectué en cas d'accord avec les créanciers, ce qui sous-entend à l'inverse qu'Athènes pourrait ne pas payer en l'absence de compromis. Ce responsable a précisé que ce versement aurait lieu en cas d'accord préliminaire même si celui-ci n'était pas encore approuvé par l'Eurogroupe.

Le versement dû au 5 juin est le premier des quatre remboursements que la Grèce doit effectuer au FMI d'ici la fin du mois, pour un montant total de 1,6 milliard d'euros.

Un éventuel accord permettrait en principe à Athènes de percevoir le solde d'environ 7,2 milliards d'euros des aides prévues par le plan d'aide en cours, censé s'achever le 30 juin.

(avec Karolina Tagaris et Renee Maltezou à Athènes et Yann Le Guernigou à Paris, Jean-Stéphane Brosse et Marc Angrand pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)